Politique

Classement communautés de communes

Les départements au secours des musées des petites communes

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 24 mai 2017 - 1121 mots

FRANCE

La plupart des grands équipements situés dans les communautés de communes, qui rassemblent principalement de petites villes, appartiennent au Département. Ils reflètent la diversité des offres muséales. On y trouve plusieurs perles.

Si les musées d’agglomération présentent de multiples points communs avec ceux des métropoles, les musées situés dans les communautés de communes offrent un tout autre visage. Avec un nombre moyen d’habitants de 27 000 personnes, contre 158 000 pour les communautés d’agglomération et 3 millions pour les métropoles, les masses ne sont pas les mêmes. À commencer par les ressources financières des collectivités locales qui les soutiennent, lesquelles sont celles d’une commune rurale. Il ne faut donc pas s’étonner qu’un grand nombre de musées situés dans des communautés de communes appartiennent au conseil départemental, seul capable de financer des équipements hors de portée des villes.

Le trio de tête récompense le travail des Départements
Les trois musées du podium dans ce classement sont propriété du Département. Le Musée Matisse au Cateau-Cambrésis (Nord) monte une nouvelle fois sur la plus haute marche, flanqué de l’Historial de la Grande Guerre à Péronne (Somme) et du Familistère de Guise (Aisne). Les trois musées sont de création récente ou ont été entièrement rénovés au cours des dernières années, pour les doter d’installations modernes pour l’accueil du public et le travail scientifique.

Le Musée Matisse, qui bénéficie d’un bassin de population plus large que la moyenne, enregistre cependant un tassement de sa fréquentation qu’il compense par une programmation à l’étranger. En 2016, le musée a ainsi prêté des œuvres et les services de son directeur, Patrice Deparpe, pour une exposition organisée à Johannesburg en Afrique du Sud.

L’Historial de la Grande Guerre (créé en 1992) à Péronne (en Picardie) a, lui, profité d’une double actualité. D’abord les commémorations du centenaire de la Première Guerre mondiale se poursuivent et attirent toujours beaucoup de scolaires, autant que la population totale de la communauté de communes bien qu’en moins grand nombre (– 18 %) en raison des contraintes du plan Vigipirate. Ensuite, un musée a été ouvert sur son site de Thiepval, le mémorial franco-britannique des batailles de la Somme. L’Historial est l’un des rares de ce classement à offrir le wi-fi gratuit à ses visiteurs. Ce n’est pas le cas du Familistère de Guise, un habitué des places d’honneur du Palmarès en raison de la qualité de ses services et de sa programmation large et diverse. L’ancienne usine Godin organise de nombreuses conférences, prête les lieux à des événements privés et, bien sûr, présente des expositions. Tout cela lui permet d’attirer 66 000 visiteurs, un chiffre très honorable, comparable à la fréquentation de plusieurs musées franciliens.

Au pied du podium, la Maison des Lumières Denis-Diderot à Langres (Haute-Marne) est l’un des rares musées à ne pas appartenir au Département, comme son petit frère le Musée d’art et d’histoire de Langres (8e), avec lequel il mutualise diverses ressources. L’un et l’autre sont d’une ampleur bien moindre que le trio de tête, mais, par une politique active d’expositions temporaires et un travail scientifique de qualité, ils parviennent à créer une dynamique. Ces deux musées de Langres illustrent néanmoins le problème des équipements soutenus à bout de bras par une ville aux moyens limités.

Les musées de Langres, tout comme le Musée Matisse, sont aussi une exception en ce qu’ils sont des musées de beaux-arts au sein d’un classement qui témoigne de la « muséalisation » croissante de tout ce qui relève de près ou de loin du patrimoine. L’Histoire récente avec Péronne, la cité ouvrière à Guise, le Musée Lalique à Wingen-sur-Moder dans le Bas-Rhin (5e), l’Historial de la Vendée aux Lucs-sur-Boulogne (10e), le Musée du jouet à Moirans-en-Montagne dans le Jura (13e), le musée rénové du verre (MusVerre) à Sars-Poterie (Nord) ou le Musée de la bière de Stenay dans la Meuse (35e) figurent parmi ces lieux qui valorisent une histoire, une tradition ou un savoir-faire local moins présents dans les autres classements. Le Musée Lalique s’est ainsi installé dans une ancienne verrerie qui abrite désormais les collections de René Lalique tout en assurant le rayonnement de l’entreprise de luxe. S’il attire peu de scolaires, le grand public ­est toujours au rendez-vous (52 000 personnes). Un score comparable au MusVerre bien que ce dernier n’ait inauguré son extension qu’à l’automne 2016. Un projet ambitieux qui s’ancre dans l’histoire locale, valorise le travail des anciens ouvriers verriers (les « bousillés ») tout en ouvrant une fenêtre sur la création contemporaine.

Musées classiques : de nombreuses pépites
La part importante de musées de société et de savoir-faire ne doit pas masquer la présence malgré tout significative de musées classiques d’art ancien ou contemporain, à l’instar du Musée Matisse. Mais ceux-ci sont freinés par les moyens de leur tutelle lorsqu’elle est communale. Après avoir été rénovés dans les vingt dernières années parce que le bâtiment ou les collections qu’ils abritent ont séduit les édiles, ils ne disposent souvent plus de dotations à hauteur de leurs ambitions initiales, en particulier pour la programmation, alors que le public tend à la mesurer aujourd’hui à l’aune de celle des grands musées. Exception qui confirme la règle, le Musée de Flandre, à Cassel (Nord), un musée départemental qui peut compter sur un large bassin de visiteurs (103 000 habitants dans l’intercommunalité), bénéficie d’un budget pour ses expositions temporaires (390 000 euros) que lui envient ses confrères ; il lui permet de créer une animation régulière qui s’étend au-delà de son cadre géographique. Il n’est dépassé dans ses moyens que par le Musée Gustave-Courbet à Ornans dans le Doubs (34e), encore un musée départemental, entièrement rénové en 2011.

On trouve cependant de remarquables équipements communaux : le Musée de l’Hospice-Saint-Roch à Issoudun (Indre), le Musée d’art moderne de Céret (Pyrénées-Orientales) ou le Musée Champollion à Figeac (Lot), situés pour les deux derniers dans des communes très touristiques donc plus riches, par exemple, que Riom (Puy-de-Dôme) et son Musée Mandet – lequel mérite le détour. Mais s’il est un lieu favorisé dans ce classement, c’est bien le Musée Condé à Chantilly (Oise) qui bénéfice des largesses de l’Agha Kan. Ce qui pourrait apparaître comme une décevante 10e place (ex aequo) est dû au fait que le musée n’a pas souhaité communiquer ses recettes commerciales et ses dépenses liées à la programmation, que l’on imagine pourtant à hauteur des 437 000 visiteurs, un record dans cette catégorie.

Légende photo

Le Musée Matisse au Cateau-Cambrésis (Nord) © Photo Velvet - 2012 - Licence CC BY-SA 3.0

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°480 du 26 mai 2017, avec le titre suivant : Les départements au secours des musées des petites communes

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