Certains Frac adaptent aujourd’hui leur politique d’acquisition pour éviter d’engorger davantage leurs réserves.

Une inflexion inédite dans l’histoire des Fonds régionaux d’art contemporain : si les établissements ont, pendant longtemps, valorisé la qualité artistique des propositions d’acquisition en faisant fi de leur implication en termes d’espace de stockage, nombreux sont ceux qui accordent aujourd’hui une attention égale – voire, parfois, supérieure – à leurs conditions de conservation.
Début 2025, le Frac Pays de la Loire décidait d’acquérir les Sarcophages monumentaux de Thomas Teurlai alors que sa réserve externalisée (900 m²), louée depuis 2020, ne disposait déjà plus que de 30 % d’espace disponible. « C’est cohérent que les Frac puissent accueillir ce type d’œuvres, défend Claire Staebler, car c’est dans leurs missions de pouvoir le faire. » Mais c’est une position à contre-courant de la tendance générale : si les sculptures et les installations font partie des types d’œuvres les plus représentés dans les collections (plus de 6 000 œuvres acquises depuis 1982), rares sont les volumes de grand format à entrer dans les réserves ces dernières années. Au Frac Réunion, une seule œuvre volumineuse a été acquise entre 2022 et 2025, tandis que le Frac Lorraine n’est « plus en capacité d’acheter des sculptures grand format depuis 2019 », déplore Fanny Gonella. Même situation aux Abattoirs : « On n’achète plus d’œuvres monumentales, à part si un projet de dépôt a été déterminé », explique Lauriane Gricourt – et au Frac Franche-Comté, qui demande à son comité technique d’acquisition d’envisager des volumes de dimensions modestes.
Parmi les « perspectives ouvertes par les Frac pour prévenir un phénomène d’obésité des collections, certaines passent par des choix d’acquisitions qui privilégient les formes d’œuvres les plus légères voire les plus dématérialisées », observait la mission prospective sur les Frac, menée par l’IGAC en 2021. À l’instar du Frac Lorraine, qui « collectionne de plus en plus d’œuvres sous forme d’informations ou de données et de moins en moins sous forme d’objets » d’après Fanny Gonella, de nombreux Frac s’intéressent aujourd’hui aux œuvres à protocole et immatérielles en raison du peu d’espace qu’elles requièrent. « On se spécialise dans les œuvres à protocole car cela ne coûte rien en stockage », admet Éric Mangion. Ce type d’œuvre représente aujourd’hui 20 % des acquisitions du Frac de Montpellier chaque année. Un intérêt que partagent depuis peu, et pour les mêmes raisons, le Frac Poitou-Charentes et le Frac-Artothèque Nouvelle-Aquitaine. Au Frac Réunion, « nous limitons les achats à des œuvres numériques, à des photographies sous forme de fichier et aux œuvres à protocole », explique Anna Vrinat, chargée de projets culturels. Cette orientation, impulsée par l’ancienne directrice Béatrice Binoche en 2015, est rappelée à chaque commission d’acquisition.
Si les œuvres sur papier, les tableaux et les petits volumes continuent d’être acquis par les Frac, il est indéniable que cet attrait pour les œuvres à protocole et immatérielles pourrait avoir un réel impact sur l’identité des collections publiques d’art contemporain à long terme.
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Quand le problème des réserves des Frac modifie la politique d’acquisition
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°660 du 5 septembre 2025, avec le titre suivant : Moins d’œuvres volumineuses : quand le problème des réserves modifie la politique d’acquisition








