Centre d'art

Les Ateliers Médicis dans leurs murs

Par Mathieu Oui · Le Journal des Arts

Le 19 février 2018 - 986 mots

CLICHY-MONTFERMEIL

Les Ateliers Médicis Clichy-Montfermeil sont lancés. La première construction marque une étape importante dans ce grand projet culturel de la Seine-Saint-Denis.

Les Ateliers Médicis en cours de construction, à Clichy-Montfermeil
Les Ateliers Médicis en cours de construction, à Clichy-Montfermeil
Photo Niels Briaire
© Atelier Médicis

Après dix années d’annonces ministérielles et de péripéties, les Ateliers Médicis Clichy-Montfermeil sortent finalement de terre. Situé non loin de l’emplacement de l’ancienne tour Utrillo détruite à l’automne 2017, ce bâtiment de bois surmonté d’un chapiteau rouge est presque terminé. L’édifice, signé par l’agence d’architecture Encore Heureux, a été conçu comme la « maison du projet » et un lieu de préfiguration de ce laboratoire de recherche artistique et culturel.

« Amener le meilleur de l’art et de la culture dans un territoire enclavé », c’est l’ambition rappelée par son directeur, Olivier Meneux, lors de la visite du chantier, le 24 janvier dernier. De la référence à la fameuse villa romaine, il faut surtout garder l’« exigence d’excellence, poursuit le directeur. Nous sommes ici sur un territoire d’attente et d’espoir, un territoire de la jeunesse à laquelle on a fait beaucoup de promesses pas toujours tenues. Nous avons une dette politique à son égard. »

Destinée à héberger les dix-sept salariés permanents des Ateliers, la nouvelle construction sera non seulement un lieu de travail, mais elle servira aussi à la présentation et la diffusion des projets artistiques. Elle doit normalement céder la place à un autre bâtiment définitif, situé à 300 mètres de là, près de la prochaine gare de la ligne 16 du Grand Paris Express. L’horizon annoncé est 2024.

Résidences et soutien à la jeune création
Pour l’équipe d’architectes, le défi était de concevoir un bâtiment provisoire mais qui pourrait aussi durer plus longtemps que prévu. Les aléas liés aux chantiers du Grand Paris Express sont dans tous les esprits… Entièrement construit en panneaux de bois préfabriqués, l’édifice est facilement démontable. « Il a été conçu avec l’idée de tester les différents usages des futurs Ateliers », explique Sébastien Eymard, l’architecte. La grande salle du rez-de-chaussée a été pensée dans une optique de polyvalence. Elle peut servir à la fois de lieu de répétition et d’exposition, mais aussi, grâce à son gril technique et ses gradins rétractables, de scène de spectacle (80 places). L’opération, d’un coût de 2,95 millions d’euros, a été financée par l’État, la Région-Île-de-France, la Métropole du Grand Paris, la Fondation Bettencourt-Schueller et le Département de Seine-Saint-Denis.

Les Ateliers se développent dans trois grandes directions : recherche, création, transmission, ce avec la volonté d’aborder toutes les disciplines artistiques et culturelles. Depuis janvier 2017, ils accueillent une douzaine d’artistes et chercheurs en résidence, à Clichy-sous-Bois, Montfermeil, Aulnay-sous-Bois ou Sevran. Sont intervenus la réalisatrice Alice Diop, l’auteur de bandes dessinées Julien Revenu, l’écrivain Mathieu Simonet ou encore le graphiste Malte Martin. Une commande photographique nationale intitulée « Les regards du Grand Paris » a été lancée en 2016 en collaboration avec le Centre national des arts plastiques. Pour la première édition sur le thème « Grand Paris - Ville-monde », dix projets ont été retenus, parmi lesquels ceux de Julie Balagué, Raphaël Dallaporta et Philippe Vasset, Patrizia Di Fiore ou encore Karim Kal. L’opération doit être renouvelée chaque année pendant dix ans.

Le troisième volet de la programmation revêt quant à lui une ampleur nationale. Il s’agit du programme « Création en cours », un dispositif de soutien aux jeunes artistes ou collectifs qui développent un travail de création dans le cadre d’un jumelage avec une école. Après 101 projets soutenus en 2016-2017, les Ateliers Médicis pilotent en 2017-2018 quelque 150 initiatives. Chaque projet retenu reçoit une enveloppe de 10 000 euros et bénéficie de l’accompagnement et du soutien de l’équipe.

Des contours encore à préciser
Si les premières propositions évoquaient une école artistique et une « classe prépa », ces éléments ne figurent plus dans la présentation officielle des Ateliers. « Notre relation à l’enseignement supérieur est un sujet majeur mais qui évolue. Rien n’est tranché pour l’instant », indique Olivier Meneux. Les contours du projet scientifique et culturel devraient être stabilisés d’ici au début de l’année prochaine. Reste une interrogation de taille, celle du calendrier de réalisation de la ligne 16 du métro automatique qui doit relier Noisy-Champs à Saint-Denis Pleyel. C’est un enjeu essentiel pour désenclaver le territoire mais aussi dans la réussite des Ateliers qui ambitionnent d’attirer un public large et non limité au territoire. Annoncée pour 2024, cette ouverture pourrait faire l’objet d’arbitrages gouvernementaux et être repoussée dans le temps. Olivier Meneux est confiant : « Lors de sa venue à Clichy en novembre, le président de la République a annoncé que le calendrier serait respecté. » C’était avant l’abandon des projets de l’aéroport Notre-Dame-des-Landes et de l’Exposition universelle de 2025. Le nouveau bâtiment doit être inauguré en juin prochain.

 

uNE LONGUE GESTATION

Projet « Médicis Clichy-Montfermeil ». C’est en 2008 que les maires des deux communes de Clichy-sous-Bois (Claude Dilain) et Montfermeil (Xavier Lemoine) proposent, aidés par le journaliste Jérôme Bouvier, de créer une résidence d’artistes sur le modèle de la Villa Médicis à Rome. Leur volonté était de modifier l’image d’un territoire meurtri par les émeutes urbaines de 2005. Le projet est présenté au ministre de la Culture Frédéric Mitterrand, qui décide de le soutenir. Un ancien immeuble de bureaux de 13 étages, la tour Utrillo, est retenu pour accueillir cette résidence d’artistes, mais aussi une école dispensant des formations artistiques et culturelles, une salle de projection, une salle de spectacle et des espaces d’exposition. La tour est rachetée par l’État en décembre 2011. Lors de la visite du ministre en février 2012, la réhabilitation annoncée devait coûter « environ 20 millions d’euros » et durer quatre ans. En septembre 2012, la nouvelle ministre de la Culture Aurélie Filippetti revoit le projet à la baisse, précisant qu’il sera « retravaillé » et « redimensionné ». En 2015, Fleur Pellerin, qui lui succède, nomme Olivier Meneux directeur des Ateliers. La même année, il est décidé de détruire la tour et de construire un nouveau lieu plus adapté à l’accueil d’artistes, et qui sera en partie financé par la société du Grand Paris.

 

Mathieu Oui
informations

Le programme sur www.ateliermedicis.fr

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°495 du 16 février 2018, avec le titre suivant : Les Ateliers Médicis dans leurs murs

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