Centre d'art - Frac

Frac et centres d’art en mouvement

Par Christine Coste · Le Journal des Arts

Le 14 mars 2021 - 813 mots

FRANCE

Engagés depuis quatre à cinq décennies en faveur de la création artistique contemporaine et de sa réception par le public, ces deux types de lieux connaissent des évolutions très différentes. Si, en dépit de la réforme territoriale, un certain nombre de Frac sont aujourd’hui solidement implantés en région, la pérennité des centres d’art est encore loin d’être assurée..

Frac des Pays de la Loire, site de Carquefou. © Photo Marc Domage
Frac des Pays de la Loire, site de Carquefou.
© Photo Marc Domage

Politique culturelle. Frac et centres d’art : deux réseaux distincts dont la vague de création dans les années 1980 a épousé les années Lang, les premières lois de décentralisation et leur corollaire, la montée en puissance des collectivités territoriales dans leur financement. Près de cinquante ans plus tard, ils témoignent d’une réelle implantation en régions. Leur histoire ne relève toutefois pas de la même origine. Celle des 23 Fonds régionaux d’art contemporain est fondée sur un partenariat État-Région mis en place à partir de 1981 (les derniers Frac ont été créés en 1986, en Corse et à La Réunion), avec pour mission de constituer, pour chaque région, une collection d’œuvres d’artistes contemporains et de la diffuser sur l’ensemble de son territoire à travers des expositions et manifestations hors les murs. Les Frac ont été les premiers instruments de la politique culturelle des Régions. Leur création a été pensée pour répondre au fort déséquilibre territorial d’accès à la création contemporaine qui existait alors. Mais, si la souplesse de leur statut leur a permis de pallier la défaillance des musées en matière d’art contemporain, ces structures ne disposaient pas nécessairement d’un bâtiment spécifique, adapté à leurs besoins. Équipe et budget étaient réduits a minima.

En 2000, le Frac des Pays de la Loire à Carquefou (Loire-Atlantique) a été le premier à bénéficier de la construction de locaux d’envergure – signés de l’architecte Jean Claude Pondevie –, adaptés à l’ensemble de ses activités : conservation et restauration des œuvres, expositions, médiation… À partir de 2012, les Frac Bretagne, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Centre, Franche-Comté, Nord-Pas-de-Calais, Aquitaine et Normandie-Caen se sont dotés de nouveaux équipements, installés dans les capitales régionales. D’autres suivent, comme celui du Limousin. Au fur et à mesure de l’inauguration des bâtiments de ces Frac dits de « nouvelle génération », la physionomie du réseau, relativement homogène jusqu’alors, connaît ses premiers bouleversements. La réforme territoriale de 2015, en réduisant le nombre de Régions de 22 à 13, a fait évoluer la part État/Région dans leur financement, passée respectivement, en pourcentage, de 50/50 à 30/70 dans la plupart des cas. Pour la première fois, la pérennité de certains fonds régionaux s’est posée, comme en Normandie ou en Bourgogne-Franche-Comté.

L’équilibre plus fragile des centres d’art

L’histoire des centres d’art est tout autre. Leur création – pour trois d’entre eux à partir des années 1970 –, en général sous un statut associatif, est souvent due à des initiatives personnelles et/ou municipales, à l’instar de la Galerie Édouard-Manet, sous l’impulsion de Bernard Point et Madeleine van Doren en 1968 à Gennevilliers (Hauts-de-Seine), en même temps que l’école municipale des Beaux-Arts. L’extrême hétérogénéité de ces structures (du Palais de Tokyo à Paris à Vent des Forêts, à Fresnes-au-Mont dans la Meuse) prévaut et leur inscription dans le paysage n’est jamais définitivement acquise. En témoignent la disparition en 2016 du Quartier à Quimper et les menaces qui pèsent aujourd’hui sur le Magasin à Grenoble ou sur le Parc Saint Léger à Pougues-les-Eaux (Nièvre).

En l’absence de données statistiques nationales, il est impossible d’établir précisément le nombre de centres d’art aujourd’hui en France, pas plus que le nombre annuel de créations ou de disparitions, car tout lieu d’exposition sans collection peut entrer dans cette catégorie. Si l’on se réfère au réseau d.c.a, leur création a connu un rythme soutenu jusque dans les années 1990. Sur ses 50 membres, 17 ont été fondés en 1980, 20 dans les années 1990 et seulement 9 dans les années 2000. À partir de 2017, le label Centre d’art contemporain d’intérêt national (Cacin), décerné par le ministère de la Culture, marque toutefois une étape dans la définition d’un centre d’art et la reconnaissance de son engagement en faveur des arts visuels et de son action envers les publics, une distinction qui « garantit l’accompagnement de l’État ». La labellisation ne concerne pour l’instant que 31 centres d’art dont 26 du réseau d.c.a.

L’attribution le 19 janvier du label Cacin au CAPC-Musée d’art contemporain de Bordeaux, la première du genre accordée à un musée, rappelle qu’avant de devenir musée en 1984, le CAPC, fondé en 1973 par Jean-Louis Froment, a été un centre d’art plastique et contemporain. À Villeurbanne, ville de la banlieue de Lyon, c’est une hybridation qui a été à l’origine de l’Institut d’art contemporain, né de la fusion en 1998 du Frac Rhône-Alpes et du Nouveau Musée. Inaugurés en 2000, Les Abattoirs, Musée-Frac Occitanie de Toulouse résultent de la fusion du Frac Midi-Pyrénées et du Musée d’art moderne et contemporain de la ville. À l’âge de la maturité, tout peut être rejoué.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°562 du 5 mars 2021, avec le titre suivant : Frac et centres d’art en mouvement

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