Italie - Musée

ENTRETIEN

Le Palazzo Strozzi raconté par son directeur

Directeur général de la Fondation Palazzo Strozzi, à Florence

Le Palazzo Strozzi a placé Florence sur la carte de l’art contemporain en Italie. Une gageure pour cette ville patrimoniale.

Arturo Galansino. © Gianmarco Rescigno.
Arturo Galansino.
© Gianmarco Rescigno.
L’année 2022 a été une année record pour le Palazzo Strozzi ; pour quelles raisons ?

Plus 340 000 visiteurs ont franchi nos portes au cours de l’année, soit une hausse de fréquentation de 41 %. Ce succès répond à une programmation ambitieuse avec trois grandes expositions, dont la rétrospective sur Donatello (la première fois depuis quarante ans) qui a été le fruit d’une ambitieuse collaboration avec le Royaume-Uni et l’Allemagne. Elle a permis de rassembler plus d’une centaine d’œuvres dont certaines ont été déplacées pour la première fois depuis six siècles. Citons aussi l’art de la Renaissance bien sûr, mais aussi « Let’s Get Digital ! », qui a été l’une des premières et des plus importantes expositions en Italie sur l’art numérique et les NFT. Nous sommes en train de récolter les fruits d’une stratégie qui a changé l’image du Palazzo Strozzi. Nous avons apporté à Florence une offre culturelle qui n’existait pas avant en transformant la ville en destination pour les passionnés d’art contemporain. Il y a de grands musées d’art contemporain en Italie comme celui de Prato ou le Castello di Rivoli, et de grandes galeries à Milan, Venise ou Rome. Florence était essentiellement perçue comme la capitale de la Renaissance. Nous avons brisé un cliché en enrichissant son identité.

Vous êtes à la tête du Palazzo Strozzi depuis 2015. Comment avez-vous fait entrer l’art contemporain dans ce temple sacré de la Renaissance ?

Le tournant a eu lieu en 2016 avec l’exposition consacrée à Ai Weiwei. Le succès rencontré nous a confortés dans notre volonté d’être de véritables pionniers des institutions culturelles italiennes dans la programmation d’expositions d’artistes contemporains. Nous n’avons pas craint les doutes de ceux qui pensaient qu’elles ne rencontreraient pas leur public à Florence. De Jeff Koons à Jan Fabre, de Bill Viola à Olafur Eliasson en passant par Marina Abramović, les expositions qui leur ont été consacrées ont à chaque fois attiré un nombre important de visiteurs. Florence ne doit pas seulement être la gardienne de l’art ancien, elle doit aussi offrir l’art de notre époque. Cela ne veut pas dire que nous tirons un trait sur le cœur de son identité. Les expositions sur Léonard de Vinci, Verrocchio et Donatello ont répondu ces dernières années à de très ambitieux et rigoureux projets scientifiques.

Quel impact le Palazzo Strozzi a-t-il sur la ville de Florence ?

Nous sommes un antidote au tourisme de masse qui menace de faire perdre leur identité aux villes d’art. Nos expositions font venir des touristes cultivés, ce qui ne veut pas dire exclusivement riches, favorisant un « tourisme durable ». Ils sont en effet plus attentifs à la qualité de l’offre culturelle de Florence et de son patrimoine, y compris gastronomique, loin des flux traditionnels. Notre succès profite également à la ville puisque nous générons des retombées économiques évaluées à 114 millions d’euros.

Comment envisagez-vous l’avenir ?

Avec confiance. Notre solidité économique est garantie par une hausse de plus de 78 % des recettes de la billetterie et du merchandising qui s’élèvent à 4,2 millions d’euros. Celles-ci assurent 39 % de notre budget. 38 % proviennent des sponsors et des donateurs privés. Les 23 % restants de nos ressources sont d’origine publique. Nous sommes de plus en plus une fondation privée et autonome, attentive néanmoins au patrimoine de la collectivité puisque nos grandes expositions d’art ancien favorisent de vastes campagnes de restauration d’œuvres. Plus de 1 million d’euros provenant de fonds privés ont ainsi été récoltés pour les trois grandes expositions consacrées aux grands maîtres de la Renaissance ces huit dernières années. Concernant notre programmation, est présentée cet été une exposition consacrée à Yan Pei-Ming avant, à l’automne, une invitation faite à Anish Kapoor puis à Anselm Kiefer début 2024. Nous rendrons enfin hommage à un autre grand maître de la Renaissance en 2025 dont le nom sera dévoilé prochainement.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°615 du 7 juillet 2023, avec le titre suivant : Arturo Galansino, directeur général de la Fondation Palazzo Strozzi, à Florence : « Nous avons brisé un cliché »

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