Musée

Mantes mise sur Maximilien Luce

Par Francine Guillou · Le Journal des Arts

Le 20 février 2019 - 732 mots

MANTES-LA-JOLIE

Fermé depuis 2017, le Musée de Mantes-la-Jolie rouvre, offrant un parcours permanent autour du peintre néo-impressionniste Maximilien Luce dont il conserve un ensemble important depuis la donation de Frédéric Luce.

Maximilien Luce, <em>La Gare de l'Est sous la neige</em>, 1917, huile sur toile, 162 x 130 cm. Photo : Ville de Mantes-la-Jolie
Maximilien Luce, La Gare de l'Est sous la neige, 1917, huile sur toile, 162 x 130 cm.
© Photo : Ville de Mantes-la-Jolie

Mantes-la-Jolie (Yvelines). C’est un chantier modeste, mais dont l’impact pourrait bouleverser la notoriété du Musée de l’hôtel-Dieu - Maximilien-Luce à Mantes-la-Jolie, qui rouvre le 16 février après un an et demi de travaux. Désormais, le musée consacre la majeure partie de son parcours permanent aux œuvres de Maximilien Luce (1858-1941), peintre néo-impressionniste, anarchiste et libertaire, ami de Van Dongen, Seurat, Signac ou Pissarro [voir ill.].

Le musée municipal, installé depuis 1996 dans l’hôtel-Dieu, à deux pas de la collégiale Notre-Dame, bijou gothique des XIIe et XIIIe siècles, avait besoin d’une nouvelle impulsion et d’une rénovation du bâti. « Le bâtiment posait des problèmes de conservation, l’humidité était devenue problématique », souligne Jeanne Paquet, attachée de conservation du musée. « Il fallait redonner au musée des arguments, cela faisait des années qu’il était en sommeil», explique le maire (LR) Raphaël Cognet.

Après un chantier de 1,3 million d’euros et une reprise de la scénographie dégageant un espace de 200 m2 pour les expositions temporaires, le musée mise tout sur le peintre Maximilien Luce.

Le Musée de l'Hôtel-Dieu, à Mantes-la-Jolie. Crédit : ville de Mantes-la-Jolie
Le Musée de l'Hôtel-Dieu, à Mantes-la-Jolie
© Ville de Mantes-la-Jolie

Une collection jusqu’ici peu visible

Le destin des collections mantaises a basculé en 1971 lors du don par Frédéric Luce d’œuvres de son père, Maximilien, à la Ville de Mantes. La collection initiale comporte 121 œuvres de Maximilien Luce : 69 tableaux, 21 gravures, 31 dessins, ainsi que quatre portraits de l’artiste par ses proches dont un très beau Kees van Dongen. Luce était un connaisseur du Pays mantais, ayant fait l’acquisition en 1917 d’une petite maison à quelques kilomètres de la ville. Aujourd’hui, le musée conserve plus de 350 œuvres du peintre, dont près de 90 tableaux : « Municipalité après municipalité, Mantes achète ses œuvres depuis le don de 1971. Maximilien Luce est devenu une part d’histoire de la ville ! », souligne Raphaël Cognet. Or la collection Luce n’était montrée que par roulement, lors d’expositions temporaires. Alors que la collection mantaise ne figure pas sur la Base Joconde, le catalogue numérique des collections des musées de France, les amateurs de Luce pouvaient trouver salles vides ou portes closes entre deux expositions. D’où le choix d’aménager une vraie exposition permanente pour ce peintre mis en lumière en 2010 lors d’une belle rétrospective au Musée des impressionnismes à Giverny.

Une œuvre de belle facture de Camille Corot ouvre le parcours : prêt de la Ville de Rosny-sur-Seine (Yvelines), La Fuite en Égypte (1840) vient d’être restaurée par la fondation La Sauvegarde de l’art français : « Rosny n’avait pas de lieu pour montrer l’œuvre dans de bonnes conditions, et Luce était un grand amateur de Corot », indique Jeanne Paquet. Doté d’un corpus riche et foisonnant (le quatrième tome de son catalogue raisonné est en cours), Luce est exposé à Mantes dans la diversité de sa production à travers 77 pièces : œuvres néo-impressionnistes des années 1880-1890, caricatures anarchistes et dessins politiques, peintures d’histoire lors de la Grande Guerre, scènes de chantiers parisiens sous Haussmann…

L’œuvre de Luce est protéiforme. En 1893, alors même que le peintre exécute de placides paysages aux accents acidulés et à la touche déconstruite propre aux néo-impressionnistes, il est enfermé quelques heures par les autorités, soupçonné d’avoir des liens avec l’assassin du président Sadi Carnot. Ses affinités anarchistes transparaissent encore en 1917 dans ses représentations antimilitaristes de la guerre. À la fin de sa vie, dans les années 1920-1930, il reprend une touche impressionniste, alors dépassée par la jeune génération et ses avant-gardes.

Le parcours, entre toiles peintes et œuvres sur papier, est dorénavant baigné de lumière naturelle : les baies de la chapelle, obstruées en 1996, ont retrouvé leur fonction et offrent une vue de choix sur les contreforts gothiques de la collégiale et les berges de la Seine. C’est en ces berges que le maire place ses espoirs, avec la construction d’une nouvelle halte fluviale pour l’accueil des croisiéristes et d’une passerelle pour la mobilité douce des habitants. « Nous avons des objectifs réalistes : à 50 km de Paris, ce ne sera jamais un musée international. Mais nous construisons des parcours, nous collaborons avec les autres musées des Yvelines, et nous voulons ouvrir la ville vers le fleuve », insiste l’édile, qui louche sur les centaines de milliers de croisiéristes qui, chaque année, longent le fleuve en direction de Giverny.

Musée de l’Hôtel-Dieu,
1, rue Thiers, 78200 Mantes-la-Jolie

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°517 du 15 février 2019, avec le titre suivant : Mantes mise sur Maximilien Luce

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