Sans subventions, elles traversent une crise financière majeure, contraignant certaines à instaurer un droit d’entrée.

Angleterre. Outre-Manche, les budgets publics français pour la restauration des cathédrales laissent rêveurs les responsables des édifices religieux. Alors que la religion est d’État en Angleterre, aucune enveloppe publique n’est prévue de façon annuelle. « Pour des raisons historiques, toutes ces cathédrales fonctionnent comme des organismes caritatifs. Elles sont décentralisées et gèrent des diocèses qui ont leur propre budget et qui collectent des fonds chacun à leur manière », explique Ben Sims, le directeur de la collecte de fonds et des affaires publiques de la National Churches Trust (NCT). La NCT a pour mission de fournir une assistance financière aux églises pour des réparations d’urgence. Si les cathédrales étaient exclues de ce dispositif jusqu’en 2024, les administrateurs ont voté pour une modification de leurs statuts et les y intégrer, du fait des grandes difficultés financières rencontrées par les édifices religieux. Mais en 2023, le budget d’aides de l’organisme était de 2 millions de livres (2,36 M€) seulement.« Nous sommes loin de pouvoir couvrir les besoins des cathédrales », commente-t-il.
Pour contribuer à leur entretien, dans les années 1980, certaines cathédrales anglicanes ont décidé de mettre en place un système de billetterie pour les touristes, tout en gardant un accès libre pour les personnes qui veulent prier ou assister à un service. Aujourd’hui, sur les 42 cathédrales qui dépendent de l’Église d’Angleterre, huit ont mis en place une entrée payante pour les touristes, avec un prix standard moyen de 17,7 livres, soit plus de 20 euros. L’abbaye de Westminster, qui n’est pas en soi une cathédrale et qui dépend directement du roi, le chef de l’Église anglicane, présente la visite la plus chère de toutes, avec une entrée à 30 livres (35 €). Ses coûts de fonctionnement annuels s’élèvent à 24 millions de livres (28 M€).

En fonction de l’attractivité touristique, la situation financière de ces cathédrales varie donc beaucoup d’un établissement à l’autre. Mais depuis la pandémie de Covid 19, même les cathédrales qui ont mis en place un billet d’entrée ont fait face à des difficultés financières, du fait de l’inflation, de la hausse des coûts des matériaux de réparation et de la main-d’œuvre. « Il y a eu aussi une baisse générale du nombre de personnes qui fréquentent les églises, ce qui a contribué à réduire le nombre de donneurs », précise Ben Sims. La cathédrale d’Ely, dans l’est de l’Angleterre, a décidé d’augmenter son billet standard de 9 livres à 14 livres (16,50 €) en janvier dernier. Elle était l’une des premières à avoir mis en place une billetterie en 1987, pour éviter la fermeture. La cathédrale Saint-Paul, qui attire autour 1,5 million de visiteurs par an, a récemment augmenté ses tarifs de 25 à 26 livres (30,5 €).
Depuis avril 2024, un nouveau poids est venu s’ajouter au budget des cathédrales. « Il existait un dispositif qui remboursait la TVA pour les travaux dans les lieux de culte classés, mais il vient d’être plafonné à 25 000 livres (29 400 €), indique Ben Sims. Si vous avez un projet de réparation de 10 millions de livres (12 M€), du jour au lendemain, vous avez à payer 2 millions de livres (2,36 M€) de TVA. » Ce plafonnement est mis en place pour un an, mais l’avenir du dispositif est incertain.
Face à cette situation, certaines des cathédrales non payantes réfléchissent à la mise en place d’un système de billetterie. En avril, la cathédrale de Peterborough (à l’est de l’Angleterre) a réussi de justesse à lever 300 000 livres (353 000 €) en avril pour éviter de faire payer ses entrées aux touristes. « L’Église d’Angleterre avait même commencé à discuter de ce qui se passerait si une cathédrale devait fermer, indique Ben Sims. Que fait-on du bâtiment ? C’est un territoire inexploré, mais nous devons y penser en raison des difficultés rencontrées par certaines cathédrales. »
Le directeur estime ainsi que le gouvernement britannique devrait prendre ses responsabilités. «C’est l’une des plus grandes crises du patrimoine que nous rencontrons, la moitié de nos bâtiments les plus importants en termes de classement sont des églises et des cathédrales. Certaines sont vendues, d’autres se dégradent. » Informé du plan du président Emmanuel Macron pour collecter 200 millions d’euros pour le patrimoine religieux, Ben Sims aimerait que soit mis en place, outre-Manche, un financement de contrepartie par le gouvernement pour les dons effectués pour les bâtiments religieux.
Il existe d’autres organismes ou mécanismes publics qui soutiennent de façon ponctuelle les cathédrales, comme le Fonds de durabilité des cathédrales, mais les aides financières fournies ne proviennent pas de subventions directes de l’État. À partir de 1977, le gouvernement avait commencé à donner des subventions aux cathédrales et aux églises pour des projets de réparation spécifiques, mais ce système de bourse a été supprimé en 2017 du fait de changement de priorités du budget de la culture. « Aujourd’hui, l’une des rares options de financement de l’État est la Loterie nationale», rappelle Ben Sims. En 2024, l’organisme a annoncé un programme de subventions pour le patrimoine religieux de 85 millions de livres (100 M€) sur trois ans, mais il concerne tous les lieux de culte, et non exclusivement les cathédrales.
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Les cathédrales britanniques peinent à se financer
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°656 du 23 mai 2025, avec le titre suivant : Les cathédrales britanniques peinent à se financer







