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PATRIMOINE NATUREL

Le Conservatoire du littoral veut protéger 30 % des côtes

Par Olympe Lemut · Le Journal des Arts

Le 3 juillet 2025 - 804 mots

L’opérateur public créé en 1975 renforce sa stratégie de protection du littoral dans le contexte du changement climatique et d’une augmentation du tourisme.

France. Comme l’a illustré récemment la fermeture des falaises d’Étretat en Normandie, les sites côtiers sont soumis à des pressions multiples que le tourisme aggrave. Et le changement climatique y contribue également, y compris sur les rivages lacustres : le Conservatoire du littoral s’occupe en effet également des lacs de plus de 1 000 hectares. Il est le principal opérateur public chargé des côtes et des rivages, avec un budget annuel de 64 millions d’euros (dont 68 % de ressources propres), et il participe à l’élaboration des politiques publiques. À ce jour, le Conservatoire est propriétaire de 22 000 hectares, soit 19 % des côtes et rivages français (y compris les Outre-mer). En pratique, il acquiert pour le compte de l’État des parcelles (regroupées en unités littorales, au nombre de 147 en 2025) repérées comme « fragiles » et nécessitant une protection. Pascal Cavallin, responsable de la mission Patrimoine naturel au Conservatoire du littoral, explique que le processus comprend « une veille foncière » sur des périmètres géographiques avec « des intentions d’intervention » soumises aux communes concernées. Après validation, le projet est soumis au vote du conseil d’administration du Conservatoire. L’opérateur procède alors à l’acquisition foncière, le plus souvent « à l’amiable » selon le Conservatoire du littoral. Les critères retenus pour définir un périmètre à protéger sont « la qualité des milieux naturels, les paysages emblématiques à conserver, le patrimoine culturel », indique Pascal Cavallin, ainsi que les usages qui en sont faits par les habitants. La gestion de la parcelle est ensuite confiée à une collectivité, à l’Office de la biodiversité ou à une association locale. Les quelque 900 agents et gardes du littoral sont employés par les organismes gestionnaires.

C’est un mode de collaboration efficace, assorti d’une veille des sites les plus à risque. Depuis 2005, le Conservatoire publie une stratégie d’intervention à long terme sur les périmètres qu’il juge fragiles, et affiche l’ambition de protéger 30 % des côtes en 2050. Parmi les orientations stratégiques, l’engagement à rester « au service du site » gagne en importance dans un contexte de changement climatique et de tourisme excessif : en cas de risque d’incendie, cela signifie fermer le site aux visiteurs, même en pleine période touristique. Chacun bénéficie d’un plan de gestion élaboré avec la collectivité ou l’association qui le gère. Nathan Barthélémy, responsable de la mission Paysage, précise que cela peut amener à revoir les parcours de visite, ou à restreindre les horaires d’accès : ainsi au cap Fréhel (Côtes-d’Armor), où les heures d’ouverture et le parcours ont été modifiés.

D’après Adrien Privat, responsable de la mission Interface terre-mer, un lac sera fermé aux touristes si son eau est contaminée en raison de températures élevées, ou à cause d’une salinisation des sols. Il note « une problématique générale d’accueil du public » en été sur les sites du Conservatoire. Problématique dont les élus locaux réunis en association sont conscients comme en témoigne leur communiqué de presse diffusé le 17 juin dernier, dans lequel ils relèvent « une fréquentation toujours plus importante » des sites protégés. Ils affirment par ailleurs leur soutien à l’opérateur, et rappellent son rôle dans la protection « des richesses écologiques, paysagères et patrimoniales » du littoral français.

Le paysage, un point d’entrée

La stratégie des gestionnaires de sites aidés par le Conservatoire doit en effet prendre en compte l’environnement, le patrimoine naturel et le paysage. Ce dernier est décrit par Nathan Barthélémy comme un point d’entrée pour le grand public et les élus vers les enjeux de préservation : « Tout le monde peut se projeter à long terme dans un paysage, qui est une expérience sensible de la nature. » Ce paysage peut comporter des bâtiments – le Conservatoire compte près de cent monuments historiques sur ses parcelles. À travers la notion de paysage, il est plus facile d’aborder les enjeux environnementaux qui affectent une plage, une zone humide ou un lac, et de développer une réflexion sur le patrimoine naturel.

Pascal Cavallin insiste sur la nécessité d’un plan de gestion pensé « sur le temps long et avec une notion d’adaptation, dans le respect de l’esprit des lieux ». Cette démarche doit permettre aux gestionnaires de concilier les usages par les habitants (agriculture, loisirs) avec la protection du site, y compris dans ses caractéristiques physiques. Adrien Privat donne l’exemple de milieux ouverts où les gestionnaires ont planté des rangées d’arbres pour plus de fraîcheur en été, au risque de modifier le paysage et la biodiversité. Outre une vision à long terme, le Conservatoire s’oriente vers des actions qui englobent les zones attenantes aux parcelles. Comme l’explique Nathan Barthélémy, « le paysage ou le sentier littoral ne s’arrêtent pas aux frontières du site ». Une réflexion à l’échelle des unités littorales est donc en cours pour renforcer les actions du Conservatoire et accélérer la protection des périmètres fragiles.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°659 du 4 juillet 2025, avec le titre suivant : Le Conservatoire du littoral veut protéger 30 % des côtes

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