Justice

Photographie des œuvres, la justice donne raison au Louvre

PARIS

Le musée peut légitimement interdire à ses visiteurs de photographier ou filmer les œuvres présentées dans ses expositions temporaires.

Le règlement du Louvre permet de prendre des photos  dans les salles permanentes, mais pas dans les expositions temporaires. © Photo Pxhere.
Le règlement du Louvre permet de prendre des photos dans les salles permanentes, mais pas dans les expositions temporaires.
© Photo Pxhere

Paris. À l’heure des réseaux sociaux et des photos réalisées avec un smartphone, le jugement du tribunal administratif de Paris du 28 mai dernier en faveur du Musée du Louvre relance le débat sur l’interdiction de photographier ou de filmer les œuvres présentées dans le cadre d’expositions temporaires.

En 2017, une journaliste s’était vu interdire de photographier des œuvres lors de sa visite des expositions « Vermeer » et « Valentin de Boulogne ». Les agents du Musée du Louvre lui avaient indiqué que cela était expressément prohibé pour les œuvres exposées « dans les salles d’expositions temporaires et de la Petite Galerie », contrairement à celles figurant dans les collections permanentes.

Malgré sa demande, le musée refusa d’abroger l’alinéa de son règlement de visite interdisant la prise de vue, pour des motifs tenant à la sécurité des usagers et des œuvres, au respect des vœux de non-reproduction des propriétaires ainsi qu’au bon fonctionnement du service public.

Des exigences de sécurité pour le public et pour les œuvres

La journaliste engagea alors un recours afin d’obtenir l’annulation de la décision du musée devant le tribunal administratif de Paris, auquel se sont joints l’association Wikimédia France et le collectif SavoirsCom1. Pour la plaignante, cette interdiction est totalement disproportionnée. Les expositions temporaires pourraient être organisées « dans des espaces plus vastes, susceptibles d’être plus facilement sécurisés et avec un renforcement des équipes d’agents de sécurité ». L’interdiction porte atteinte, de plus, à la liberté de création des utilisateurs ainsi qu’au droit d’accès aux œuvres. Enfin, elle va à l’encontre du droit d’auteur, puisqu’une œuvre tombée dans le domaine public – soixante-dix ans après la mort de l’auteur – est libre de tout droit et, qu’un visiteur peut, en tout état de cause, librement effectuer des prises de vue pour son usage personnel en recourant à la copie privée. Le tribunal a, toutefois, rejeté intégralement ses demandes. Selon la cour, le musée a le droit de restreindre la liberté de ses visiteurs car ses expositions temporaires, présentées « au sein d’espaces d’une superficie limitée à 2 % de la superficie totale du Musée du Louvre, nécessitent une limitation du nombre de personnes susceptibles de les visiter simultanément afin d’assurer une gestion des flux compatible avec les exigences de sécurité du public et des œuvres ». Par ailleurs, cette interdiction ne constitue pas une atteinte disproportionnée au principe de la liberté de création – vu qu’elle est limitée aux seules œuvres des expositions temporaires, qui, de surcroît, peuvent être photographiées sur autorisation –, ni ne restreint l’accès aux œuvres.

Enfin, il écarte les dispositions du code de la propriété intellectuelle qui ne peuvent s’opposer à ce que « l’administration définisse les conditions de visite de ses locaux par un règlement de visite, [lequel] constitue le règlement d’organisation d’un service public administratif ».

Ce jugement, qui peut encore faire l’objet d’un appel, surprend d’autant plus que, depuis 2014, le ministère de la Culture incite les visiteurs d’établissements patrimoniaux à devenir « Tous photographes ! ».

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°525 du 7 juin 2019, avec le titre suivant : Photographie des œuvres, la justice donne raison au Louvre

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