Fiscalité - Mécénat

La Cour des comptes se plaint du brouillard de la loi mécénat

Par Jean-Christophe Castelain · lejournaldesarts.fr

Le 29 novembre 2018 - 433 mots

PARIS

Le rapport rendu public hier pointe l’insuffisance des contrôles et l’absence d’évaluation de l’efficience des dispositifs.

Début du chantier de la fondation Louis Vuitton en 2012 © Photo Ludovic Sanejouand
Début du chantier de la fondation Louis Vuitton en 2012.
© Photo Ludovic Sanejouand

Le rapport de la Cour des comptes publié le 28 novembre sur le soutien public au mécénat n’est pas le plus sévère qu’on ait pu lire. S’il laisse échapper ici et là quelques perplexités ou agacements, il regrette surtout que la loi du 1er août 2003 aboutisse plus à une dépense de guichet qu’à une politique en faveur du développement du mécénat.

Il commence cependant par reconnaître le succès de la loi, si l’on prend en compte le nombre d’entreprises mécènes qui a été multiplié par 10, pour atteindre près de 69 000 entreprises en 2017 (des chiffres inférieurs à ceux estimés par l’Admical). Les magistrats relèvent cependant une forte concentration des entreprises donatrices : en 2016, les 24 premières entreprises ont représenté 44 % des créances fiscales.

La fondation Louis Vuitton lors de son ouverture en 2014 © Photo Ludovic Sanejouand
La fondation Louis Vuitton lors de son ouverture en 2014.
© Ludovic Sanejouand

Très attendue après des fuites savamment organisées, l’enquête des magistrats de la Rue Cambon sur la Fondation Vuitton révèlent que LVMH a pu déduire 518 millions d’euros de ses impôts sur une période de 10 ans soit une moyenne de 47 M€ par an. Une moyenne à rapporter du montant total de cette dépense fiscale, qui a atteint 930 M€ en 2016 dont environ 15 % pour la culture et le patrimoine. On apprend au passage que le coût de construction du bâtiment de Frank Gehry s’est élevé à 790 M€ TTC (TVA non récupérable). Si les magistrats n’ont pas « d’observation sur la régularité de son fonctionnement » (un satisfecit dans le vocabulaire de la Cour), elle s’interroge sur la « pertinence d’un soutien aussi important de l’Etat à des structures privées susceptibles de concurrencer des organismes publics. »

La cour relève par ailleurs le nombre élevé de fondations (2 364) et fonds de dotation (2 494) et regrette l’incapacité de l’Etat à contrôler toutes les fondations. De manière générale elle souligne le peu de contrôle de l’Etat sur les entreprises qui ont bénéficié de la déduction fiscale pour mécénat en relevant qu’une centaine à peine de rectifications sont effectuées chaque année.

En conséquence elle formule 6 recommandations dont les principales sont la mise en place d’une « administration chef de file » avec délégation du Premier ministre qui ferait un rapport tous les trois ans sur la politique du mécénat, une plus grande information de la part des organismes bénéficiaires, et un encadrement (prudent) du régime des contreparties et des modalités de création et de fonctionnement des fondations abritées. Elle réalise également quelques simulations sur un ajustement des dispositifs fiscaux (taux de réduction et plafonnement) afin d’inciter l’Exécutif ou le Législatif à s’en emparer.

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