Un survol de la foire révèle une mise en valeur par les exposants de la scène parisienne dans l’histoire, pas seulement du premier XXe siècle, qui a aimanté les artistes étrangers.
Paris. Alors que Paris retrouve une place centrale dans le marché de l’art, faut-il à nouveau rappeler que la capitale française a toujours été un formidable carrefour artistique ? Même si la scène hexagonale n’est qu’une de ses composantes, Art Basel capitalise sur cette image, et sur son aura, à travers les époques et au-delà des frontières.
Dans cette perspective, un détour par le passé glorieux des avant-gardes s’impose. Les spécialistes de l’art moderne ne sont pas nombreux dans les allées mais leur présence dans la nef est rassurante, elle apporte à la foire la caution de l’histoire. Ainsi du stand de la galerie Le Minotaure (Paris) qui réunit, outre une série d’aquarelles cubistes de Fernand léger [voir ill.], des photogrammes, une gouache sur papier, des compositions sur Plexiglas et une toile de László Moholy-Nagy (de 300 000 € à 3 M€). Autre écho à ce XXe siècle fondateur, l’accrochage de la Galerie 1900-2000 (Paris), qui met à l’honneur quelques figures du mouvement Dada, du surréalisme et de l’entre-deux-guerres : une étude préparatoire pour les Neuf moules Mâlic (1913-1914) de Marcel Duchamp, une lettre illustrée de Victor Brauner, des compositions textiles de la Québécoise Mimi Parent [voir ill. p. 6], une huile sur toile tardive de Félix Labisse ; pour ces fétiches et chefs-d’œuvre, les prix grimpent jusqu’à 650 000 euros. Nathalie Obadia (Paris, Bruxelles), pour sa part, montre une superbe toile de Shirley Jaffe (TheRed Diamond, 1964, entre 300 000 et 320 000 $, [voir ill. p. 6] réalisée peu avant que la peintre américaine installe définitivement son atelier dans le 5e arrondissement parisien. Hervé Loevenbruck (Paris) a construit son stand autour d’une pièce muséale, une rare tête en bronze d’Alina Szapocznikow (Głowa VI, 1961, environ 500 000 €) qui fit ses études à Prague puis aux Beaux-Arts de Paris où elle revint vivre dans les années 1960, et qui est exposée actuellement au Musée de Grenoble.
La galerie Georges-Philippe & Nathalie Vallois (Paris) consacre une partie de ses espaces à Tinguely et à Niki de Saint Phalle, ce qui ne pouvait mieux tomber puisque le couple est célébré par une exposition voisine, au Grand Palais. Les artistes du mouvement Supports/Surfaces, créé au tournant des années 1970, forment quant à eux le noyau dur de la programmation de Ceysson & Bénétière, avec plusieurs œuvres de Louis Cane, disparu en novembre 2024, mais aussi de Noël Dolla et du prolifique Claude Viallat. Christophe Gaillard (Paris, Bruxelles), enfin admis dans la nef, y montre notamment un tableau de Simon Hantaï datant de 1975, emblématique de sa technique du pliage (entre 600 000 et 800 000 €, [voir ill. p. 6]).
Paris et les fantastiques collections de ses musées ont toujours attiré les artistes étrangers. Membre de la Beat generation, le peintre Bob Thompson a ainsi passé une année formatrice, de 1961 à 1962, en se rendant presque quotidiennement au Louvre, rappelle Michael Rosenfeld [voir ill.]. Ses allégories de la vie américaine, riches de références aux chefs-d’œuvre européens, sont au centre du stand du galeriste new-yorkais. Figure incontournable de la scène contemporaine américaine, Wade Guyton a quant à lui déjà fait état de sa prédilection inattendue pour le Musée d’Orsay ; la galerie Chantal Crousel (Paris) met l’accent sur sa production la plus récente, entre peinture et sculpture. Également nourrie de culture classique, l’œuvre de Xie Lei (nommé pour le prix Marcel Duchamp décerné le 23 octobre) côtoie chez Semiose (Paris) des dessins de Françoise Pétrovitch, une grande toile de Laurent Proux et une composition murale de Moffat Takadiwa [voir ill.] (entre 25 000 et 30 000 € pour ces deux derniers). Tandis que l’on redécouvre les portraits de la peintre colombienne Emma Reyes (1919, Bogota-2003, Bordeaux) chez la parisienne Crèvecœur, nouvelle venue sur la foire. On relève par ailleurs sur cette édition l’absence de la galerie Suzanne Tarasiève et le retour – sur le secteur « Premise » – de Martine Aboucaya (Paris), fidèle autrefois de la Fiac.
Les clins d’œil à l’actualité institutionnelle parisienne ne manqueront pas dans cette édition. Alors que Gerhard Richter est à l’affiche de la Fondation Louis Vuitton, on le retrouve sur le stand de la galerie David Zwirner avec des multiples récents. Le marchand réserve en revanche à ses espaces du Marais une sélection de tableaux issus de différentes séries clés du peintre allemand. In Situ-Fabienne Leclerc (Romainville) peut se féliciter de défendre depuis près de dix ans le travail d’Otobong Nkanga, à laquelle le Musée d’art moderne consacre sa première exposition dans une institution parisienne. On verra chez Max Hetzler des œuvres de Bridget Riley, actuellement sur les cimaises du Musée d’Orsay, et, chez Hauser & Wirth, des toiles de Philip Guston, exposé au Musée national Picasso.
Pour sa première participation à la foire, le new-yorkais David Nolan a imaginé une sorte de salon tapissé d’œuvres sur papier de grands noms de l’histoire de l’art des années 1920 à nos jours. Il comprend des papiers pliés de Dorothea Rockburne (autour de 70 000 €) dont des œuvres sont montrées au même moment dans l’exposition « Minimal » de Pinault Collection. Chez Paula Cooper (New York), l’une des pièces phares du stand est Moss Bed, Twin, (1986/2025), de Meg Webster, dont une installation investit justement la rotonde de la Bourse de commerce. Grâce à ses musées publics mais aussi à ses fondations privées et à ses galeries, Paris continue de rayonner.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Galeries, pleins feux sur Paris
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°663 du 17 octobre 2025, avec le titre suivant : Galeries, pleins feux sur Paris





