Irak - Unesco

À Mossoul, la reconstruction de la mosquée Al-Nouri va pouvoir commencer

Par Olympe Lemut · Le Journal des Arts

Le 24 février 2022 - 627 mots

MOSSOUL / IRAK

Après trois ans de préparation, l’Unesco vient d’annoncer que les travaux de reconstruction de la mosquée débuteront en mars.

La mosquée Al-Nouri en ruine, vue prise par un drone. © Photo Iconem / UNESCO
La mosquée Al-Nouri en ruine, vue prise par un drone.
© Photo Iconem / UNESCO

Mossoul. Lorsque l’armée irakienne est entrée dans Mossoul en juin 2017, la vieille ville était détruite à près de 80 %, selon une estimation de l’Unesco. Parmi les bâtiments les plus endommagés figure la mosquée Al-Nouri avec son minaret penché, datant du XIIe siècle. C’est dans cette mosquée que le chef de l’organisation État islamique (EI) avait prononcé son célèbre discours de juin 2014 pour proclamer le califat en Irak et en Syrie, avant de la dynamiter en juin 2017 à l’approche des troupes irakiennes.

L’Unesco et les Émirats arabes unis (EAU) coopèrent depuis 2018 pour restaurer ce bâtiment et les EAU financent le projet à hauteur de 50 millions de dollars (44 millions d’euros). Comment expliquer que les travaux aient autant tardé ? Les autorités irakiennes et l’Unesco insistent sur la nécessité de procéder à des « opérations de déminage, des enlèvements de matières dangereuses », et plus largement de déblayer des volumes importants de gravats. Des découvertes archéologiques récentes ont en outre retardé la reconstruction de la mosquée : quatre salles souterraines et des bassins ont été mis au jour par les services archéologiques irakiens.

Pour moderniser la mosquée sans la dénaturer, le gouvernement irakien et l’Unesco ont lancé en novembre 2020 un concours d’architecture, remporté par un collectif de huit architectes égyptiens. C’est leur projet qui va donc guider les travaux de reconstruction prévus pour mars 2022 : plus précisément, la première phase de travaux va concerner le minaret penché, très endommagé par les combats de 2017. La deuxième phase de travaux concernera la mosquée elle-même et plusieurs maisons de la vieille ville, ainsi que deux églises médiévales, avec un financement partiel de l’Union européenne, pour 38,5 millions de dollars (34 M€) selon l’Unesco.

La mosquée Al-Nouri a été construite en 1173 par un émir de la dynastie Atabeg, et son minaret de briques appareillées culminait initialement à 45 mètres de haut. Surnommé « la bossue » (« Al-Hadba » en arabe), le minaret semble avoir souffert de la faiblesse de ses fondations, et des historiens arabes suggèrent qu’il penchait déjà au XIVe siècle. Restaurée par le Département des antiquités d’Irak en 1942, la mosquée n’a conservé de sa structure d’origine que le minaret, lequel n’a cessé de se détériorer. C’est ainsi qu’entre 1980 et 1988 les bombardements iraniens avaient endommagé sa structure déjà fragile. Les destructions ordonnées par l’EI le 21 juin 2017 ont donc porté le coup fatal au bâtiment, qui devrait être totalement restauré courant 2023.

Un monument symbolique

Au total, l’Unesco a mobilisé plus de 120 millions de dollars (105,5 M€) depuis 2018 dans le cadre du programme « Faire revivre l’esprit de Mossoul » porté par sa directrice générale, Audrey Azoulay. Celle-ci fera le déplacement à Mossoul en mars prochain pour lancer les travaux dans la mosquée et constater la rénovation de plusieurs maisons anciennes dans la vieille ville. Côté EAU, c’est la ministre de la Culture et du Tourisme, Noura Al Kaabi, qui pilote le projet dans lequel son pays s’est beaucoup investi. Elle déclarait en 2019 que « la mosquée Al-Nouri fait partie de la ligne d’horizon (de la ville) que les habitants utilisent pour se définir » et regrettait que « les gens se souviennent de cette mosquée comme symbole d’un faux califat ».

À l’approche du début des travaux, le projet des architectes égyptiens ne fait pourtant pas l’unanimité, et comme le soulignait Noura Al Kaabi, si se posent des questions sur « l’angle d’inclinaison du minaret », ce sera « aux autorités irakiennes d’y répondre ». Car la mosquée et son minaret restent un sujet sensible, notamment parce qu’ils figurent sur les billets de 10 000 dinars irakiens : restaurer un monument aussi symbolique comporte des enjeux qui dépassent les questions techniques.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°583 du 18 février 2022, avec le titre suivant : À Mossoul, la reconstruction de la mosquée Al-Nouri va pouvoir commencer

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