Politique culturelle

Éditorial

L’inflation des labels dans la culture

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 23 mai 2022 - 384 mots

FRANCE

Politique culturelle. L’administration française adore catégoriser les lieux et les événements.

La Villa Noailles à Hyères est labellisée Cacin. © Herkra, 2016, CC BY-SA 4.0
La Villa Noailles à Hyères est labellisée Cacin.
© Herkra, 2016

Elle puise ce désir irrépressible dans le vieux fond cartésien et jacobin de la France. Le ministère de la Culture est l’un des plus prolixes en la matière, on ne compte pas moins d’une quarantaine de labels dans le patrimoine et la création dont une bonne dizaine dans le spectacle vivant, non développés dans le dossier que le Journal des Arts consacre à ce sujet dans ce numéro. Derniers en date, les Centres d’art contemporain d’intérêt national (Cacin) sont aujourd’hui plus d’une quarantaine.

Cette sollicitude part d’un bon naturel : pour que ces structures aient une identité, il faut qu’elles aient un nom. La politique de labellisation est aussi très utile, elle permet d’unifier les missions et pratiques au niveau national par la voie des conventionnements. Elle fournit un cadre pour le financement et elle est, ce faisant, un moyen pour l’État de contrôler les lieux labellisés, voire de valider la nomination des directeurs/trices. Les collectivités locales se sont vite emparées de ces acronymes, et aujourd’hui, de nombreux élus aiment à se prévaloir de disposer dans leur commune de « 50 MH [monuments historiques], un Frac, un CDN [Centre dramatique national] et une Smac [scène de musique actuelle]… »

La labellisation s’est malheureusement arrêtée au milieu du chemin, le grand public ne connaît souvent pas les labels (sauf peut-être celui de l’Unesco) ou s’y perd. Il y en a trop comme le montre bien le dessin de Michel Cambon. Les subtilités administratives lui échappent. Quelle différence entre un musée d’art contemporain et un Fonds régional d’art contemporain exposant ses collections dans son propre bâtiment ? Pourquoi le plus grand des centres d’art (le Palais de Tokyo) n’a pas le label « Cacin » ? (Parce que c’est une SAS, autre acronyme.)

Il faudrait donc remettre à plat les intitulés et envisager des regroupements de labels (Frac et musée, Centre dramatique national et Scène nationale) selon le type de service apporté au public, quitte à leur donner des étiquettes subsidiaires pour que le ministère différencie leurs caractéristiques administratives. Il faudrait surtout mener des campagnes de communication sur plusieurs années pour mieux les faire connaître auprès du public. Et en profiter pour éclaircir la notion de « tiers-lieu » qui a autant de définitions que d’auteurs. Et un label de plus.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°589 du 13 mai 2022, avec le titre suivant : L’inflation des labels dans la culture

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