Musée

ENTRETIEN

Hervé Di Rosa raconte le Miam 

Artiste et cofondateur du Miam (Musée international des arts modestes) à Sète

Par Henri-François Debailleux · Le Journal des Arts

Le 5 août 2021 - 694 mots

SÈTE

Deux expositions reviennent sur les 20 ans de ce musée tourné vers les images ou objets modestes. L’occasion d’en expliciter le projet.

Hervé Di Rosa. © Pierre Schwartz
Hervé Di Rosa
© Pierre Schwartz

Le Miam (Musée international des arts modestes) a été créé à Sète (Hérault), le 10 novembre 2000, par Hervé Di Rosa et Bernard Belluc. Hervé Di Rosa raconte.

Comment est né le Miam ?

Grâce à un concours de circonstances. En 1990, j’avais déjà réalisé la première caravane des arts modestes qui était une préfiguration du futur musée avec mes collections de figurines présentées à l’intérieur et certaines de mes céramiques de Vallauris accrochées à l’extérieur de cette caravane. Lorsque j’ai rencontré Bernard Belluc cette même année, je me suis aperçu qu’avec ses propres collections on pouvait monter quelque chose d’intéressant et j’ai tout de suite eu l’idée de le faire avec lui. Puis en 1998, certaines institutions (la Ville de Sète, le ministère de la Culture) nous ont confié ce projet qui a vu le jour deux ans plus tard.

Quel est le concept du Miam ?

Il a toujours été le même et repose sur trois piliers. Le premier concerne la mise en avant et la réévaluation de tous ces artistes anonymes qui ne sont pas des artistes modestes mais qui produisent des objets ou des images modestes, qui vont de l’artisanat à l’objet fabriqué en plastique à des millions d’exemplaires. Lorsqu’on voit une collection de figurines de Batman ou Superman, on sait qu’elles sont faites par des machines, mais on oublie qu’avant cela, il y a un modéliste qui a une formation académique extraordinaire pour pouvoir dessiner chaque muscle avec un cahier des charges extrêmement contraignant. Le second pilier est né d’un constat : je m’étais aperçu qu’à chacun de mes vernissages, que ce soit à Londres, Paris ou New York, il y avait toujours le même public. Or j’ai pensé qu’il n’y avait pas de raison que le public populaire, duquel je suis issu, n’ait pas accès à l’art contemporain exigeant et plus difficile. Il fallait donc pouvoir le mêler à d’autres productions plus faciles et le présenter dans une scénographie propre à un public de néophytes.

Et le troisième pilier ?

C’est le seul musée fait par un artiste pour les artistes. Ce n’est ni une fondation, ni le musée de tel artiste qui y déploie le génie qu’il a eu toute sa vie. Et ce musée, je le fais comme je fais une peinture, je prévois avec la directrice, Françoise Adamsbaum, les expositions, les événements, les lignes éditoriales, comme s’il s’agissait d’un tableau. On me dit d’ailleurs souvent qu’il n’y pas d’œuvres de moi à l’intérieur. Je réponds que mon œuvre n’est pas uniquement picturale. Je fais aussi de la sculpture, des gravures et bien d’autres choses, dont ce musée.

Quelle définition donnez-vous des arts modestes ?

Les arts modestes, ce n’est pas un genre comme l’art brut, ce n’est pas un mouvement comme l’Arte povera. C’est une manière, c’est juste un regard différent porté sur les objets et les images qui nous entourent.

Quel bilan tirez-vous de ces vingt ans ?

Déjà, ils m’ont servi à ne pas devenir un vieux con. Les artistes ont tendance à être nombrilistes et le Miam m’oblige à travailler avec les autres, à m’intéresser à tout ce qui se crée autour de moi. Ensuite, je suis content d’être là où on en est aujourd’hui. Je n’aurais jamais cru que cela durerait si longtemps, j’aurais même rigolé au nez du type qui me l’aurait dit. Car chaque année, c’est périlleux. Chaque exposition – et nous en avons fait 46 –, et son catalogue, ressemble à une expérience de laboratoire destinée à élucider un peu le mystère de l’origine et de la nature de ces objets.

Qu’en est-il du futur ?

Nous avons le projet d’agrandir le Miam, en changeant de lieu, pour mieux présenter la collection de plusieurs centaines de pièces, tout en maintenant le rythme de deux expositions temporaires par an. Nous allons aussi nous déployer à l’extérieur comme à la Villa Beatrix à Anglet [Pyrénées-Atlantique]. Nous nous rapprochons également du monde universitaire pour faire connaître notre domaine. Car s’il est évident d’apprendre la vraie histoire de l’art, il y a plein d’histoires de l’art parallèles à découvrir.

Forever Miam, 20 ans d’expositions ; Psychédélices. Expériences visionnaires en France,
jusqu’au 9 janvier 2022, Miam, 23, quai Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 34200 Sète.

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°571 du 9 juillet 2021, avec le titre suivant : Hervé Di Rosa, artiste et cofondateur du Miam (Musée international des arts modestes) à Sète : « Le Miam est le seul musée fait par un artiste pour les artistes »

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