Distinction

Légion d’honneur 2020 : place aux femmes

Par Jean-Christophe Castelain · lejournaldesarts.fr

Le 6 janvier 2020 - 743 mots

PARIS

Christiane Ziegler, Suzanne Pagé, Camille Morineau... de nombreuses femmes figurent dans la promotion du 1er janvier.

Camille Morineau
Camille Morineau
© Photo Didier Plowy

Dix-huit femmes pour onze hommes, Franck Riester est allé au-delà de la parité dans le contingent du 1er janvier des promus et nommés dans l’ordre de la légion d’honneur de son ministère. Et si l’on prend en compte les personnalités du monde culturel désignées par le président de la République ou d’autres ministres les femmes sont particulièrement à l’honneur.

Ainsi l’égyptologue et conservatrice du patrimoine Christiane Ziegler a été élevée à la dignité de grand officier. Suzanne Pagé, directrice artistique de la Fondation Vuitton, a été élevée au grade de commandeur. Elle était officier depuis 2006. 

L’administratrice générale du château de Fontainebleau Isabelle de Gourcuff a été nommée chevalier, ainsi que Laurence Maynier qui dirige depuis 2016 la Fondation des artistes (ex Fondation nationale des arts graphiques et plastiques). Anne Mény-Horn, la nouvelle secrétaire générale de l'établissement public chargé de la conservation et de la restauration de Notre-Dame de Paris et précédemment directrice générale de l’Agence France-Muséum est aussi nommée chevalier.

Le ministre a également voulu récompenser le travail de Camille Morineau la co-fondatrice de l’association Aware qui veut replacer les artistes femmes du XXe siècle dans l’histoire de l’art (voir encadré).

Ce sont cependant uniquement des artistes hommes qui ont été distingués dans la nouvelle promotion. Erró (Gudmundur Gudmundsson) est promu officier au titre des personnalités étrangères, il était chevalier depuis 2010. Pascal Convert et Hervé Saliou sont eux nommés chevaliers.

Enfin les directeurs de musée ne sont pas oubliés. Stéphane Martin qui va quitter prochainement la présidence du Musée du quai Branly – Jacques Chirac a été promu commandeur, il était officier depuis 2011, tandis que le président du MuCem à Marseille, Jean-François Chougnet a été nommé chevalier.

La promotion du 1er janvier 2020 compte 485 personnalités reconnues contre 440 l’an dernier. 

Camille Morineau : « L’honneur revient aux co-fondatrices d’AWARE »

 

Que représente cette distinction pour vous ?


Cette distinction est un grand honneur qui me remplit de joie et de fierté. Elle témoigne de l’importance que le ministère de la Culture accorde à la place des femmes dans la création d’aujourd’hui – je suis heureuse d’être nommée aux côtés de Laurence Maynier avec qui j’ai travaillé et de Jeanne Balibar avec qui j’étais en khâgne - ainsi qu’à la place retrouvée des femmes dans l’histoire de la culture. 

L’honneur revient de fait aux co-fondatrices de l’association AWARE (Archives of Women Artists, Research and Exhibitions), parmi lesquelles la romancière Julie Wolkenstein et l’avocate Nathalie Rigal, ainsi qu’à l’équipe de l’association et nos partenaires institutionnels désormais nombreux. 

Elle revient enfin aux 500 artistes femmes du XIXe et XXe siècle pour lesquelles nous avons publié une notice sur le site depuis cinq ans et à toutes celles qui y figureront dans le futur. 

 

Peut-on dire que la reconnaissance des artistes femmes a progressé depuis une vingtaine d’années ?

 

AWARE a été créée 3 ans avant le mouvement « Me too », sur les bases du travail de fond de deux générations successives : celle des activistes d’abord, des universitaires ensuite. J’ai donc vécu la formidable accélération d’une troisième génération féministe où se rejoignent enfin les hommes et les femmes, les chercheurs et le grand public, le pouvoir public et les mécènes (AWARE a pour mécène fondateur le Chanel Fund for Women in the Arts). 

 

« Me too » est à mes yeux une révolution anthropologique : la parole des femmes dans ce domaine est passée de la sphère intime à l’espace public. Une fois énoncée et partagée, leur parole est immédiatement devenue une archive : c’est-à-dire autant un outil de recherche qu’un instrument de changement. Je crois en effet dans le pouvoir transformateur d’une histoire vivante, critique, politique. Les artistes femmes sont à la crête d’une grande vague, portées haut par cette histoire « d’un autre genre » qui cherche à représenter le monde différemment. 

 

Vous avez quitté la direction du musée et des expositions de la Monnaie de Paris, quels sont vos projets ?


Je souhaite accompagner de mon mieux le développement international d’AWARE : la création d’un réseau de correspondants dans le monde entier, et la préparation d’évènements en Afrique, aux Etats-Unis et au Japon. J’ai aussi des projets de commissariat d’exposition en tête, qui se confirmeront dans les mois qui viennent. Un l’est déjà il s’agit de Diversity/United, une exposition itinérante consacrée à la scène artistique européenne, qui ouvrira à la galerie Tretiakov à Moscou en novembre 2020.


Propos recueillis par J.-C. C.

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