Le Smithsonian dans la ligne de mire de Donald Trump

Une publication de Donald Trump sur le réseau social Truth Social, le 19 août 2025, remet la pression sur le Smithsonian. Dans ce message, l’ancien président décrit l’institution comme « hors de contrôle » et l’associe à « l’un des derniers bastions de la culture woke » aux États-Unis.

Dans une lettre adressée le 12 août au secrétaire général du Smithsonian Lonnie Bunch, la Maison Blanche affirme son intention de mener un audit « afin de garantir la conformité avec la directive du président visant à célébrer l’exception américaine, à éliminer les discours clivants ou partisans et à restaurer la confiance dans nos institutions culturelles communes ».

La pression sur le Smithsonian a débuté en mars 2025, lorsque Trump a multiplié les attaques contre les institutions culturelles. Afin d’aligner le Smithsonian sur son agenda politique et sa vision restrictive de l’histoire américaine, il a fait adopter par décret la nomination du vice-président JD Vance au conseil d’administration de l’institution. Le gouvernement a ensuite ouvert une enquête visant huit des vingt et un musées du réseau Smithsonian, parmi lesquels le Musée national d’histoire et de culture afro-américaines, le Musée national d’histoire américaine et le Smithsonian American Art Museum.

Les institutions concernées ont été sommées de transmettre un vaste ensemble de documents : supports de médiation (cartels, livrets, affiches), programmation passée et future, inventaire des œuvres et entretiens avec les conservateurs sur leurs choix muséographiques. L’objectif affiché par l’administration est d’évaluer le cadrage historique, le ton adopté et leur conformité avec les « idéaux américains ».

Fondé en 1846 grâce au legs du scientifique britannique James Smithson, le Smithsonian est placé sous la tutelle de l’État fédéral tout en disposant d’une autonomie statutaire. Dirigé par un conseil d’administration de 17 membres, composé de représentants du gouvernement et de citoyens, il est passé d’un centre de recherche à un vaste réseau muséal et scientifique. Il regroupe aujourd’hui 21 musées, 21 bibliothèques et 14 centres de recherche, ce qui en fait l’une des principales institutions culturelles au monde.

Cette indépendance vis-à-vis de l’État empêche en principe toute ingérence gouvernementale dans les expositions ou le contenu scientifique de ses activités. Les mesures engagées par l’administration Trump constituent ainsi une intrusion directe dans la gouvernance du Smithsonian.

L’attitude de Trump contraste avec son discours tenu en 2017, lors de sa visite au Musée national d’histoire et de culture afro-américaines, où Donald Trump avait déclaré être impressionné et avait rendu hommage aux héros noirs américains.

Si l’institution reste prudente et s’abstient de toute prise de position publique, plusieurs associations professionnelles ont réagi. L’Alliance américaine des musées (AAM) a dénoncé des « menaces croissantes de censure » visant les musées. Selon elle, ces pressions compromettent la mission scientifique du Smithsonian, portent atteinte à la liberté d’expression et risquent de décourager d’autres institutions. Le gouvernement, qui assure agir « pour le bien des musées », a été accusé de contradiction par les associations, qui rappellent les licenciements massifs et les coupes budgétaires récentes.

Ces tensions s’inscrivent dans une offensive culturelle plus large menée par Donald Trump. Depuis son retour au pouvoir, son administration a supprimé plusieurs agences fédérales, dont l’Institute of Museum and Library Services (IMLS). Plus récemment, elle a gelé plusieurs milliards de dollars de subventions destinées aux universités. Ces décisions ont déjà entraîné la fermeture de musées et de bibliothèques, ainsi que la suspension de nombreux programmes de recherche.