Le parcours entièrement repensé met en valeur l’architecture des tours avec une médiation plus axée sur la perception que sur l’information historique.

Paris. Il faut gravir un peu plus de quatre cent vingt marches pour atteindre le sommet de la tour sud afin de pouvoir contempler Paris à 69 mètres de haut. Ce qui nécessite donc une bonne forme physique, comme le rappelle le Centre des monuments nationaux (CMN) qui gère les tours de la cathédrale. L’ascension se déploie en plusieurs étapes, dans un souci de confort pour les visiteurs. Une première étape mène à la salle basse par un escalier en pierre accolé à la tour sud, où le nombre de marches à gravir est indiqué à intervalles réguliers par des panneaux de couleur acajou (des bornes d’appel d’urgence pour les visiteurs en détresse ponctuent aussi l’ascension). La salle présente succinctement la structure de la cathédrale avec deux maquettes, dont « un écorché du monument », précise Julie Schafir (cheffe de projet médiation et scénographie au CMN). Cet écorché montre en coupe verticale le parcours des visiteurs, tandis qu’une maquette d’architecte entourée d’écrans résume les étapes de construction de la cathédrale. Une citation de Victor Hugo et deux sculptures de chimères abîmées par l’incendie contribuent à créer une ambiance teintée de poésie, que le reste du parcours accentue.

Cent cinquante marches plus haut, le parcours aboutit à la base du beffroi dans la salle quadrilobe, où la pierre blanche cède la place au bois : l’éclairage indirect met ici en valeur les immenses poutres de chêne qui le soutiennent. « Ce nouveau parcours permet une immersion dans l’architecture », explique Hélène Amblès, directrice du développement culturel et des publics au CMN et effectivement les visiteurs frôlent ensuite les poutres millénaires en gravissant un escalier contemporain en chêne réalisé spécialement pour le nouveau parcours. Tout au long de cette section, des haut-parleurs quasi invisibles diffusent des musiques d’orgue et de cloches de différentes époques : le travail sur le son est très soigné, malgré les contraintes (courants d’air, bruits de pigeons).

Un escalier en chêne conduit à la terrasse des chimères, d’où les visiteurs ont une vue plongeante sur la Seine. Cinquante-quatre chimères, à distinguer des gargouilles, ornent les façades de la cathédrale. «La plupart datent du XIXe siècle lorsque Viollet-le-Duc a restauré Notre-Dame en s’inspirant de l’imaginaire médiéval », précise Nina Derain, chargée d’étude et de gestion scientifiques au CMN. L’accès au toit de la tour sud s’effectue par un petit escalier en pierre très étroit, et la vue panoramique sur Paris est ici agrémentée de tables d’orientation discrètes. Entre deux rafales de vent, les visiteurs profitent d’une vue exceptionnelle sur la tour nord et de la flèche reconstruite avec les statues des apôtres. Il faut redescendre puis remonter par un autre escalier en bois pour arriver au sommet du beffroi où trônent les deux bourdons en bronze (cloches monumentales au son grave). Le plus gros des deux, « Emmanuel », est classé aux Monuments historiques depuis 1944 et est le seul bourdon de France à avoir survécu aux destructions de 1792 selon Nina Derain. Le parcours se poursuit sous ce bourdon qui pèse 13,3 tonnes, non sans quelques frissons.

Le passage à la tour nord s’emprunte par la cour des citernes, une terrasse située au-dessus du fronton de la cathédrale. Là où l’ancien parcours faisait passer les visiteurs sur une coursive quelques mètres plus haut, le nouveau donne à voir les riches décors sculptés des deux tours et offre un panorama sur la « forêt », soit la charpente en bois de la nef, visible par des fenêtres. La médiation assez limitée laisse les visiteurs s’imprégner de l’architecture. Dans la tour nord, une cloche du XIXe siècle est exposée à hauteur d’yeux dans une salle pavée de bois où résonne la musique composée spécialement pour le lieu par Valérie Vivancos. Cette bande-son contemplative accompagne la descente qui s’accomplit d’une traite dans l’escalier en pierre, au risque d’une sensation de tournis. Après cette visite en plein vent coupée de l’environnement parisien, le retour à l’agitation du parvis permet de mesurer la qualité sensorielle du nouveau parcours des tours.
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Le nouveau circuit des tours de Notre-Dame
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°662 du 3 octobre 2025, avec le titre suivant : Le nouveau circuit des tours de Notre-Dame









