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ART CONTEMPORAIN

Vincent Bioulès toujours bien vert

Par Henri-François Debailleux · Le Journal des Arts

Le 13 janvier 2023 - 661 mots

PARIS

Une exposition de tableaux inédits conduit le visiteur sur les chemins colorés du passé du peintre montpelliérain.

Paris. Les toiles récentes (datées de 2019 à 2022) de Vincent Bioulès rappellent une savoureuse répartie de Jacques Dutronc. Il y a déjà quelques années, quelqu’un avait fait remarquer au chanteur qu’il était bien conservé, alors qu’il avait un certain âge, et il avait répondu que c’était un juste retour des choses puisque, lorsqu’il était jeune, il faisait vieux. Il en est de même avec les œuvres de Vincent Bioulès (né en 1938, à Montpellier) qui témoignent aujourd’hui d’une magnifique fraîcheur, alors que dans un registre auquel il est maintenant fidèle depuis presque cinquante ans, elles paraissaient totalement à contretemps, il y a encore quelques années, pour certains regards malveillants. Mais la roue de la mode tourne, au point que, comme l’indique la galerie La Forest Divonne, certains visiteurs en découvrant l’exposition pensent que son auteur a une trentaine d’années.

Les couleurs l’enfance

De fait, sa peinture n’a pas d’âge. Or, pourtant, c’est bien de temps, d’un temps passé depuis longtemps dont parlent ces tableaux. Mais sans mélancolie, avec juste un peu de nostalgie, sans doute, pour évoquer de beaux souvenirs. « Je suis un vieux monsieur et le futur d’un vieux monsieur est une réflexion sur sa propre vie, et les souvenirs peuvent à nouveau constituer un futur lorsque nous nous mettons à les évoquer et à les peindre », précise l’artiste. L’ensemble est d’ailleurs intitulé « Mes lieux de mémoire ». Autrement dit, les maisons où il a grandi : celle de ses parents à Montpellier avec le jardin vu de sa chambre et les ciels aux tonalités liturgiques, du rose au violet ; le mazet de ses grands-parents à Nîmes, avec de grands arbres, une serre et sa terrasse ; la maison de Meaulx, celle de sa marraine quand il était enfant ; mais aussi le pic Saint Loup, le port de Carnon ou l’étang de l’Or – « Mon sujet favori. Chaque fois que nous y passons avec ma femme, le ciel et l’eau ont une couleur différente », indique-t-il. Mais Bioulès peut aussi zoomer sur un mimosa (pour le jaune), un hortensia (le rose) ou un rosier blanc. Car tel est bien le propos de toutes ses œuvres : peindre et interpréter la nature, évoquer la lumière, travailler les subtilités des tonalités chromatiques, faire vivre et vibrer les touches, composer avec l’espace, les points de vue, les perspectives pour faire passer, non pas tant une fidélité au motif que l’idée qu’il s’en fait, la perception qu’il ressent et la sensation qu’il veut en donner. Sans oublier, bien sûr, l’omniprésent jeu avec les matières en surface lisses ou granuleuses sur le support toile. Comme une fidélité à son passé, puisqu’avant de (re)venir à la peinture figurative dès 1973, Vincent Bioulès fut un membre éminent du groupe Supports/Surfaces, qu’il avait cofondé en 1969 et dont il avait trouvé le nom avant de le quitter assez vite. « J’ai toujours un peu trompé mes petits camarades du groupe parce que, à l’époque, je n’ai jamais cessé de faire dans mes carnets des croquis et des aquarelles devant la nature », confesse-t-il. Et quels que soient leur support ou leur taille, qu’ils soient serrés ou larges, les plans de l’érudit et fin Bioulès ne perdent jamais de vue les clins d’œil à l’histoire de la peinture, de Paul Cézanne à Henri Matisse en passant, entre autres, par Pierre Bonnard.

De 5 000 à 45 000 euros, les prix qui ont doublé en douze ans depuis la première exposition de Bioulès dans cette galerie et qui montent régulièrement, restent modestes pour un artiste à la longue carrière, inscrit dans l’histoire de l’art et auquel la galerie consacrera tout son stand lors de la prochaine foire Art Paris au printemps, avec une rétrospective sous le commissariat de Catherine Millet. Il faut également signaler que le Centre Pompidou a acquis cette année une importante œuvre (250 x 190 cm) de 1983, Les Barricades mystérieuses.

Vincent Bioulès, mes lieux de mémoire,
jusqu’au 25 février, galerie La Forest Divonne, 12, rue des Beaux-Arts, 75006 Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°602 du 6 janvier 2023, avec le titre suivant : Vincent Bioulès toujours bien vert

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