Art moderne

XIXE SIÈCLE / VISITE GUIDÉE

Comment les artistes femmes se formaient au XIXe siècle

Par Élisabeth Santacreu · Le Journal des Arts

Le 13 mars 2025 - 514 mots

Le Musée Henner raconte l’apprentissage des femmes peintres à travers celles qui ont été les élèves de Jean-Jacques Henner.

Paris. Le catalogue restera dans l’histoire de l’art comme la première étude publiée sur les artistes féminines élèves de Jean-Jacques Henner (1829-1905). Trois ans de recherches ont été nécessaires à la conservatrice en chef du musée consacré à l’artiste, Maëva Abillard, secondée par Marie Vancostenoble et un comité scientifique, pour réunir les informations sur ces femmes. Le peintre en a reçu certaines dans son atelier en cours particulier, presque jusqu’à la fin de sa vie, et les autres fréquentaient l’académie fondée en 1874 avec Carolus-Duran, dans laquelle Henner a enseigné jusqu’à sa fermeture en 1889 – les deux amis la nommaient familièrement « l’atelier des dames ». Une liste de 152 artistes a pu être établie : toutes, considérées comme professionnelles puisqu’elles exposaient et vendaient, figurent dans le « Dictionnaire des élèves » publié dans le catalogue. Cent dix d’entre elles environ ont fréquenté « l’atelier des dames » et les autres, l’atelier d’Henner.

Plus de 150 élèves identifiées

Si le livre est une contribution à la connaissance des femmes peintres au XIXe siècle, l’exposition « Elles »vise à faire découvrir au grand public comment se déroulait l’apprentissage d’une artiste et met en valeur certaines des plus douées. L’Italienne Juana Romani et la Suissesse Ottilie Wilhelmine Roederstein étaient incontournables, comme l’Anglaise Dorothy Tennant et les Françaises Louise Abbéma [voir ill.] et Marie Petiet – cette dernière, bien que moins célèbre, dispose d’un musée à Limoux (Aude). Avec Marie Cayron-Vasselon, Ida Deurbergue, Germaine Dawis, Laura Leroux et Madeleine Smith, elles font partie du « trombinoscope » qui ouvre l’exposition. Plus loin, trois carnets de dessins de Marie Cayron-Vasselon sont consultables sur un feuilletoir numérique. Réalisés dans les ateliers, ils montrent de nombreuses élèves. Ces croquis inédits, le plus souvent datés et légendés, ont été une source précieuse d’informations lors des recherches.

Ces femmes ont donc un nom et parfois un visage. Il reste à entrevoir leur vie et à voir leurs œuvres. Le parcours montre les liens amicaux qui existaient entre le maître et les élèves qui se rendaient à son atelier ; l’une d’elles, Madeleine Smith, a été très proche de lui. Il met en évidence les relations de sororité entre les artistes, par exemple entre Roederstein et Smith, et les influences stylistiques d’Henner et de Carolus-Duran sur les peintures de leurs débuts.

À l’exception de l’atelier où sont accrochées quelques huiles d’élèves au milieu de celles du maître, le musée a été vidé pour laisser la place aux plus de 70 œuvres et documents présentés, souvent inédits car restés dans les familles. La médiation est soignée, avec en particulier des bornes audio qui permettent d’écouter les lettres et témoignages. Une carte des ateliers parisiens ouverts aux femmes et une liste des 152 élèves identifiées offrent une intéressante entrée en matière : tout est fait pour que s’établisse une proximité entre le public et ces jeunes femmes. Et pour encourager certains visiteurs, historiens de l’art ou amateurs, à se lancer dans de nouvelles recherches. Car, pour la commissaire, l’exposition est aussi un passage de relais.

Elles. Les élèves de Jean-Jacques Henner,
jusqu’au 28 avril, Musée national Jean-Jacques-Henner, 43, avenue de Villiers, 75017 Paris.

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°651 du 14 mars 2025, avec le titre suivant : Comment les artistes femmes se formaient au XIXe siècle

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque