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Rome se dote du premier musée de l’audiovisuel et du cinéma italien

Par Olivier Tosseri, correspondant en Italie · Le Journal des Arts

Le 8 février 2020 - 969 mots

ROME / ITALIE

Le ministre de la Culture italien souhaitait valoriser l’immense fonds d’archives de la Rai et de l’Institut Luce. 2,5 millions d’euros et cinq ans ont été nécessaires pour créer le Miac, à Cinecittà.

Vue extérieure du MIAC. © Photo Erma Pictures.
Vue extérieure du MIAC.
© Photo Erma Pictures.

Miac, c’est l’acronyme qui désigne le nouveau Musée italien de l’audiovisuel et du cinéma qui a été inauguré à Rome, en décembre. Une première pour la capitale italienne qui est également l’une des capitales du 7e art. Le projet avait été promu en 2015 par le ministre de la Culture, Dario Franceschini, qui voulait doter Rome d’un musée multimédia concernant l’une des principales composantes de l’identité culturelle du pays. C’est, en effet, à travers le cinéma, mais surtout la radio et la télévision que l’unification linguistique de la péninsule s’est réalisée au XXe siècle, avec la diffusion de l’italien supplantant, petit à petit, les dialectes régionaux.

2,5 millions d’euros ont été investis pour restaurer le laboratoire de développement des pellicules à Cinecittà. Ce bâtiment fait partie du complexe de 600 000 m2 de studios cinématographiques inauguré par Benito Mussolini en 1937 et dans lesquels ont été tournés aussi bien des péplums tels que Ben-Hur, des westerns spaghetti de Sergio Leone, les grands films de Federico Fellini ou, plus récemment, des séries télévisées américaines.

Les partenaires du Miac figurent parmi les institutions les plus importantes du monde audiovisuel italien, à commencer par la cinémathèque de Bologne, le Musée du cinéma de Turin, la Rai-Teche (société qui gère tout le matériel archivé qui a été produit et diffusé par le service public national au cours de son histoire) ou encore l’Institut Luce (équivalent de l’Ina). C’est d’ailleurs en visitant l’exposition célébrant les quatre-vingt-dix ans de l’Intitut Luce, en 2014, que Dario Franceschini a souhaité l’ouverture d’un musée pour valoriser cet immense patrimoine audiovisuel. Il est désormais exposé dans les 1 650 m2 du Miac et a été confié à quatre commissaires d’exposition : Gianni Canova (historien du cinéma), Gabriele D’Autilia, (historien de la photographie), Enrico Menduni, (historien des mass media) et le réalisateur Roland Sejko.

« Nous avons comblé un vide, explique ce dernier. Au lieu de faire voir des décors de cinéma ou des costumes d’actrices, nous avons décidé d’offrir au public un récit audiovisuel de plus d’un siècle d’histoire de l’Italie. Plus qu’une narration, c’est une immersion interactive dans plus de cinq cents extraits de films, d’émissions télévisées, d’entretiens de cinéastes ou d’acteurs. C’est un voyage dans notre imaginaire collectif, car toutes les archives sont italiennes. Elles sont présentées dans douze espaces thématiques, allant de la musique à la politique, de la nourriture à l’Éros en passant par la langue, les paysages ou encore les grands maestri. Les cinéastes ont eu, à l’étranger, au XXe siècle, la notoriété dont jouissaient avant les musiciens. Fellini était le nouveau Puccini ou Rossini. »

La seule concession à la chronologie est une frise de trente mètres de long déroulée au cœur du musée, qui retrace les grandes étapes de l’évolution du paysage audiovisuel et cinématographique de la péninsule ces cent vingt dernières années.

Des installations originales

La scénographie des salles, confiée au groupe artistique italien None Collective, s’apparente à des installations d’art contemporain. Dans la salle consacrée aux acteurs, le visiteur pénètre dans une loge avec trois grands cadres d’un miroir composés d’une centaine d’ampoules, sur lesquels sont projetées des images de divas ou des remises de prix dans les festivals. Dans la salle dévolue au pouvoir, des extraits de films défilent sur deux monolithes en ciment de 2,5 mètres de haut. Au centre de celle qui s’attarde sur « Paysage. Éros. Comédie. Nourriture », un paysage lunaire réagit aux images faisant écho à ces quatre thèmes, se succédant simultanément sur quatre écrans géants. Des colonnes multimédias, disposées dans chaque salle, offrent des entretiens de cinéastes, des témoignages d’acteurs, des récits de journalistes, ou encore des musiques de films ou des génériques d’émissions marquantes de la télévision italienne. Le Miac organisera prochainement des expositions temporaires et accueillera une médiathèque mettant à la disposition des visiteurs et des étudiants l’immense fonds d’archives déjà numérisées de l’Institut Luce.

Ce musée, unique en Italie, s’inscrit dans le sillage du M9, le musée multimédia du XXe siècle, un projet très technologique inauguré il y a un peu plus d’un an par la Fondazione di Venezia pour le centre-ville de Mestre. Malgré un budget cent fois supérieur à celui du Miac, il n’a convaincu que 60 000 visiteurs au lieu des 200 000 escomptés. Son cousin romain peut déjà compter sur les 90 000 touristes qui franchissent chaque année les portes de Cinecittà.

L’année Fellini  

Cinéma. L’Italie rend hommage à l’un de ses plus grands cinéastes, Federico Fellini (1920-1993), dont on célèbre cette année le centenaire de la naissance. Plus de soixante-dix événements sont organisés sur l’ensemble de la péninsule, mais aussi à l’étranger, notamment à Londres, Vilnius, Rio de Janeiro et Los Angeles (liste disponible sur fellini100.beniculturali.it). Les commémorations se dérouleront surtout dans les deux villes qui sont à jamais liées au maestro : Rimini, où il a vu le jour le 20 janvier 1920, et Rome, où il a tourné ses plus grands chefs-d’œuvre et où il s’est éteint, il y a vingt-sept ans. De nombreuses expositions de photographies du réalisateur dans son intimité, sur les tournages de ses films, ou bien celles de ses nombreux dessins seront organisées, tout comme des cycles de conférences de professionnels du cinéma pour évoquer sa mémoire et son travail. À Cinecittà, dans la Palazzina qui porte déjà son nom, une exposition lui sera, cette année, entièrement consacrée, avec des documents filmés inédits, des costumes originaux, des dessins et des photographies.Mais l’événement le plus marquant sera la rétrospective de tous ses films restaurés présentés en Italie, mais aussi à l’étranger, comme Le Cheik blanc, Les Vitelloni, La Dolce Vita, Huit et demi, Amarcord.

Olivier Tosseri, correspondant à Rome

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Miac,
Cinecittà Studios, Via Tuscolana, 1055, 00173 Rome.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°538 du 31 janvier 2020, avec le titre suivant : Rome se dote du premier musée de l’audiovisuel et du cinéma italien

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