Justice - Vandalisme

Ils avaient dégradé des œuvres qu'ils jugeaient blasphématoires : prison avec sursis et amende requises

Par LeJournaldesArts.fr (avec AFP) · lejournaldesarts.fr

Le 28 mars 2017 - 446 mots

AVIGNON (PACA) [27.03.17] - Une peine de quatre mois de prison avec sursis et une autre de 4 800 euros d'amende ont été requises lundi à l'encontre de deux hommes accusés d'avoir dégradé, en avril 2011 à Avignon, deux œuvres de l'artiste américain Andres Serrano qu'ils jugeaient blasphématoires.

« Pour cette action commando, on a prononcé le mot de blasphème. Quand on parle de blasphème, on rentre dans le monde de l'intolérance, de l'intégrisme », a dénoncé devant le tribunal correctionnel le procureur de la République d'Avignon, Philippe Guémas. Il a réclamé quatre mois de prison avec sursis contre Benjamin Michelet et 120 jours-amende à raison de 40 euros par jour à l'encontre de Colin Colinge, déjà condamné pour violences, contestation de l'existence de crime contre l'humanité et incitation et provocation à la haine raciale.

M.Colinge, après avoir nié les faits durant l'enquête, a avoué à la barre avoir donné les coups de marteau qui ont dégradé deux oeuvres de l'artiste américain Andres Serrano, le cliché « Immersion Piss Christ » et une photo sous-titrée « Soeur Jeanne Myriam », exposées à la collection d'art contemporain Yvon Lambert, à Avignon, le 17 avril 2011.

Les deux hommes âgés de 29 ans se sont présentés comme d'anciens sympathisants du Renouveau français venus à Avignon pour participer la veille à une manifestation qui avait réuni quelque 800 personnes à l'appel de mouvements catholiques pour protester contre l'exposition. Ils ont expliqué que leur idée de départ était de recouvrir avec une bombe de peinture la vitre en plexiglas protégeant la photo « Immersion Piss Christ » et de prendre un cliché de la détérioration. « Ca a dérapé par rapport au plan initial, ça a été trop loin, on n'a pas maîtrisé ce qu'il s'est passé », a estimé Benjamin Michelet, qui assure être resté à l'écart pendant les faits.

« Qui a provoqué le trouble initial à l'ordre public? Le vrai trouble à l'ordre public c'est le Piss Christ lui-même », a estimé Me Jérôme Triomphe, le conseil de M. Michelet, décrivant les prévenus comme « des chrétiens indignés » et plaidant la relaxe pour son client. « Ce n'est pas une oeuvre, ce n'est pas un tableau, c'est un concept et un concept provocant », a renchéri Me Jacques Tremollet de Villers, l'avocat de M. Colinge qui a également plaidé la relaxe.

« Ces deux oeuvres sont irrémédiablement dégradées », a de son côté déploré Me Agnès Tricoire, le conseil des trois parties civiles, Yvon Lambert, la collection Lambert et Andres Serrano. L'avocate, qui a souligné qu'il fallait « une force extraordinaire pour arriver à une telle dégradation », a réclamé 20 000 euros au titre du préjudice matériel pour la collection Lambert ainsi que pour l'artiste.

Le tribunal rendra sa décision le 15 mai.

Légendes photos

Andres Serrano The Church (Soeur Jeanne Myriam, Paris) (1991) - Cibachrome - © photo Christie's

Andres Serrano Piss Christ (1987) - photographie - © photo Collection Lambert

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