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Le Musée Picasso prend un nouvel envol

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 28 octobre 2014 - 777 mots

Si l’enveloppe a peu changé, la restructuration intérieure du Musée Picasso, qui vient de rouvrir après cinq années de travaux, renouvelle l’expérience de la visite.

PARIS - Maintes fois annoncée, maintes fois repoussée, la réouverture du Musée national Picasso-Paris a enfin eu lieu en présence de François Hollande, qui venait d’inaugurer la Fondation Vuitton quelques jours auparavant. Jusqu’à la dernière minute, les équipes du musée s’affairaient encore avec fébrilité, contrastant avec l’impression d’ordre et de calme qui flottait sur le bâtiment de Frank Gehry. Fort heureusement, les négociations entre le ministère et Anne Baldassari, évincée en mai dernier, avaient abouti in extremis fin août, permettant à l’ancienne directrice d’assurer l’accrochage, enlevant du même coup une épine du pied de son remplaçant, Laurent Le Bon.

De l’extérieur, l’hôtel Salé a peu changé : nulle nouvelle aile audacieuse et même la construction d’un niveau technique le long des jardins, qui a fait couler beaucoup d’encre, s’intègre sans trop de difficultés avec la structure existante. Les façades et décors extérieurs avaient cependant été restaurés entre 2006 et 2009 avant la fermeture du musée en 2009. Mais à l’intérieur, tout a changé offrant un confort de visite grandement amélioré. Dès l’entrée, le ton est donné. Transféré dans les communs, libérant ainsi le grand escalier, l’espace d’accueil sur deux niveaux est plus vaste, permettant de loger un comptoir de ventes d’ouvrages et de souvenirs en attendant l’ouverture l’an prochain d’une librairie plus importante dans un immeuble qui fait face au portail de la rue de Thorigny. Une cafétéria, naturellement appelée Le Café sur le Toit, a même pu être installée au premier étage au-dessus de l’accueil.

De nouveaux espaces d’exposition
Les espaces d’exposition ont été considérablement étendus et se déploient dorénavant du sous-sol aux combles sur les cinq niveaux du corps principal du bâtiment. Ils ont été doublés, passant de 1 600 m² à 3 800 m², occupant avec les lieux de circulation et d’animation la presque totalité du bâtiment soit 5 500 m². Cette extension a principalement été rendue possible par le déménagement des services administratifs dans un immeuble proche acquis en 2011, mais aussi par le dégagement en sous-sol de volumes offrant un nouveau parcours de visite. Ces aménagements offrent une fluidité sans commune mesure avec la circulation tortueuse précédente auxquels s’ajoutent une accessibilité totale aux fauteuils roulants et une climatisation rénovée. L’architecte des travaux, Jean-François Bodin a su conserver l’esprit de la transformation en musée de l’hôtel Salé, réalisée en 1985 par Roland Simounet : de grandes boîtes blanches masquant la structure intérieure historique d’un site classé, dont il ne subsiste qu’une seule salle avec des boiseries XVIIe remontées et désormais accessibles au public. En ajoutant espaces, enfilades et ouvertures, l’architecte offre une déambulation libre et spacieuse dans l’écrin et l’intimité d’un bâti ancien. Ce sont 400 œuvres qui sont maintenant exposées, parmi les 5 000 de la collection constituées principalement par la dation en paiement des droits de succession de Picasso. Les linéaments d’une œuvre complexe sont ainsi mieux présentés. Le parcours   gagne en lisibilité et le visiteur en confort.

Un confort relatif cependant. Même si la jauge a été doublée, passant de 380 visiteurs à l’instant « T » à 650 visiteurs aujourd’hui, et que le centre des salles a été libéré de tout mobilier afin de faciliter la circulation, il sera difficile de se sentir seul parmi les plus de 700 000 visiteurs attendus la première année. D’autant que malheureusement, les horaires restent ceux d’une administration. À l’exception d’une nocturne (si l’on peut dire) jusqu’à 21 heures un vendredi par mois (!), le musée ferme à 18 heures et le visiteur est poussé vers la sortie à partir de 17h45. Les horaires sont même amputés du mardi au vendredi d’une plage 9h30-11h30, réservée comme dans les piscines municipales, aux scolaires. En décidant d’internaliser la quarantaine d’agents de surveillance, alors que le musée avait l’occasion de faire appel à des sous-traitants comme au Quai Branly, la précédente ministre de la Culture n’a pas rendu service au musée. Aux beaux jours, les visiteurs pourront se consoler de ces petites contrariétés en profitant du jardin, débarrassé d’une pergola qui ennuyait fort les riverains et la réglementation en attendant qu’un jour les deux parcs aujourd’hui séparés par une grille, le jardin de l’hôtel Salé et le jardin public soient réunis comme l’ambitionne Laurent Le Bon. Pour l’heure, le nouveau président, certes contraint par les procédures d’appel d’offres, a peu modifié les grandes orientations d’Anne Baldassari, l’invitation à Miquel Barcelo pour inaugurer le cycle des expositions temporaires a même été maintenue, quoique repoussée à 2016. Il lui faut cependant très vite trouver un lieu pour un centre de recherche sur Picasso.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°422 du 31 octobre 2014, avec le titre suivant : Le Musée Picasso prend un nouvel envol

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