Ventes aux enchères

Un accord enfin trouvé sur la reproduction de photographies dans les catalogues de ventes

Par Alexis Fournol (Avocat à la cour) · lejournaldesarts.fr

Le 5 mars 2018 - 625 mots

PARIS

Les auteurs de photographies percevront une rémunération attachée à la reproduction de leurs œuvres dans les catalogues.

Catalogues de ventes aux enchères
Catalogues de ventes aux enchères
Photo Ludosane

La discrétion s’imposait en raison de la sensibilité du sujet. D’un côté, les photographes et leurs agences souhaitaient depuis longtemps percevoir une rémunération au titre de la reproduction au sein des catalogues des œuvres dont la vacation était envisagée. De l’autre, les opérateurs de ventes volontaires refusaient de payer davantage de droits d’auteur, estimant contribuer déjà assez en ce domaine avec le versement du droit de suite.

Seul un compromis pouvait permettre de sortir d’une telle impasse à moins d’envisager un affrontement permanent devant les tribunaux, les agences photographiques ayant décidé depuis quelques temps de faire valoir les droits de leurs photographes en exigeant le versement de droits d’auteur a posteriori de la vente.

La position des opérateurs de ventes volontaires ne pouvait tenir au regard des dispositions légales en la matière. Si la loi du 10 juillet 2000, réformant les ventes aux enchères publiques, a bien exempté les commissaires-priseurs judiciaires de l’acquittement d’un tel droit, aux termes de l’article L. 122-5, d) du Code de la propriété intellectuelle, une telle exception ne s’étend nullement au bénéfice des ventes volontaires. Et le Recueil des obligations déontologiques rappelle à ce titre, en son article 1.2.1, que les opérateurs doivent s’assurer « pour les besoins de la vente, des autorisations nécessaires à la reproduction et à l’exposition des objets soumis au droit d’auteur ». Depuis 2000, de nombreuses tentatives ont existé afin d’essayer d’aligner les ventes volontaires sur les ventes judiciaires, sans succès néanmoins, en raison de l’opposition toujours affichée du ministère de la Culture.

Malgré le principe de rémunération proportionnelle attachée à l’exploitation de tout droit d’auteur, le ministère a proposé de réfléchir à un système de droit forfaitaire généralisé pour faciliter le travail des opérateurs de ventes volontaires. C’est dans cette optique que s’est tenue la mission de médiation sous la présidence de Madame Anne-Elisabeth Crédeville, vice-président du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA), instance consultative indépendante chargée de conseiller le ministre de la Culture, et sous l’égide du Conseil des ventes volontaires. Réunissant moins d’une dizaine d’opérateurs, deux sociétés de gestion collective (l’Adagp et la Saif), ainsi que deux agences de presse (Magnum et Gamma-Rapho), la médiation a abouti, au terme de très nombreux mois de discussion, à une solution de compromis. La longueur des discussions s’expliquait ici essentiellement par la difficulté à aboutir à un accord autour d’un tarif accepté par tous les acteurs concernés.

Un « guichet unique » est ainsi créé auprès de l’Adagp, chargée de délivrer les autorisations de reproduction et de percevoir les droits afférents, une fois que les opérateurs ont signé un contrat individuel avec la société de gestion collective. Depuis janvier 2018 plusieurs opérateurs de ventes volontaires ont conclu un tel contrat, le premier accord datant de la dernière édition de Paris Photo selon nos informations.

Dès 2015, le Conseil des ventes volontaires soulignait, dans son rapport annuel, la possibilité pour les auteurs de demander « un droit de reproduction, lorsque la photographie répond aux conditions de protection des œuvres de l’esprit et notamment à la condition d’originalité ». Une telle revendication a été notamment portée judiciairement par l’agence Magnum en 2014 à l’encontre de deux maisons de ventes. Mais n’ayant pu produire de mandats réguliers de la part de ses photographes, l’agence avait échoué à faire valoir ses droits devant le Tribunal de grande instance de Paris en 2016, avant qu’une solution ne soit trouvée en dehors de l’enceinte judiciaire en 2017. Depuis, les deux agences phares en France ont sollicité tous leurs auteurs afin de peser dans les discussions. Reste désormais à s’assurer que tous les opérateurs suivent à leur tour le chemin ouvert par la médiation.

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