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L’Institut de France en appelle à l’Élysée pour sauver Chantilly

Par Sindbad Hammache · Le Journal des Arts

Le 23 février 2021 - 566 mots

CHANTILLY

En raison de son statut particulier, le patrimoine géré par l’Institut de France (*) n’a reçu aucune aide publique depuis le début de la crise sanitaire. Parmi ces biens, le domaine de Chantilly se trouve dans une situation budgétaire difficile.

Le château de Chantilly. © Sophie Lloyd
Le château de Chantilly.
© Sophie Lloyd

Chantilly (Oise). Un plan de relance à 2 milliards d’euros pour la Culture, et pas un centime pour l’un des plus prestigieux châteaux français, abritant l’une des plus importantes collections de peintures du pays ? Aussi incroyable que la situation puisse paraître, elle s’explique par le statut du domaine de Chantilly : celui-ci est géré par une fondation dépendant de l’Institut de France, auquel le duc d’Aumale légua l’ensemble du domaine à la fin du XIXe siècle. Le château n’a ainsi eu accès ni aux aides de l’État, qui concernent spécifiquement les biens relevant du ministère de la Culture, ni aux aides destinées au secteur privé telles que le chômage partiel et le prêt garanti par l’État. « C’est un peu comme si j’avais une maison à la campagne », soupire Xavier Darcos, chancelier de l’Institut de France, qui s’en remet désormais au chef de l’État pour trouver une solution.

Le domaine n’a pourtant rien d’une maison de famille : hippodrome, écuries, forêts, jardins et le château lui-même constituent un patrimoine immense, coûteux à l’entretien. Ce qui le distingue d’ailleurs des autres biens gérés par l’Institut de France (château de Langeais, villa Kérylos, villa Ephrussi de Rothschild…) : des biens également non destinataires d’aides, mais aux coûts d’entretien nettement plus modestes. « Une fois sortis de cette crise, on peut considérer que tout cela reviendra à l’équilibre, veut croire le chancelier, mais pour Chantilly, c’est impossible, il faut une aide massive. »

Cette aide extérieure, ce fut longtemps l’Aga Khan, voisin et amoureux des lieux, qui l’assuma. Un coup de pouce considérable, qui contribuait aux dépenses de fonctionnement et d’entretien du château, mais permettait aussi de nombreux chantiers de restauration. Après quinze ans et 70 millions d’euros de mécénat, le chef spirituel des ismaéliens décide de se retirer de Chantilly en 2019, bien avant le début de la crise sanitaire, et non sans laisser 6 millions supplémentaires pour assurer la transition vers la reprise globale de la gestion du domaine par l’Institut de France. « On espérait pouvoir utiliser cet argent en investissement, mais il passe en fonctionnement », déplore Christophe Tardieu, vice-président exécutif du domaine depuis décembre 2019.

Nommé pour piloter la transition, ce dernier se retrouve aujourd’hui face à un problème insoluble, avec un domaine immense privé de l’intégralité de ses sources de revenus (billetterie du musée, spectacles équestres, locations événementielles). Un appel au don lancé par le château fin 2020 parvient à réunir 50 000 euros, soit une goutte d’eau dans le budget cantilien. « Cela a valeur de témoignage, explique Christophe Tardieu ; pour nos équipes c’est très important, chaque don est accompagné d’un petit mot réconfortant. »

Après s’être tourné sans succès vers ses anciens camarades du gouvernement Fillon, Roselyne Bachelot et Bruno Le Maire, Xavier Darcos compte désormais sur le chef de l’État, seule tutelle de l’Institut de France, pour sauver Chantilly. « Mon avis est que nous serons entendus, assure l’ancien ministre, personne ne peut imaginer que la France se moque de Chantilly. Ma confiance est totale sur la lucidité du président à ce sujet. »

ERRATUM - 18 février 2021

(*) Contrairement à ce que nous avons écrit dans le JdA n°561, il s'agit bien de l'Institut de France et non de l'Institut Français

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°561 du 19 février 2021, avec le titre suivant : L’Institut de France en appelle à l’Élysée pour sauver Chantilly

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