Mécénat

Le Louvre et ses Amis

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 17 janvier 2012 - 661 mots

Alors qu’une nouvelle polémique touche le Musée du Louvre, après la décision d’envoyer par solidarité une vingtaine d’œuvres dans trois villes du Japon, dont Fukushima, la Société des amis du musée se lance dans un nouveau type d’opération. Pour la première fois depuis sa création, elle participe à la rénovation d’une des salles consacrées aux arts décoratifs du XVIIIe siècle. Elle ne finançait jusqu’à présent que des acquisitions.

PARIS - C’est une première pour la vénérable Société des amis du Louvre, fondée en 1897. Celle qui est devenue, forte aujourd’hui de près de 70 000 adhérents, l’une des principales sociétés d’amis de musées française a accepté de soutenir le Louvre de manière un peu différente. 3 millions d’euros seront ainsi versés pour financer la restauration d’une salle consacrée aux arts décoratifs du XVIIIe siècle dans un département que le musée est en train de rénover intégralement. En 2006, l’échange avec les musées américains d’Atlanta (Géorgie) et de Denver (Colorado) avait été annoncé comme étant destiné à financer cette opération. Il n’aura toutefois rapporté que 6,5 millions sur un budget global de 26 millions d’euros. Pour boucler son tour de table, le musée a donc dû faire appel à d’autres pourvoyeurs de fonds tels le Cercle Cressent, orchestré par Maryvonne Pinault, les American Friends of the Louvre ou la société Breguet.

Après un an de tractations, la Société des amis du Louvre a consenti, à son tour, à rallier le projet. Cette décision n’allait pourtant pas de soi, la Société n’ayant jusqu’alors financé que des acquisitions. « Nous étions persuadés qu’il s’agissait d’une sorte de règle », explique l’historien et membre de l’Académie française Marc Fumaroli, président de la Société depuis 1996. « En réalité, dans nos statuts, rien ne nous empêche de soutenir autrement le musée. » Il y a dix ans, les Amis avaient pourtant refusé de participer à la restauration de la galerie d’Apollon, par peur d’être noyés dans la masse des mécènes. Si les temps ont changé, l’affaire a été assortie de précautions. Après une étude méticuleuse des maquettes de toutes les period rooms du projet, la décision a été prise de ne financer que de « l’authentique » ; le choix s’est porté sur une pièce « où l’intervention du décorateur – en l’occurrence Jacques Garcia – sera moindre ». C’est donc la chambre au décor Louis XV de l’hôtel de Chevreuse – ou de Luynes –, reconstruite dans ses dimensions d’origine, qui a été retenue. Il fallait par ailleurs que ce financement n’obère en rien la capacité de la Société à poursuivre ses acquisitions. Les versements s’effectueront donc en plusieurs annuités pour cette salle qui deviendra aussi un lieu d’identité pour la Société.

De vrais amateurs
Car si les Amis ont toujours été très généreux, ils étaient jusqu’à présent très discrets. « Nous avons toujours travaillé dans une sorte de clandestinité, mais maintenant, il serait bon que l’on nous connaisse mieux, poursuit Marc Fumaroli. Car nous réunissons le public des vrais amateurs du Louvre, ceux qui y reviennent par goût. »

Depuis 2009, la Société s’attache à accompagner les changements du musée en s’ouvrant davantage à de nouveaux publics, jeunes et familles, évoluant « en pratique mais non en esprit ». Du fait de la crise, sa force de frappe s’est aussi confirmée. En moyenne, les Amis prodiguent en effet, tous les ans, leur générosité à hauteur de 4 millions d’euros, avec des pointes, en 2008 puis en 2010, à plus de 7 millions d’euros, soit l’équivalent du budget d’achat du musée. Cela sur un volume global de mécénat en faveur du Louvre qui oscille entre 20 et 25 millions d’euros, soit 10 % du budget du musée (200 millions, financés pour moitié par l’État).

La trésorerie de la Société est d’abord alimentée par les cotisations des membres, mais aussi par des dons et legs. De quoi perpétuer une tradition de mécénat collectif par le don, auquel les Amis restent très attachés, et qui fait désormais des émules.

Légende photo

Jean Marot, L'Hôtel de Chevreuse, 1727, in Architecture françoise, gravure. Photo D.R.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°361 du 20 janvier 2012, avec le titre suivant : Le Louvre et ses Amis

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