Royaume-Uni - Musée - Société

Le V&A efface finalement le nom de la famille Sackler 

Par Alexandre Clappe · lejournaldesarts.fr

Le 5 octobre 2022 - 482 mots

LONDRES / ROYAUME-UNI

Disgraciée par son implication dans le scandale des opioïdes, cette famille a vu son nom disparaître de nombreux musées.

L'ex-Cour Sackler du Victoria and Albert Museum. © Hufton+Crow
L'ex-Cour Sackler du Victoria and Albert Museum.
© Hufton+Crow

La pression était devenue trop forte. Le Victoria and Albert Museum (V&A), l'une des plus importantes collections de design et d'art décoratif au monde, a finalement effacé le nom de la famille Sackler de ses murs. Cette grande famille de mécènes milliardaires dirigeant le groupe pharmaceutique Purdue Pharma, était impliquée depuis des années dans des procès liés à la crise des opiacés qui a tué des centaines de milliers de personnes aux États-Unis et dans le monde. 

En retirant les panneaux qui signalaient aux visiteurs la cour Sackler, son entrée principale ouverte en 2017, et le Sackler Center for Arts Education, le V&A rejoint d'autres institutions britanniques et mondiales. Tout commence en mars 2019, quand la National Portrait Gallery avait refusé un don d’un million de livres de la société américaine. Quelques mois plus tard le Louvre était le premier grand musée à enlever le nom des Sackler d’une des salles. Il avait été suivi en 2021 par le Metropolitan Museum of Art et la Serpentine Gallery, et plus récemment par la Tate, le British Museum, la National Gallery de Londres et le Solomon R. Guggenheim Museum.

Le V&A a déclaré dans un communiqué de presse qu'il avait « convenu mutuellement » avec la famille Sackler que le nom serait retiré. «  Nous ne prévoyons pas actuellement de renommer les espaces », ajoute le communiqué.

Cette suppression intervient après de nombreuses manifestations menées à travers les États-Unis et l'Europe par la photographe américaine Nan Goldin, ancienne toxicomane aux opiacés et cofondatrice du groupe de protestation P.A.I.N (*) en 2017. En 2019, Goldin avait organisé une manifestation dans la cour du V&A afin de dénoncer les liens que de trop nombreux musées avaient avec la famille Sackler.

Le V&A avait longtemps résisté à ces pressions. Theresa Sackler, veuve de Mortimer Sackler, le copropriétaire de Purdue Pharma décédé en 2010, était membre du conseil d'administration du musée jusqu'à l'expiration de son mandat en octobre 2019 et directrice de la fondation du musée jusqu’en 2021. En 2019, le directeur du musée Tristram Hunt défendait encore les liens entre le V&A et les Sackler, déclarant au Guardian : « Nous n'allons pas détruire des noms ou nier le passé ».

Ce revirement du V&A peut donc être considéré comme une nouvelle victoire pour Goldin. La bataille qu’elle mène actuellement contre la famille de mécènes est par ailleurs le sujet du dernier Lion d'or de la Mostra du film de Venise, All the Beauty and the Bloodshed, de la documentariste américaine Laura Poitras.

L’entreprise Purdue Pharma a quant à elle signé un accord avec le Département de la Justice américaine, l’obligeant à verser la somme de 4 milliards de dollars aux victimes américaines.

NOTE

(*) P.A.I.N : Prescription Addiction Intervention Now (« Intervenir maintenant contre la dépendance aux médicaments »). Le terme « Pain » signifie en anglais « douleur » ou « souffrance ».

Tous les articles dans Actualités

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque