Politique culturelle - Société

Éditorial

Malraux, Lang et maintenant le numérique

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 14 mai 2021 - 370 mots

MONDE

Malraux et Lang n’ont pas épuisé les possibles d’une politique culturelle ambitieuse.

Visite virtuelle de l'exposition Cindy Sherman à la Fondation Vuitton. © Fondation Louis Vuitton
Visite virtuelle de l'exposition Cindy Sherman à la Fondation Vuitton.
© Fondation Louis Vuitton

Si les grandes missions du ministère de la Culture que sont la protection du patrimoine, le soutien à la création et la démocratisation culturelle restent l’essence même de toute politique, elles doivent aujourd’hui composer avec une révolution systémique : le numérique.

La consommation de culture s’est considérablement déplacée vers les écrans à mesure que la planète se connecte à Internet. 60 % des humains utilisent aujourd’hui le Web et presque autant les réseaux sociaux. Le rapport à la culture se scinde, à des degrés divers, entre la consommation individuelle sur écran (de « canapé ») et la consommation collective en salle. La musique a été la première à éprouver cette mutation, avec d’un côté les plateformes Deezer ou Spotify et de l’autre les concerts. La crise sanitaire va accélérer la montée en puissance de Netflix au détriment des salles de cinéma. L’art ne va pas échapper à cette transformation et bientôt chaque musée mettra en ligne une visite virtuelle de ses expositions en salle, comme le font aujourd’hui les foires d’art contemporain. L’enseignement va aussi migrer massivement en ligne. Dans tous ces domaines, la pratique en « présentiel » va bien sûr rester forte, mais elle va devoir faire de la place au « distanciel ».

Cette révolution, qui génère de nouveaux formats (ainsi les réseaux sociaux habituent les jeunes à consommer des « instants » de culture sous la forme de clips ou de montages courts), soulève des enjeux considérables pour les États. L’enjeu est juridique : les NFT « découplent » par exemple la reproduction de l’œuvre du droit de propriété. L’enjeu est économique avec la (non)-rémunération des créateurs lorsque leurs œuvres sont diffusées sur Google et Facebook. L’enjeu se pose enfin sur le plan de la souveraineté nationale. Quelle place pour la culture française lorsque l’anglais est la langue dominante du Net ? Que va devenir l’exception culturelle française si les plateformes ne contribuent pas pour une juste part à la création française ? Demain une exposition virtuelle sur Manet organisée par le Met de New York, et sous-titrée en français, viendra concurrencer une exposition en salle au Musée d’Orsay.

Le numérique avec ses menaces et ses opportunités est bien la « nouvelle frontière » de ce siècle.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°567 du 14 mai 2021, avec le titre suivant : Malraux, Lang et maintenant le numérique

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