Foire & Salon

FOIRE D’ART ET D’ANTIQUITÉS

Une « Biennale Paris » 2019 déconcertante

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 19 septembre 2019 - 771 mots

PARIS

Les initiatives positives comme les stands dévolus aux jeunes talents ou d’intéressants solo shows n’ont pas réussi à faire oublier la pâleur du décor et le niveau médiocre de certaines galeries.

L'entrée de la Biennale Paris 2019 au Grand Palais © Photo LudoSane
L'entrée de la Biennale Paris 2019 au Grand Palais
© Photo LudoSane

Paris. Après cinq jours d’exposition au Grand Palais, la Biennale Paris a refermé ses portes mardi 17 septembre au soir. Le bilan est contrasté. Le Syndicat national des antiquaires, organisateur de la manifestation, et son président, Mathias Ary Jan, se sont démenés pour redresser la barre d’un navire en piteux état. L’idée de raccourcir la durée de Biennale Paris à cinq jours a été saluée, tout comme la mise en place d’un espace réservé aux « Nouveaux talents », à gauche de la nef. Le dîner de gala, ouvert par une prise de parole du ministre de la Culture, Franck Riester, aurait été un succès, selon certains des 700 invités. La soirée de vernissage a, elle, réuni 10 000 visiteurs, contre 8 000 l’an dernier. Le reste de la semaine, les exposants ont relevé un flot continu de visiteurs, essentiellement européen. Mais pourquoi un tel décor ? Si les stands en eux-mêmes étaient sobres – leur liseré vert s’harmonisant avec la verrière –, l’agencement sous la coupole, un immense espace laissé quasiment vide, n’était pas des plus chaleureux. Une moquette turquoise imitant les reflets de l’eau et ces boules blanches au centre laissaient perplexe, et le pavillon du Bahreïn dressé dans le fond dissimulait totalement « Transchromie », l’installation de l’artiste français d’origine vénézuélienne Carlos Cruz-Díez présentée par La Patinoire royale/Galerie Valérie Bach.

Le Labyrinthe de Transchromie de Carlos Cruz-Diez installé à la Biennale Paris 2019 © Photo Florent Drillon.
Le Labyrinthe de Transchromie de Carlos Cruz-Diez installé à la Biennale Paris 2019
© Photo Florent Drillon / Biennale Paris
Courtesy La Patinoire Royale / galerie Valérie Bach
Le contemporain gagne du terrain

La circulation aisée et aérée permettait de ne manquer aucun stand – un bon point quand on sait combien il est facile de se perdre dans les salons d’art et d’antiquités –, et la répartition entre les spécialités était équilibrée, bien que l’art moderne et contemporain ait gagné du terrain. Cependant, la qualité très inégale des galeries, dont beaucoup étaient inconnues, pouvait dérouter le visiteur. « Tant qu’il y aura ce genre d’exposants, les grands marchands ne reviendront pas », relevait l’un d’eux. Certains stands retenaient toutefois l’attention comme celui de la Galerie Claude Bernard avec un solo show consacré à Sam Szafran, qui est décédé à l’âge de 84 ans le samedi 14 septembre, soit deux jours après l’ouverture de la manifestation.

En face, Carpenters Workshop Gallery consacrait son espace au designer américain disparu l’an dernier Wendell Castle et ses meubles-sculptures. Se distinguait aussi le stand de la Galerie Martel-Greiner, avec un bas-relief en acier de Willy Ceysens (48 000 €) et un hommage aux créations de Gilbert Albert : une trentaine de pièces pour des prix allant de 8 000 à 120 000 euros ; sans oublier le tour de force de la Galerie Capazza (Nançay) qui avait installé en guise de plafond une coupole en vitrail d’Éric Bonte.

Quelques bizarreries étaient repérables ici ou là : une femme de ménage hyperréaliste en résine de Marc Sijan chez Opera Gallery (67 000 €), une pelouse en guise de moquette chez Pellat de Villedon, une photo de Pamela Anderson à moitié nue sur le stand de Jérôme Zodo, la présence de Drouot… Mais aussi de petites bouffées d’oxygène avec la présence de la BD (Glénat), de costumes anciens (Villa Rosemaine, Toulon), d’art aborigène (Stéphane Jacob), des Oies de François-Xavier Lalanne (Galerie Ary Jan)…

Globalement, du point de vue des transactions, les marchands se disaient« assez contents », tout en reconnaissant que bien vendre ne signifie pas nécessairemnt que le salon était bon. Parmi les ventes, citons : une divinité guerrière masculine en bronze, Levant, art syro-hittite, milieu du IIe millénaire av J.-C. (Kevorkian, [voir ill.]) ; le Bon Berger, une sculpture en ivoire, Goa, XVIIe siècle, pour 300 000 euros (São Roque) ; une pyxide à figures rouges, Grèce, Ve siècle av. J.-C. achetée par un musée (Phoenix). L’élégant chiffonnier de Dominique, vers 1922-1924 (autour de 100 000 €), a lui bénéficié d’un fort intérêt (Galerie Marcilhac).

L’organisation pourrait être sous-traitée

Personne n’a oublié la Biennale d’antan, avec son côté glamour et prestigieux. Certes ce temps est révolu. Mais pourquoi garder les mêmes codes tout en affirmant que la manifestation est « un nouveau salon » ? Le message est confus. « Nous aimerions faire évoluer le nom mais nous souhaitions le conserver un temps pour que la transition avec un événement devenu aujourd’hui annuel se fasse en douceur. Je souhaite également que le salon soit organisé par un organisme externe », révèle Mathias Ary Jan au JdA.

Dans deux ans, la manifestation devra quitter le Grand Palais pour cause de travaux. « Le changement de lieu précipitera dans un sens ou dans l’autre le devenir de la Biennale », a estimé l’un des exposants.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°529 du 20 septembre 2019, avec le titre suivant : Une « Biennale PAris » 2019 déconcertante

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