Foire & Salon

Salon d’art et d’antiquités

La Biennale Paris se banalise

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 12 septembre 2019 - 907 mots

PARIS

Annuelle, plus courte, moins courue, distancée par les événements concurrents, la Biennale Paris ne ressemble plus à l’ex-Biennale des antiquaires.

Biennale Paris 2019 - Copyright photo Clotilde Bednarek pour Le Journal des Arts
La Biennale Paris 2019 au Grand Palais
© photo Clotilde Bednarek pour Le Journal des Arts, 11 septembre 2019

Paris. La Biennale Paris – anciennement « Biennale des antiquaires » – revient au Grand Palais du 13 au 17 septembre pour sa 31e édition, avec 75 exposants au lieu de 62 en 2018. Lançant la rentrée culturelle, la manifestation parisienne tant attendue autrefois cherche depuis plusieurs années un nouveau souffle. Moins fréquentée, désertée par de nombreux marchands français et étrangers qui n’ont pas reconduit leur participation de l’an passé ou qui n’y mettent plus les pieds depuis plusieurs éditions (Prazan, De Jonckheere, Laffanour, Vallois…), les nombreux rebondissements et coups durs qu’elle a connus ne l’ont pas aidée.

Lâchée par les coprésidents de son vetting (le comité d’admission des œuvres) en juillet à la suite d’un désaccord avec la sélection des exposants, fustigée quant au choix de certains participants – les uns mis en examen, les autres n’étant pas au niveau –, rien ne lui aura été épargné cette année encore. Sans parler du fait que tout ce qui faisait jadis la saveur de la Biennale des antiquaires a disparu. Entre son annualisation, l’évolution des goûts, les guerres intestines et quelques mauvais choix stratégiques, l’événement est désormais semblable à bien d’autres salons, si ce n’est qu’il se tient dans un écrin à nul autre pareil : sous la verrière du Grand Palais.

Le Bahreïn invité d’honneur

Organisée depuis toujours par le Syndicat national des antiquaires (SNA), la Biennale Paris devient de plus en plus un salon traditionnel, si tant est qu’il existe encore des salons d’art et d’antiquités traditionnels. Un symptôme ? le départ des grands joailliers en 2015. Eux qui faisaient tant rêver ne reviendront pas. « Les exclure il y a quatre ans a été une grosse erreur. Maintenant on ne peut plus les faire revenir ensemble car ils se livrent une concurrence féroce. Par ailleurs, le marché s’est depuis déplacé vers l’Asie », regrette Mathias Ary Jan, président du SNA.

Exit également les décors fastueux signés par les plus grands décorateurs du moment. Si le plan au sol salué pour sa fluidité en 2018 reste inchangé, c’est la société Stabilo qui a aménagé les stands, comme elle le fait déjà pour Tefaf à Maastricht ou Frieze à Londres.

Parce que marchands et acheteurs plaident aujourd’hui pour des durées plus courtes, les organisateurs ont réduit à cinq le nombre de jours d’exposition, quand il était de neuf auparavant. Toujours dans l’air du temps et à l’instar d’autres manifestations internationales, le principe d’une exposition non commerciale mis en place il y a trois ans est repris, mais cette fois avec un pays : après la collection du Musée de l’Ermitage (Saint-Pétersbourg), celle de Barbier-Mueller puis de Pierre-Jean Chalençon, le Bahreïn prend la place de l’invité d’honneur. Son pavillon gigantesque mis en scène par la scénographe Nathalie Crinière – 350 mètres carrés divisés en trois parties – mêle artisanat local, artistes contemporains et tradition de la perle.

À l’image de Tefaf et son concept « Showcase », une section « Nouveaux talents » est créée : douze jeunes galeries de moins de 10 ans d’âge prennent place sur des espaces de 10 m2. L’idée ne date toutefois pas d’hier puisque le programme fait référence à l’ancien « Tremplin ». « Le rôle du syndicat est aussi de promouvoir les jeunes marchands », souligne Mathias Ary Jan. Parmi ces jeunes recrues figure la galerie Aborigène (Paris), fondée en 2016. La spécialité fait donc une entrée remarquée à la Biennale puisqu’une autre galerie l’expose, celle de Stéphane Jacob (Paris).

« En voulant s’aligner sur les autres manifestations, on a tué la Biennale », lance dépité un acteur du marché. « Mais il faut bien s’adapter à la tendance actuelle ! », réplique Mathias Ary Jan. Aussi, dans la mouvance générale, l’art moderne prend le pas sur les antiquités. Pour preuve, sur les trente galeries qui font leur entrée, la plupart sont spécialisées en art moderne et contemporain, portant à 40 le nombre de représentants de cette discipline. Parmi eux, Claude Bernard (Paris), qui organise un focus sur Sam Szafran, la galerie Berès (Paris) qui présente un pastel de Vuillard, Zinnias sur la table à Vaucresson (aux alentours de 200 000 à 300 000 €), Marie-Hélène de la Forest Divonne (Paris, Bruxelles), qui mise sur Guy de Malherbe et Vincent Bioulès. Mais aussi Alexis Pentcheff (Marseille) qui montre Jeanne au rocher, Cavalière, 1906 d’Henri Manguin, la galerie Capazza (Nançay) qui met en lumière des pièces de l’orfèvre Goudji, ou encore Glénat qui propose une planche originale d’Enki Bilal, Les phalanges de l’ordre noir, 1979 (20 000-25 000 €).

Sur les stands dévolus à l’art ancien (dont les arts extra-européens), 29 au total, on peut découvrir le Jésus Bon Pasteur, une sculpture en ivoire, Goa, XVIIe, chez São Roque (Lisbonne) [entre 200 000 et 300 000 €, voir ill.] ; Paysage d’hiver, vers 1625, de Joos de Momper le Jeune et Jan Brueghel le Jeune à la galerie Costermans (Bruxelles) [280 000 €] ; un linteau Malagan, Kobo-Kobor, provenant d’une maison d’initiation en Nouvelle-Irlande et récolté par le comte Festetics de Tolna présenté par la galerie Meyer (Paris) [85 000 €] ; un bureau de pente attribué à BVRB II, vers 1725, en marqueterie et bronzes dorés chez Pellat de Villedon (Versailles) [au-dessus de 100 000 €] ou bien un vase libatoire en terre cuite en forme de zébu, art dit d’Amlash, Iran, début du Ier millénaire av. J.-C. chez Kevorkian (Paris) [en dessous de 50 000 €].

La Biennale Paris,
du 13 au 17 septembre, Grand Palais, av. Winston Churchill, 75008 Paris, www.labiennaleparis.com

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°528 du 6 septembre 2019, avec le titre suivant : La Biennale Paris se banalise

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