Un musée à inventer

Jean-Jacques Aillagon, président de l’Établissement public du musée et du domaine national de Versailles

La connaissance de l’Histoire crée du lien entre les individus

Par Daphné Bétard · Le Journal des Arts

Le 5 janvier 2010 - 496 mots

Où en est le projet de rénovation du Musée de l’histoire de France à Versailles ?
Le château de Versailles est un musée double, celui de la résidence glorieuse des rois de France, de 1681 à 1789, mais aussi celui de l’histoire de France, depuis que le roi Louis-Philippe, renonçant définitivement à l’usage palatial du château, décida de le consacrer à « toutes les gloires de la France » et d’y déployer un vaste programme iconographique évoquant les grandes heures et les grands hommes de l’histoire de la Nation. Depuis la fin du XIXe siècle, on a négligé cette dimension patrimoniale et culturelle du château de Versailles pour ne mettre l’accent que sur la splendeur, patiemment reconstituée et restaurée, de la résidence royale. Il m’a semblé que le temps était venu de remettre en valeur la seconde face du château, de rendre ses collections historiques mieux accessibles, et surtout, de tenter de les présenter au public du XXIe siècle de manière intelligible.

Le futur parcours, tributaire, pour ce qui est de son calendrier, du lourd chantier de restauration des ailes du Nord et du Midi du château, déploiera les collections selon un schéma très simple : dans l’aile du Nord, l’histoire du château et le règne de Louis XIV, dans l’aile du Midi, la Révolution et le XIXe siècle jusqu’à la IIIe République, ce qui a un sens très fort, puisque cette aile abrite la salle du Congrès du Parlement.

Vous qui êtes historien de formation et à la tête d’un musée d’histoire nationale, comment percevez-vous le projet de création d’un vaste musée de l’histoire de France et comment celui-ci pourrait-il s’inscrire dans le réseau des musées d’histoire ?
Intensifier la relation des Français avec leur histoire est utile. La connaissance de l’Histoire crée du lien entre les individus. Elle crée aussi les conditions nécessaires à l’exercice critique de la citoyenneté. Cela passe tout d’abord par la qualité de l’enseignement secondaire, mais aussi par la faculté de nos bibliothèques et de nos archives d’offrir à la recherche des instruments et des cadres adaptés.

L’histoire de notre pays est déjà présente dans les collections de nombreux musées à travers les œuvres qu’ils présentent : Le Vœu de Louis XIII de Philippe de Champaigne à Caen, La Bataille de Nancy de Delacroix à Nancy, La Liberté guidant le peuple du même Delacroix au Louvre, le Trône de Dagobert à la Bibliothèque nationale de France… Faire un musée spécifique, pourquoi pas ? Encore faudra-t-il en définir la singularité patrimoniale (quelles collections ?), culturelle (quels documents ?) et intellectuelle (histoire de l’État en France comme on l’aurait fait au XIXe siècle ou histoire des Français ?), ceci avec pertinence et précision. Je pense donc que la priorité, c’est bien de définir ce programme et son articulation avec les autres institutions muséales, documentaires ou universitaires qui, déjà, s’appliquent à la connaissance et à la diffusion de l’Histoire. La question du site d’implantation ne peut être que la conséquence de cet exercice préalable.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°316 du 8 janvier 2010, avec le titre suivant : Jean-Jacques Aillagon, président de l’Établissement public du musée et du domaine national de Versailles

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