Art moderne - Sculpture

XIXE-XXE SIÈCLES/ VISITE GUIDÉE

Camille Claudel et ses consœurs

Par Élisabeth Santacreu · Le Journal des Arts

Le 11 décembre 2025 - 423 mots

Le musée éponyme sort de l’ombre quelques-unes des artistes femmes parisiennes de l’époque.

Vue de l'exposition « Au temps de Camille Claudel » au Musée Camille Claudel de Nogent-sur-Seine. © Studio OG
Vue de l'exposition « Au temps de Camille Claudel » au Musée Camille Claudel de Nogent-sur-Seine.
© Studio OG

Nogent-sur-Seine (Aube). L’historienne de l’art Anne Rivière, spécialiste de Camille Claudel, s’est intéressée aux sculptrices du XIXe siècle et a publié le Dictionnaire des sculptrices en France (Mare & Martin, 2017). Un sujet qui ne pouvait qu’interpeller Céline Bertran, directrice du Musée Camille Claudel, mais aussi Hélène Jagot, directrice des musées et du château de Tours, ainsi que Sophie Kervran, directrice du Musée de Pont-Aven, qui comptent des œuvres de sculptrices de la génération de Claudel dans leurs collections. Ensemble, elles ont organisé une exposition d’environ 90 œuvres qui, après le Musée Camille Claudel, poursuivra sa route à Tours puis à Pont-Aven. Abordant leur sujet sous différents angles, les commissaires scientifiques, Anne Rivière et Pauline Fleury, racontent aux visiteurs ce qu’était l’existence de 23 femmes artistes françaises et étrangères passées par Paris, en montrant leur travail mais aussi en abordant leur vie personnelle. La riche médiation et le volumineux catalogue donnent une place à chaque individualité autant qu’au milieu artistique de l’époque.

Si elles posent clairement que tout était à l’époque plus difficile pour les femmes artistes que pour leurs confrères masculins, les commissaires font un sort au misérabilisme qui a longtemps accompagné les études de genre. Pour une raison simple : la plupart de ces femmes étaient issues soit de familles d’artistes, soit, comme Camille Claudel, d’une bourgeoisie ouverte d’esprit même si les parents pouvaient émettre des craintes pour l’avenir de leur enfant. La réception de leurs œuvres était souvent amicale de la part des critiques, qui pouvaient les voir au Salon, et des artistes masculins. Les assertions misogynes de l’époque qui peuvent parfois être mises en exergue ne doivent pas masquer l’intégration de la plupart de ces créatrices dans le milieu artistique et la vie sociale du temps.

Est battue aussi en brèche la notion de génie féminin forcément incompris que le public retient notamment du destin de Camille Claudel. Les sculptrices ne s’inscrivaient pas nécessairement dans l’avant-garde : leurs œuvres appartiennent à toute la palette des tendances de leur époque, de l’académisme au symbolisme. Et, dernière idée reçue, l’exposition souligne que la sororité souvent mise en avant n’était pas plus systématique que la fraternité des artistes masculins entre eux. Ainsi, Camille Claudel, personnalité dominante d’un atelier réunissant plusieurs sculptrices rue Notre-Dame-des-Champs, a été parfois injuste envers ses consœurs. Au long du parcours se révèlent des femmes de talent un temps invisibilisées, comme elle l’a aussi été, par la France du XXe siècle et qui méritent d’être redécouvertes.

Être sculptrice à Paris au temps de Camille Claudel,
jusqu’au 4 janvier 2026, Musée Camille Claudel, 10, rue Gustave-Flaubert, 10400 Nogent-sur-Seine.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°666 du 28 novembre 2025, avec le titre suivant : Camille Claudel et ses consœurs

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