La foire, qui réunit pour cette 2e édition au Grand Palais 206 galeries, prend en considération la déprime du marché et se met davantage à leur écoute.
Paris. Avec une offre culturelle dopée par le secteur privé et un art de vivre d’une qualité exceptionnelle, Paris n’a jamais été aussi désirable. Sa place dans le marché de l’art mondial s’en trouve renforcée. Art Basel, en apposant son label sur la foire d’automne, y a, d’une certaine façon, contribué. En 2022, sa première édition parisienne réunissait 156 galeries au Grand Palais éphémère. Elle en accueille 50 de plus cette année au Grand Palais. Les visiteurs, en particulier les Américains et les Asiatiques qui n’ont pas fait le voyage en juin pour Art Basel à Bâle, sont attendus en nombre à Paris.
Parmi les 206 participants, une quarantaine de galeries françaises, soit moins d’un quart de la sélection. Mais la proportion est plus importante si on inclut dans ce contingent des enseignes telles que Marian Goodman, Max Hetzler, Karsten Greve, Tornabuoni Art, Thaddaeus Ropac… installées de longue date à Paris. Elle augmente encore si l’on recense, comme le fait Art Basel, celles ayant depuis seulement quelques années une adresse dans la capitale (Esther Schipper, Mariane Ibrahim, Mendes Wood DM…), mais aussi les méga-galeries telles que Gagosian, Hauser & Wirth ou David Zwirner qui y ont une succursale. Soient en tout 63 exposants « disposant d’un espace en France ».
Avec 41 pays représentés, Art Basel Paris affirme sa dimension internationale, qui se caractérise par un tropisme européen et nord-américain (35 galeries états-uniennes). L’arc méditerranéen esquissé lors de l’édition précédente autour des galeries Selma Feriani (Tunisie), Sfeir-Semler (Liban), Marfa’ Projects (Liban) ne s’est pas développé, et la galerie saoudienne ATHR (Jeddah, AlUla, Riyadh) ne figure pas dans la sélection.
Le taux de renouvellement reste faible. La foire est contrainte par la configuration des lieux, la surface des stands les plus spacieux culminant à 77 m2 – exception faite des quatre stands d’angle, qui frôlent les 100 mètres carrés mais doivent composer avec un grand escalier. Cette jauge limitée permet de maintenir un degré d’exigence. La foire n’en accueille pas moins cette année 29 nouvelles venues, dont 13 sur son secteur principal, « Galeries ».

Un mois avant l’ouverture, Art Basel Paris a procédé à d’ultimes ajustements. Pour éviter dès les premières heures un effet de cohue et un encombrement des stands peu propice aux transactions, la foire ouvre ses portes en « Avant-première » dès le mardi 21 octobre, entre 15 heures et 19 heures. Plusieurs centaines d’happy few découvriront les stands dans une ambiance feutrée, à raison de six personnes accompagnées et invitées par galerie. Plus calme, l’atmosphère dans les allées devra cependant être suffisamment stimulante pour susciter un peu de cette fièvre favorable aux transactions. « Avant-première » se veut en tout cas une réponse des organisateurs aux attentes des galeries, qui se voient conférer le rôle de « puissances invitantes ».
Ces dernières ont d’autant plus d’exigences à faire valoir que le coût de la location des stands a augmenté (de 10 % environ pour les emplacements dans la nef). Le prix au mètre carré est de 850 euros pour les stands de petite taille – 20 à 35 m² –, il atteint 1 061,50 € pour les plus grands. Dans un contexte de ralentissement du marché, la foire a cependant souhaité faire un geste de solidarité en direction des exposants. Fin septembre, ceux-ci ont reçu un courrier signé du PDG, Noah Horowitz, et du directeur international, Vincenzo de Bellis, les informant de la mise en place « d’un modèle progressif de tarification destiné aux galeries participant au secteur principal de la foire pour leur première ou deuxième année ». Il prendra la forme d’une réduction rétroactive de respectivement 20 % et 10 % sur le prix au mètre carré. Cette mesure, qui sera étendue aux autres déclinaisons d’Art Basel dans le monde et reconduite en 2026, témoigne du fait que les organisateurs ne sont pas insensibles aux difficultés économiques rencontrées par les galeristes.
Vingt galeries partagent un stand sur cette édition, un chiffre qui a doublé par rapport à l’an dernier. Neuf de ces espaces partagés figurent dans le secteur principal, et l’un se trouve dans le secteur « Premise » [proposant depuis l’an dernier des projets curatoriaux singuliers]. « Ces galeries appartiennent à une nouvelle génération de marchands », affirme Clément Delépine, directeur de la manifestation (1). Certaines, comme Christian Andersen (Copenhague), Fanta (Milan) ou Madragoa (Lisbonne), ont fait leur entrée sur la foire les années précédentes via le secteur « Émergence ». Celui-ci, situé dans les coursives de l’étage, offre des conditions d’accès moins onéreuses (environ 10 500 € pour un stand de 30 m2). Il rassemble pour cette édition 16 jeunes galeries, dont une moitié de nouvelles venues.
Les marchands unissent également parfois leurs forces pour produire certaines des œuvres présentées dans le programme public, en libre accès et déployé dans la ville. Ainsi, sur le parvis de l’Institut de France, la sculpture monumentale d’Ugo Rondinone requiert la collaboration des galeries Eva Presenhuber (Zurich, Vienne), Gladstone (New York, Bruxelles, Séoul) et Mennour (Paris). D’autres font le pari de marquer le coup dans l’espace public, telle Sadies Cole HQ (Londres), absente du Grand Palais mais qui accompagne place Vendôme l’artiste vénézuélien-américain Alex Da Corte et sa baudruche géante vert grenouille Kermit the Frog, Even (2018, [voir ill.]) à moitié dégonflée, comme le symbole de l’effondrement d’une époque.
(1) sur le départ.
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Art Basel Paris s’adapte au réel
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°663 du 17 octobre 2025, avec le titre suivant : Art Basel Paris s’adapte au réel






