Société

Éditorial

Un ordre international fracturé

Par Jean-Christophe Castelain · Le Journal des Arts

Le 11 décembre 2025 - 387 mots

Rétrospective. En 2025 encore il est difficile de désigner un fait artistique ou patrimonial qui symboliserait l’année écoulée alors que le contexte général est si prégnant et oppressant, avec des répercussions dans le monde culturel.

Une figure méphistophélique s’impose, celle de Donald Trump. Des premiers executive orders signés le jour même de son investiture au tout récent mémorandum sur la « stratégie de sécurité nationale américaine », le président américain n’a eu de cesse de prôner le désengagement de son pays des organisations internationales : Usaid (Agence des États-Unis pour le développement international), OMS, accord de Paris sur le climat, Unesco. Il démolit méticuleusement le multilatéralisme au profit d’un rapport de force bilatéral dont les Ukrainiens et les Gazaouis sont les premières victimes, et, dans un registre moins sanglant, il se délie d’une Organisation mondiale du commerce vidée de sa raison d’être au profit de guerres sur les tarifs douaniers dont le marché de l’art n’a pas encore pris la mesure. Son penchant pour l’autocratie le rapproche de deux dictateurs, Poutine et Xi Jinping ; ils sont tous trois unis dans une détestation de l’Europe et de ses valeurs. La guerre civilisationnelle que mènent les trois hommes est une guerre culturelle, où le hard power a remplacé le soft power. Tout est bon pour discréditer la vieille Europe, y compris le braquage du Louvre qui serait le symbole de cette décrépitude.

Tout aussi préoccupante est l’apathie des opinions publiques. En Chine, la remise au pas de Hongkong préfigure ce qu’il pourrait advenir de Taïwan. Flattée par la dérive impérialiste de Poutine, la classe la plus aisée de la société russe semble s’être accommodée de l’économie de guerre et des sanctions internationales et peut tranquillement continuer à voyager à Dubaï ou en France en passant par la Turquie. Aux États-Unis, les démocrates, Hollywood et les campus universitaires sont inertes, laissant le champ libre à une base Maga (Make America Great Again) dominatrice. En Europe, à des degrés variables toutefois, les opinions continuent à faire l’autruche face aux attaques existentielles qui les menacent.

Terminons ce sombre tableau par une petite lumière qui s’allume en Syrie où, un an après le renversement du régime de Bachar al-Assad, l’ancien djihadiste Ahmed al-Charaa poursuit ses tentatives de normalisation, ouvrant la voie à un possible retour des archéologues puis des touristes à Alep et Palmyre.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°667 du 12 décembre 2025, avec le titre suivant : Un ordre international fracturé

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