Duchamp et Ricard ouvrent la saison des prix

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 22 septembre 2009 - 743 mots

Créés en 2000 pour le premier et en 1999 pour le second, les prix Duchamp et Ricard constituent cette année encore les deux temps forts de la semaine Fiac à Paris. Résultats les 24 et 23 octobre.

Comme tous les ans depuis 2000, les prix Ricard et Duchamp se tirent amicalement la bourre. Ils sont les plus importants en France pour l’art contemporain et profitent de la visibilité de la Fiac pour célébrer leurs poulains. Tous deux sont d’ailleurs liés au musée national d’Art moderne, Centre Georges-Pompidou puisque le premier gratifie le musée de l’œuvre lauréate pour les collections permanentes tandis que le second implique une exposition dans l’Espace 315 et entraîne une publication monographique. Bref, il y a de l’enjeu. À la clé aussi, de l’argent, sonnant et trébuchant : la fondation Ricard achète une œuvre à hauteur de 15 000 euros tandis que l’Adiaf gratifie son prix de 35 000 euros en dehors de la production pour l’exposition. Le niveau du prix Turner (40 000 £) ni même sa notoriété ne sont encore atteints, mais le contenu est cependant substantiel !

Le prix Duchamp : portrait d’une jeune génération
Les héritiers de Marcel Duchamp, toujours au nombre de quatre chaque année, exposés durant la Fiac, auront cette année une récompense supplémentaire : celle d’être aussi de la partie dans le pavillon français de l’Exposition universelle de Shanghai en 2010. Pour le reste, ils devront s’accommoder des espaces de la Cour Carrée. Sur les rangs, des Français, pour la plupart résidents berlinois, comme Saâdane Afif, Damien Deroubaix et Nicolas Moulin, et enfin le peintre parisien Philippe Perrot. Tous – à l’exception peut-être de Moulin, un peu en dessous du lot – affichent des curriculum insolemment internationaux. Ils entérinent un peu plus la vocation du prix Duchamp à se positionner sur l’échiquier des récompenses qui comptent dans le monde. C’est un jury souverain qui aura la difficile tâche de trancher entre deux peintres (Perrot et Deroubaix), un artiste de l’image (Moulin) et Afif, artiste déroutant et en perpétuel renouvellement, insaisissable, entre sculpture, installation et photographie. Gilles Fuchs, président de l’Adiaf (association créatrice du prix) s’est adjoint du beau linge cette année pour sélectionner l’heureux élu : deux collectionneurs, l’Américain James Cottrell et le Grec Dakis Joannou, deux directeurs d’institution, Charlotte Laubard du Capc de Bordeaux et Kaspar König du Ludwig de Cologne, une artiste, Jacqueline Matisse-Monnier et, représentant le Centre Pompidou, Alfred Pacquement. La sécheresse minimale et glacée des travaux d’Afif et de Moulin contre la violente matière picturale des Deroubaix et Perrot, deux camps mais, à chaque fois, les directions sont bien différentes. Bien malin qui pourra dire le nom du vainqueur.

Le prix Ricard, une scène française bien particulière
Face à ce bataillon de trentenaires (ou presque) au parcours brillant, la pépinière que représente l’exposition annuelle du prix Ricard offre un autre visage de la scène française, celui dit parfois des « nouveaux conceptuels ». Orchestrée par le critique Judicaël Lavrador, « L’image cabrée »[jusqu’au 7 novembre] postule une réflexion en trois volets sur une fabrique des images difficile et incertaine. Les neuf artistes sélectionnés ont en commun des œuvres ouvertes, sans cesse remises sur le métier, des propositions qui refusent l’autorité de la forme idéale. Comment représenter aujourd’hui ? Les reproductions issues de livres ou de magazines, les références et citations se retrouvent ainsi malmenées, retournées, déchirées au fil des peintures, des collages et des sculptures inquiètes. Le commissaire, sentant peut-être la difficulté de montrer une scène si sombre et parfois nostalgique, a choisi de montrer des œuvres de chacun des artistes dans chacune des sections. « Trois chances de se faire une idée du travail… et autant de ne pas reconnaître celui qu’on croyait préférer », précise Judicaël Lavrador. Au fil de « L’œil-stylet », « La mainmise » et « Volte-face », le jury pourra donc apprivoiser et comprendre l’adaptabilité des réflexions. Collectionneurs et institutionnels devront donc choisir lors du vote entre Karina Bisch, Sophie Bueno-Boutellier, Damien Cadio, Étienne Chambaud, Mark Geffriaud, Jimmy Robert, Clément Rodzielski, Oscar Tuazon, Ida Tursic et Wilfried Mille. « ll y a la volonté d’être en phase avec les artistes en vue ces derniers mois », rappelle Lavrador à propos de cette sélection, tout en reconnaissant qu’il ne s’agit que d’une scène française bien particulière au sein d’une nébuleuse beaucoup plus hétérogène. Les paris sont ouverts et ils iront bon train jusqu’au 23 octobre pour le prix Ricard, et le 24 pour le Duchamp.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°617 du 1 octobre 2009, avec le titre suivant : Duchamp et Ricard ouvrent la saison des prix

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