Musée - Vol

L’Italie n’épargne pas la France après le cambriolage du Louvre

Par Olivier Tosseri, correspondant en Italie · lejournaldesarts.fr

Le 20 octobre 2025 - 499 mots

La péninsule ironise sur le cambriolage du Louvre, révélateur des fragilités d’un État français en crise.

Antonio Natali, ancien directeur de la Galerie des Offices à Florence. © Marta De Bortoli1991, 2015, CC BY-SA 4.0
Antonio Natali, ancien directeur de la Galerie des Offices à Florence.

L’Italie a ces derniers temps l’embarras du choix pour se moquer de son arrogante voisine. Après avoir raillé les difficultés budgétaires de la France et son instabilité gouvernementale les médias se délectent du cambriolage du Louvre. « Aucun répit pour la France de Macron et Lecornu » résume la plupart des journaux italiens, qui insistent sur les graves failles dans la sécurité des hauts lieux du patrimoine français. Si les auteurs du cambriolage des bijoux de la galerie d’Apollon sont évidemment comparés à des « Arsène Lupin en gilets jaunes », ceux qui sont chargés de protéger les trésors nationaux sont décrits comme des Pieds nickelés.

« Des voleurs déguisés en ouvriers qui utilisent un monte-charge et fuient en scooters en abandonnant dans la rue la couronne de l’impératrice Eugénie… J’ai l’impression d’un mauvais canular et j’attends un démenti ou de me réveiller d’un mauvais rêve », a commenté Antonio Natali, qui a dirigé la Galerie des Offices de Florence de 2006 à 2015. « Le nationalisme français a trouvé dans le Louvre, où l’art est sacralisé, sa plus grande expression. Quand je dirigeais les Offices, je vivais dans la terreur d’un vol. Il suffit d’un rien, d’un instant de distraction, malgré les vitrines blindées ou même si l’on reste attentif au moindre interstice du musée. […] À Notre-Dame, il y a eu de l’inconscience ; comment appeler ce qui est arrivé au Louvre ? C’est une belle parodie de la grandeur avec des disqueuses, mais je ne veux pas être cruel. »

La presse transalpine dresse une liste impitoyable mais pas toujours très juste des carences : absence de caméras de vidéosurveillance, sous-effectifs du plus grand musée du Monde, où des criminels peuvent opérer avec tant de facilité. Elle se plaît également à rappeler les récents vols dans les musées français : celui de cinq pépites d’or pur dérobées au Muséum national d’histoire naturelle de Paris ou encore celui des deux plats et du vase chinois, d’une valeur d’au moins six millions et demi d’euros, disparus du Musée national Adrien-Dubouché de Limoges.

Mais le cambriolage du 19 octobre au Louvre ressuscite le souvenir du précédent de 1911, lorsque qu’un ouvrier italien avait dérobé La Joconde pour la ramener dans la péninsule, où elle aurait été selon lui mieux conservée. L’occasion, pour les commentateurs, de souligner que malgré la renommée du Louvre, sa sécurité a toujours montré des failles. « Le caractère complètement rocambolesque de ce cambriolage le rend inconcevable », commente le directeur d’un grand musée italien, qui souhaite garder l’anonymat. « Rien de tel ne pouvait être imaginé, même si les failles dans la sécurité sont évidentes. Mais, bien qu’aucune grande institution culturelle ne soit absolument à l’abri d’un cambriolage, je pense qu’en France cet événement est le symptôme de la fracture sociale et de la crise de l’État. Dans ces moments-là, des tabous tombent, et les symboles identitaires et patrimoniaux deviennent des cibles faciles. Ce cambriolage est hautement symbolique et humiliant. »

Thématiques

Tous les articles dans Patrimoine

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque