Église - Restauration

CATHÉDRALE SAINT-BÉNIGNE

La cathédrale de Dijon poursuit sa restauration

Par Marion Krauze · Le Journal des Arts

Le 26 février 2025 - 875 mots

Après sa sacristie et sa crypte, commence la délicate opération de la restauration de la flèche de l’édifice, laquelle penche et s’affaisse. Un chantier qui devrait durer jusqu’en 2030.

Façade ouest de la Cathédrale Saint-Bénigne de Dijon. © David Monniaux, 2005, CC BY-SA 3.0
Façade ouest de la Cathédrale Saint-Bénigne de Dijon.

Dijon (Côte-d’Or). À Dijon, la restauration de la cathédrale Saint-Bénigne a franchi une nouvelle étape. Quelques mois après avoir rouvert sa crypte et sa sacristie au terme de quatre années de travaux, le monument se lance dans un nouveau chantier d’envergure : la restauration de son imposante flèche, construite par l’architecte Charles Suisse en 1894. « Une opération exceptionnelle qui mobilisera des savoir-faire rares et précieux », a salué la ministre de la Culture, Rachida Dati, qui, lors de sa visite à Dijon début janvier, a officialisé la prise en charge intégrale des travaux par l’État, dans le cadre du « plan cathédrales ». Soit un engagement à hauteur de 22 millions d’euros au total (4,2 millions d’euros ont déjà été versés à la Drac [direction régionale des Affaires culturelles] Bourgogne - Franche-Comté en 2024).

Le chantier de restauration s’annonce à la fois long et compliqué. Prévu pour durer cinq ans (durant lesquels la cathédrale restera ouverte), il nécessite de démonter intégralement la flèche, très fragilisée par des infiltrations et par les défauts structurels de sa charpente. « Elle a été conçue avec une certaine hardiesse, certains de ses assemblages ont rompu car ils étaient trop faibles par rapport au poids de la flèche. La charpente s’est donc très fortement déformée en partie basse », précise l’architecte Martin Bacot, chargé de la maîtrise d’œuvre. Par conséquent, la flèche penche d’environ 70 cm et s’est affaissée d’à peu près 25. Ces ruptures inquiétantes, repérées en 2020, ont nécessité de consolider provisoirement l’ouvrage à l’aide de poutres métalliques, dans l’attente du lancement du chantier prévu au cours du premier semestre 2026.

Une flèche de 93 mètres de hauteur

Chef-d’œuvre d’architecture néogothique, la flèche s’élève à 93 m de hauteur : c’est la deuxième plus haute charpente en bois de France, juste après celle de Notre-Dame de Paris. « C’est donc un véritable sujet ne serait-ce que d’installer ce chantier, puisqu’il va falloir échafauder la flèche sur toute sa hauteur, et même au-delà. Donc un échafaudage d’à peu près 100 m de haut va venir entièrement la corseter », souligne Laurent Barrenechea, conservateur régional des monuments historiques à la Drac, qui assure la maîtrise d’ouvrage. Il faudra ensuite deux ans – de 2026 à 2028 – pour démonter la flèche, pièce par pièce. « Puisque ce sont surtout les bois au niveau de sa base qui sont altérés, on est obligé de déposer chacune des 600 pièces qui composent la flèche, explique Martin Bacot. Environ 25 % de ces pièces sont à remplacer. Et certaines atteignent jusqu’à 17 m de long ! En ce moment, on parcourt les forêts de France pour abattre des bois et les faire sécher car des pièces d’une telle dimension ne se trouvent pas dans le commerce. »

Une fois déposées, les pièces seront restaurées en atelier et celles défaillantes, remplacées, avec quelques améliorations et renforcements pour assurer la pérennité de l’ouvrage. Puis l’ensemble devrait être remonté de 2029 à 2030. « C’est un chantier à la fois effrayant et extrêmement motivant et galvanisant, confie Laurent Barrenechea. Depuis le XIXe siècle, on n’a jamais restauré de cette façon, je pense, un ouvrage de charpente d’une telle dimension en France ! » [À Notre-Dame il s’agit d’une reconstruction, ndlr]

La crypte et la sacristie rouvertes depuis l’été 2024

Ce chantier d’envergure s’inscrit dans la droite ligne de celui mené pour restaurer la crypte et la sacristie de la cathédrale, rouvertes au public depuis juillet 2024. « Les parties les plus spectaculaires, les plus intéressantes pour l’histoire de cette cathédrale, ce sont sa flèche et sa crypte. Donc finalement sa partie la plus haute et récente, et sa partie la plus basse et ancienne », constate Laurent Barrenechea. De fait, la crypte est l’unique vestige de l’église romane abbatiale en rotonde, construite à partir de l’an mille. La rotonde comptait à l’origine trois niveaux, dont les deux supérieurs ont été détruits durant la Révolution. Son niveau inférieur, qui avait été remblayé, n’a été redécouvert puis restauré qu’au XIXe siècle lorsqu’une sacristie a été construite au-dessus. « Depuis, il n’y avait pas eu d’intervention au niveau de la rotonde, qui, tout comme la sacristie, s’est considérablement dégradée à cause d’infiltrations d’eau », rapporte Martin Bacot, qui a également assuré la maîtrise d’œuvre de ces travaux.

L’État a ainsi engagé 7,9 millions d’euros (dont 2,6 au titre du plan France Relance) pour cette restauration d’urgence, menée de 2020 à 2024. Toute l’étanchéité a été refaite en retraitant le système d’évacuation d’eau. La sacristie, qui avait perdu une grande partie de son décor, a retrouvé son ornementation néogothique d’origine (recréation des vitraux, restitution des décors sculptés…). Débarrassée de ses joints en ciment et autres aménagements un peu indélicats du XXe siècle, la crypte a aussi fait l’objet de fouilles archéologiques, au terme desquelles plusieurs vestiges ont été retrouvés. « On a découvert les vestiges de deux anciens escaliers d’accès dont on avait totalement perdu la trace », précise Laurent Barrenechea. Une volée de marches y a été ajoutée pour figurer l’escalier qui conduisait aux étages. Autre axe important du chantier, la création de puits de lumière et d’une ouverture circulaire, qui ont redonné à la crypte son éclairage naturel.

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°649 du 14 février 2025, avec le titre suivant : La cathédrale de Dijon poursuit sa restauration

Tous les articles dans Patrimoine

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque