Art contemporain - Disparition

Pierre Soulages, star mondiale de la peinture française, est mort à 102 ans

Par LeJournaldesArts.fr (avec AFP) · lejournaldesarts.fr

Le 27 octobre 2022 - 680 mots

PARIS

Pierre Soulages, star mondiale de la peinture connue pour ses tableaux aux nuances infinies de noir, est décédé dans la nuit de mardi à mercredi à l'âge de 102 ans.

Pierre Soulages. © Christian Bousquet / Musée Soulages
Pierre Soulages.
© Christian Bousquet / Musée Soulages

« C'est une triste nouvelle, je viens de raccrocher avec sa veuve, Colette Soulages », a déclaré à l'AFP Alfred Pacquement, ami de longue date du peintre et président du musée qui porte son nom à Rodez (Aveyron).

Le décès est intervenu à l'hôpital de Nîmes, à 23h30 d'une insuffisance cardiaque, a indiqué à l'AFP Mohamed Kaoud, majordome des Soulages à Sète depuis 27 ans. Sa veuve « tient le coup, mais n'a peut-être pas encore tout à fait réalisé », a-t-il ajouté. Le couple venait « de fêter son 80e anniversaire de mariage », a précisé M. Pacquement, l'un des historiens de l'art et conservateurs qui a probablement le plus travaillé sur l'œuvre de Soulages, en organisant notamment l'hommage qui lui a été rendu au Louvre en 2019, à l'aube de ses 100 ans. Jusqu'alors, seuls Picasso et Chagall avaient eu ce privilège.

« Pierre Soulages avait su réinventer le noir, en y faisant jaillir la lumière. Par-delà le noir, ses œuvres sont des métaphores vives où chacun de nous puise l'espoir », a réagi le président Emmanuel Macron sur Twitter.

C'est « une grande perte pour le monde de l'art et pour la France », a estimé la ministre de la culture, Rima Abdul Malak, en pleine séance de questions au Sénat, tandis que son prédécesseur Jack Lang a estimé, dans un communiqué, qu'un « monument de l'art s'en est allé ».

Record en 2021

Les hommages ont aussi afflué de son pays natal. « C'est une immense tristesse car je perds un ami (...) jusqu'au bout il a peint, jusqu'à il y a quelques semaines, il a travaillé chez lui à Sète », a déclaré à l'AFP Benoît Decron, directeur du musée Soulages de Rodez.

La présidente de la région Occitanie, Carole Delga, qui l'avait encore rencontré début octobre, a salué un « immense artiste », « visionnaire » et « complice inspirant », avec qui elle « partageait l'amour de l'art, du Japon, de l'Aveyron et de Sète ». Grand, toujours vêtu de noir, Soulages a acquis une renommée mondiale grâce à ses grandes toiles aux mille nuances de noir. Il disait chercher à « en faire jaillir la lumière ».

Pendant plus de 75 ans, il a tracé inlassablement son sillon, s'attirant la reconnaissance des institutions culturelles et du marché de l'art qui en a fait un des artistes français les plus cotés, de son vivant. Une de ses toiles datant de 1961 a été vendue à 20,2 millions de dollars à New York en novembre 2021. Il était aussi représenté au salon international d'art contemporain Paris+ Art Basel, la semaine dernière, aux côtés d'un Picasso ou d'un Kandinsky, ainsi que de la jeune scène émergente.

« Outrenoir »

Soulages est né le 24 décembre 1919 à Rodez, dans un milieu artisan qui a nourri son imaginaire au milieu de l'atelier de carrosserie de son père et des collines environnantes. Il n'a jamais coupé le lien avec son territoire natal, tout en peignant ailleurs. Fasciné par la préhistoire dès son plus jeune âge, il a beaucoup travaillé au brou de noix avant de poursuivre avec ses grands aplats noirs de peinture à l'huile, qu'il raclait, grattait et modelait presque dans l'épaisseur de la peinture, faisant surgir des nuances de rouge, de bleu et des transparences inattendues.

Il avait basculé dans ce qu'il appelait « l'outrenoir » en 1979, alors qu'il peinait sur une œuvre entièrement recouverte d'un noir épais, striée par hasard. « J'étais au-delà du noir, dans un autre champ mental », a-t-il raconté. « Le pot avec lequel je peins est noir. Mais c'est la lumière, diffusée par reflets, qui importe ».

En 1959, le peintre s'était fait construire une maison-atelier sur les hauteurs de Sète, face à la Méditerranée, où il vivait toujours ces dernières années. Il avait également deux ateliers à Paris.

En 1986, l'Etat lui avait passé commande de plus de 100 vitraux pour l'abbatiale Sainte-Foy de Conques, qui avaient inaugurés en 1994.

Par Sandra Biffot-Lacut, avec Florence Panoussian à Toulouse

Cet article a été publié par l'AFP le 26 octobre 2022.

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