Foire & Salon

FOIRES OFF

L’effervescence des foires satellites de la Fiac

Par Anne-Cécile Sanchez · Le Journal des Arts

Le 17 octobre 2018 - 1343 mots

PARIS

Positionnées sur des territoires plus ou moins définis, les foires « off » se font et se défont, témoignant du bouillonnement au moment de la Fiac. Entre valeurs sûres, découvertes et redécouvertes.

Alexandra Bircken, Interceptor II, 2016, moto, métal, 116 x 207 x 76 cm.
Alexandra Bircken, Interceptor II, 2016, moto, métal, 116 x 207 x 76 cm.
Photo Achim Kukulies
Courtesy BQ, Berlin

Cette année, la « semaine de l’art » commence, avant la Foire internationale d’art contemporain (Fiac), par un week-end de trois jours intitulé « Paris Avant Première ». Cette nouvelle initiative rassemble des jeunes marchands et des espaces d’art indépendants en amont de la grande manifestation du Grand Palais espérant profiter de la présence de ses premiers collectionneurs. Le vernissage collectif, prévu de 18 heures à minuit, le 12 octobre, présente des galeries établies, mais aussi des enseignes plus confidentielles, des artist-run spaces et une poignée de marchands venus de Los Angeles. Faut-il y voir un indice du climat d’émulation créé par la Fiac ? Le rayonnement de cette dernière est propice à tout un écosystème : autour d’elle, des foires off meurent, d’autres apparaissent.

Classique

Art Élysées apparaît, pour sa 12e édition, comme la plus installée et la plus classique des foires off. Elle se distingue par son emplacement sur l’avenue des Champs-Élysées, mais aussi par son fort contingent de ­galeries d’art moderne, dont Hélène Bailly, qui y présente des œuvres d’artistes modernes et d’après-guerre avec des prix – par exemple pour une huile sur toile de Poliakoff ou un dessin à la craie sur papier de Picasso – autour de 200 000 à 300 000 euros. Soucieuse de dynamiser son image, la foire met en avant sa sélection design, ainsi que son pavillon consacré à l’art urbain. La galerie Le Feuvre & Roze comptait depuis deux ans parmi les enseignes les plus intéressantes de cette section. Signe que le street art a la cote, elle rejoint le secteur historique, dans la section art contemporain, où elle présentera entre autres les très identifiables « Rubik’s cubes sur plexiglas » d’Invader (110 000 euros ). Dans les prix abordables, signalons les multiples (entre 500 et 2 500 euros) de Philippe Geluck à la galerie Huberty-Breyne, spécialisée dans les originaux de bande dessinée. Le chat iconique et ironique du dessinateur belge aime bien égratigner les poncifs de l’art, mais attention, il est pris au sérieux : dessins entre 4 500 et 7 000 euros, toiles entre 18 000 et 30 000 euros.

Branchée

Paris Internationale doit, pour sa part, défendre son image de foire tendance et revient à ses fondamentaux. Elle le manifeste pour cette quatrième édition par le choix d’une adresse intimiste près du parc Monceau. Foire autoproclamée de la scène émergente, elle a fait son credo du soutien aux jeunes galeries. Elles sont une quarantaine cette année, provenant de 21 pays. La tendance est aux espaces « non-profit » ; Paris Internationale en a sélectionné huit. Onze nouvelles enseignes rejoignent par ailleurs cette édition, parmi lesquels Fons Welters (Amsterdam) avec Gabriel Lester et Win McCarthy, un artiste américain aperçu l’an dernier à Frieze (prix compris entre 4 000 et 24 000 euros). Au nombre des galeries parisiennes qui trouvent ici une alternative, Sultana mélange sur son stand peintures (Celia Hempton), sculptures (Jacin Giordano, Pia Camil) et vidéos (Paul Maheke). Les prix vont de 5 000 euros (la vidéo de Paul Maheke) à 15 000 euros pour les sculptures de Pia Camil, qui a intégré plusieurs collections publiques et privées et est également défendue par la galerie Blum & Poe. La galerie allemande BQ retient également l’attention avec un stand consacré aux nouvelles œuvres d’Alexandra Bircken (voir l’illustration ci-dessus), dont on avait pu voir fin 2017 la saisissante exposition monographique au Centre d’art contemporain d’Ivry-le Crédac (prix entre 7 000 et 28 000 euros).

Non conformiste

L’Outsider Art Fair (OAF) quitte l’hôtel du Duc pour l’Atelier Richelieu et réunit 37 galeries internationales venues de dix pays. Qu’entend-on par artistes outsiders ? On connaît les cathédrales d’A.C.M, sculptures créées à partir de pièces électroniques usagées, présentées par la Galerie JP Ritsch-Fisch (Strasbourg), mais moins les avions en carton de Mattia Fiordispino montrés par la galerie Rizomi. Et la définition peut s’entendre de façon plus large pour la galerie LJ qui, à défaut d’art brut, défend des artistes en marge du marché de l’art classique, telles la Taïwanaise Tangent Lin et l’Américaine Allyson Mellberg – dont les dessins font partie de la collection de la Maison Rouge-Fondation Antoine de Galbert, Paris (pour les deux, prix entre 800 et 2 000 euros).

Versatile

Le Paris Contemporary Art Show by YIA – ex-Young International Art Fair – revendique une ligne éditoriale orientée désormais vers l’art moderne et contemporain. Une soixantaine d’enseignes annoncées sur le papier, dont plus de la moitié participent pour la première fois. Bernard Vidal et Nathalie Bertoux, dont la galerie est itinérante depuis la fermeture en 2015 de leur enseigne Vidal-Saint Phalle, se sont laissé tenter par cette vitrine au Carreau du Temple. Ils y défendront la peinture de Pius Fox (né en 1983) à la faveur d’un one-man-show. Représenté par plusieurs marchands européens, (dont Martin Kudlek à Cologne), cet artiste berlinois avait bénéficié d’une exposition personnelle au Frac Auvergne en 2015 (de 1 500 euros pour des œuvres de format A4 à 10 500 euros pour les plus grandes). À voir également côté émergent, la galerie Persona Curada et côté historique, la galerie Kogure qui viendra de New York présenter des œuvres de… Claude Viallat.

Extrême-orientale

Asia Now affirme son ambition de foire ambassadrice de l’Asie à Paris, alors que la saison Japonismes 2018 bat son plein. Outre un espace consacré au pays du Soleil -Levant imaginé par Sou Fujimoto Architects, cette quatrième édition offre l’occasion de découvrir des galeries venues de Tokyo ou Kyoto, comme COHJU contemporary art, mais aussi d’importantes enseignes chinoises, coréennes et quelques galeries philippines. Plusieurs galeries européennes font écho à l’engouement pour la scène coréenne, ou y ont œuvré depuis quelques années, comme la galerie danoise Maria Lund, qui présentera des tableaux-reliefs de Lee Jin Woo (né en 1959), dont l’œuvre fait partie de la collection du Musée Cernuschi (de 3 000 à 40 000 euros) et des sculptures en céramiques de l’artiste Shoi (née en 1983) de 1 000 à 40 000 euros. Conversations, programmes vidéos, projets spéciaux... le menu s’annonce riche.

Toute nouvelle

Bienvenue, la dernière née de ces foires off, s’installe pour près de deux semaines à la Cité internationale des arts. Son fondateur, le galeriste Olivier Robert, l’a lancée en réaction au « mouvement inflationniste » du marché de l’art. Il a fédéré 24 galeries, majoritairement françaises. La Clermontoise Claire Gastaud montrera trois grands panneaux de la série « Mots Mélés » (2018) de Tania Mouraud, à laquelle le Centre Pompidou-Metz a consacré une exposition monographique en 2015 (autour de 20 000 euros). Ouverte à Paris en 2010, la galerie Dohyang Lee consacre son stand à un projet d’Elisabeth S. Clark (née en 1983), ex-résidente du pavillon du Palais de Tokyo en 2011 et dont on a vu le travail rigoureux à la Biennale de Lyon en 2017 (prix entre 2000 et 40 000 euros). Signalons la présence de la bruxelloise Aeroplastics, et de quelques enseignes parisiennes reconnues telles qu’Anne Barrault, Christian Berst, Florence Loewy, Eva Meyer, Polaris, ou encore Cortex Athletico, également présente à la Fiac, mais qui s’associe ici à la galerie bordelaise La Mauvaise réputation autour des peintures « hallucinées » de Gorka Mohamed, Manuel Ocampo et Thierry Lagalla.

Unique en son genre

Private Choice n’est pas une foire, mais une sélection d’œuvres mises en scène et en vente dans un bel appartement près de la Fiac. Créé en 2013 par Nadia Candet, collectionneuse de longue date et conseillère en art, l’événement s’est affirmé comme un rendez-vous prisé des amateurs d’art et de design mélangeant les deux disciplines, comme les éditions et les pièces uniques. Des vide-poches sculptés de Lamarche-Ovize, aux dessins d’Angelika Markul (1 600 € pièce), des lampes en verre de Murano de Jean-Michel Othoniel (2 320 €) à un Polaroid d’Ellen Carey (12 000 €), on navigue entre objets de décoration et installation in situ : après leur déambulation sur l’île Saint-Louis pendant la Nuit Blanche, Edgar Sarin et Mateo Revillo se plient ici à l’échelle domestique en occupant 22 mètres carrés.

Art Élysées,
du 18 au 22 octobre, avenue des Champs-Élysées de la place de la Concorde à la place Clémenceau, 75008 Paris.
Paris Internationale,
du 17 au 21 octobre, 16, rue Alfred de Vigny, 75008 Paris.
Outsider Art Fair,
du 19 au 21 octobre, Atelier Richelieu, 60, rue de Richelieu, 75002 Paris.
Paris Contemporary Art Show by YIA,
du 18 au 21 octobre, Carreau du Temple, 4, rue Eugène Spuller, 75003 Paris.
Asia Now,
du 17 au 21 octobre, 9, avenue Hoche, 75008 Paris.
Bienvenue,
du 15 au 27 octobre, Cité internationale, 18, rue de l’Hôtel de Ville, 75004 Paris.
Private Choice,
du 15 au 21 octobre, 7, avenue Franklin Roosevelt, 75008 Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°508 du 5 octobre 2018, avec le titre suivant : L’effervescence des foires satellites de la fiac

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