Politique

Alain Juppé, le maire qui a métamorphosé Bordeaux

Par LeJournaldesArts.fr (avec AFP) · lejournaldesarts.fr

Le 14 février 2019 - 656 mots

BORDEAUX

Une ville noire, embouteillée et polluée transformée en une cité resplendissante saluée pour sa qualité de vie et son dynamisme : Alain Juppé a réussi une métamorphose radicale de sa ville, dont l'image rayonne désormais en France et dans le monde.

Alain Juppé, maire de Bordeaux
Alain Juppé, maire de Bordeaux
Photo Thomas Sanson
© Mairie de Bordeaux

En 2017, le guide touristique Lonely Planet plaçait la capitale girondine en tête de son classement mondial des villes les plus attractives. Une consécration saluant la renaissance spectaculaire de la ville, quelque vingt ans après l'arrivée à sa tête de l'ancien Premier ministre, aujourd'hui partant pour le Conseil Constitutionnel. Dans les années 1990, il fallait pourtant être visionnaire pour imaginer les atouts cachés de la "belle endormie" derrière ses façades noircies, ses hangars délabrés, ses quais mal famés et, partout, ses parkings dédiés à une voiture omniprésente. 

Lorsqu'il prend les commandes de la ville en 1995, après 48 ans de règne du gaulliste Jacques Chaban-Delmas (1915-2000), Alain Juppé, 50 ans, également président de la communauté urbaine, est bien décidé à la réveiller. Il enterre d'abord le projet de métro, cher à son prédécesseur, lui préférant un vaste réseau de tramway qui permet d'éloigner la voiture du centre historique. Ce sera le "tram sans fil" - premier exemple mondial d'un tramway fonctionnant grâce à un système d'alimentation par le sol - inauguré en 2003 et plébiscité depuis. 

 Le Miroir d'eau sur la Place de la Bourse avec l'Hôtel et le Palais de la Bourse, Bordeaux - Photo Xellery
Le Miroir d'eau sur la Place de la Bourse avec l'Hôtel et le Palais de la Bourse, Bordeaux.
Photo Xellery

Parallèlement est lancé un grand projet de rénovation des quais de la Garonne, alors que la ville tourne ostensiblement le dos à son fleuve depuis le déclin du port dans les années 1960. "Le principe d'un réaménagement des quais sur les deux rives était acté dès la fin du mandat de Chaban, avec l'architecte Dominique Perrault. Juppé va s'engouffrer dans ce projet, mais en sollicitant d'autres acteurs", souligne Marc Saboya, historien de l'art, auteur d'ouvrages sur l'architecture bordelaise. Le projet sera confié à l'urbaniste Michel Corajoud. Il transforme les quais en une vaste promenade de 6 km bordant le fleuve, avec son fameux "miroir d'eau" devenu emblématique de la ville. Les façades du centre historique sont ravalées, révélant une pierre de taille blonde et lumineuse ; la piétonisation y est généralisée, les circulations douces favorisées...
   
Bastion des "gilets jaunes"
   
La récompense tombe en 2007 avec le classement par l'Unesco au patrimoine mondial d'un des plus beaux exemples européens d'architecture du 18e siècle. Le nombre de touristes bondit, franchissant le cap des 7 millions en 2017. 

Elu et systématiquement réélu dès le premier tour (60,9% en 2014), Alain Juppé projette dès les années 2010 sa ville dans son rôle de grande métropole régionale, d'autant qu'il retrouve la tête de l'agglomération en 2014 après dix ans de "cogestion" avec la gauche. Une nouvelle période de transformations s'ouvre pour celle qui devient en 2013 capitale de la Nouvelle-Aquitaine et se retrouve en 2017 à deux heures de Paris grâce à la LGV : de nouveaux quartiers sont édifiés sur les deux rives, un centre d'affaires est lancé autour de la gare Saint-Jean ... Des entreprises s'installent, une nouvelle ligne de tramway est lancée pour porter le réseau à 77 km.

Côté architecture contemporaine, ce sera le pont levant Chaban-Delmas sur la Garonne inauguré en 2013, suivi par le chantier complexe et retardé du pont Simone Veil, dessiné par l'agence de l'architecte néerlandais Rem Koolhaas, la Cité du vin, la salle de spectacle Arena... Mais ce développement à marche forcée suscite aussi le mécontentement d'habitants qui dénoncent la hausse spectaculaire des prix de l'immobilier, l'engorgement des transports routiers, les difficultés de stationnement dans une "ville musée"...

Et puis ce rayonnement insolent de la métropole a suscité du ressentiment dans les zones rurales alentours, qui se sentent délaissées, et dont nombre d'habitants envahissent chaque samedi les rues bordelaises, revêtus du "gilet jaune". "Bordeaux paierait la rançon de sa réussite ?", s'interrogeait récemment Alain Juppé, qui semblait déstabilisé par les violences défigurant chaque semaine une ville pour laquelle il venait d'écrire un "Discours amoureux".

Cet article a été publié par l'AFP le 13 février 2019.

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