Ventes aux enchères

2020, Les maisons de ventes en France limitent la casse

Par Marie Potard · Le Journal des Arts

Le 20 janvier 2021 - 897 mots

Avec 751 millions d’euros de produit d’ adjudication au total, les dix premières maisons de ventes affichent une baisse de « seulement » 30 % par rapport à 2019. Christie’s reprend la tête.

France. Comparativement à de nombreux secteurs français qui tablent sur une perte de plus de 50 % de leur chiffre d’affaires en 2020, le milieu des enchères a mieux encaissé la crise du Covid-19. L’accélération de la transition numérique et le recours massif aux ventes privées pour les plus gros opérateurs ont permis d’endiguer la forte baisse annoncée.

Dans ce contexte hors norme, il est difficile de comparer les résultats exceptionnels des dix premières maisons de vente aux enchères en France de 2019, soit 1,06 milliard d’euros de produit d’adjudications cumulées, avec les 750,9 millions d’euros récoltés en 2020, soit une baisse de 29,7 %.

Le boom des ventes privées chez Christie’s

Christie’s a repris la première place du classement que Sotheby’s lui avait ravie depuis deux ans, ceci avec un volume de ventes de 221,3 millions d’euros, enregistrant une baisse de 13,8 %. Christie’s limite donc la casse, d’autant que l’année précédente un tableau de Nicolas de Staël avait été cédé pour 20 millions d’euros. Pas moins de 44 ventes aux enchères ont été organisées, contre 37 en 2019, dont 14 en ligne, « une nouveauté absolue pour nous », a déclaré Cécile Verdier, présidente de Christie’s France. En plus d’une forte digitalisation, l’année a été marquée par un boom des ventes privées à Paris, qui représentent aujourd’hui 10 % des ventes du groupe, ainsi que par une augmentation de nouveaux acheteurs (25 % contre 22 % en 2019) et du nombre d’œuvres millionnaires (26 contre 20).

Moment fort de l’année, la dispersion de la collection de sculptures du marchand Paul Haim a rapporté 20,6 millions d’euros, le double de l’estimation. « Notre principal défi de cette année difficile était du côté de l’offre, beaucoup de clients ayant décidé de différer leur vente, mais la demande est restée forte », a indiqué Guillaume Cerutti, président de Christie’s monde, qui craignait une contraction du volume des ventes de l’ordre de 25 % pour l’année écoulée par rapport à 2019.

Sotheby’s redescend sur la deuxième marche. Avec un total de 173 millions d’euros, contre 354,4 millions d’euros l’année précédente, elle enregistre la plus forte de baisse du classement, soit une chute de plus de 50 % de son chiffre d’affaires. L’antenne parisienne a souffert d’un manque de collections prestigieuses, alors qu’avaient été dispersées en 2019 les collection Lalanne (91,3 M€), Ribes (23 M€), Pierre Nahon (13,1 M€) ou encore Marceau Rivière (11,5 M€).

Artcurial conserve la troisième place du podium avec un produit d’adjudication de 144,3 millions d’euros, en recul de 24 %. « Ces résultats confirment la pertinence de la stratégie pluridisciplinaire d’Artcurial. En 2020, la maison est parvenue à maintenir la quasi-totalité de son calendrier des ventes », a commenté Stéphane Aubert, directeur associé. La maison du rond-point des Champs-Élysées a adjugé 12 enchères millionnaires (contre 11 en 2019), parmi lesquelles un Stabile de Calder vendu près de 5 millions d’euros, une Ferrari de 1965 275 GTB (2,5 M€) ou encore La Madeleine pénitente peinte par Salaì, l’élève de Léonard de Vinci (1,7 M€).

Osenat nouvel entrant

Loin derrière le trio de tête, Aguttes se maintient à la quatrième place, avec un total de 45,5 millions d’euros contre 63,9 millions en 2019 (– 28,8 %). Une partie des vacations initialement prévues en vente « physique » a été convertie en vente exclusivement en ligne, soit « + 340 % de produit vendu par rapport à 2019 », a précisé la maison de ventes. Millon conserve aussi la 5e place du podium avec un produit global s’élevant à 43 millions d’euros (– 6,1 %), suivi par Ader qui remonte d’une place au détriment de Tajan (24,5 M€), avec un total de 30,9 millions d’euros – un chiffre comprenant la vente d’un vase impérial chinois du XVIIIe siècle pour 2,5 millions. « Si d’importantes vacations ont dû être reportées à 2021, nous avons toutefois réussi à organiser à peu près le même nombre de ventes que l’année dernière (75 contre 77 en 2019) », ont commenté les commissaires-priseurs David Nordmann et Xavier Dominique.

Vient ensuite Piasa avec 23,7 millions d’euros de récoltés (– 22 %) puis Osenat, qui intègre le classement à la 9e place. La maison bellifontaine est la seule des dix opérateurs à afficher une hausse de son chiffre d’affaires (19,9 %), avec un total de 23,5 millions d’euros. L’ouverture d’une salle supplémentaire en septembre 2020 à Versailles n’est pas étrangère à ce bon résultat. Enfin, Cornette de Saint Cyr occupe la 1Oe place avec un résultat de 21,2 millions d’euros, affichant une très légère baisse, la plus faible du top 10.

Drouot, l’hôtel des ventes parisien, a été de son côté contraint de fermer ses salles pendant les deux confinements, réduisant le nombre de ventes à 473 contre plus de 800 en temps normal. Il accuse une baisse de 45 % avec un volume de ventes de 205 millions d’euros (372 M€ en 2019). Si certaines vacations ont basculé sur le numérique – qui augmente de 50 % cette année –, cela n’a pas suffi à rattraper le manque à gagner. En revanche, Drouot peut se targuer d’avoir adjugé la plus forte enchère de l’année en France, soit deux albums de l’encyclopédie Yongle Dadian datant du XVIe siècle vendus 8,1 millions d’euros chez Beaussant Lefèvre, entre deux confinements.

Tous les chiffres d’affaires mentionnés dans le texte sont indiqués frais compris mais hors TVA.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°559 du 22 janvier 2021, avec le titre suivant : 2020, Les maisons de ventes en France limitent la casse

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