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ART CONTEMPORAIN

Un Sam Szafran cinématographique

Par Itzhak Goldberg · Le Journal des Arts

Le 13 octobre 2021 - 323 mots

PARIS

Paris. Fidèle à Sam Szafran (1934-2019) – l’artiste est entré dans la galerie en 1964 ! –, Claude Bernard montre des travaux datant essentiellement de la dernière décennie.

Malgré la taille réduite de l’exposition (dont cinq œuvres sont mises en vente à partir de 20 000 euros), on retrouve les obsessions habituelles de Szafran. À l’entrée, un escalier en colimaçon, motif qui hante cette œuvre au point de devenir sa marque de fabrique. Sphérique, curviligne, transformé en une structure hélicoïdale proche de l’anamorphose, c’est avant tout un piège à regard. Ailleurs, quelques magnifiques fusains, des lignes souples et dynamiques qui, en se déroulant, suggèrent des corps humains. Peut-on parler de peinture figurative ? Sans doute, une figuration qui néanmoins ne se plie pas au réel, mais le malmène ou le réinvente en quelque sorte.Ce sont ces entorses à la réalité qui font l’intérêt et la puissance de cette œuvre.

Un espace anxiogène

Suivent deux immenses pastels qui figurent une végétation dense, des juxtapositions à l’infini de feuilles, une profusion à la limite du perceptible. Chez Szafran, la nature est toujours envahissante, étouffante, voire menaçante. Cependant, c’est l’œuvre centrale de l’exposition qui reste la plus intrigante (Sans titre, 2012). L’œil erre face à ce condensé d’images, qui relève pratiquement d’un collage pictural. On y entre par un escalier qui s’échappe d’une cage, s’élargit et forme une passerelle entre intérieur et extérieur. Puis on plonge dans une cour octogonale profonde, entourée de bâtiments qui s’écartent et s’aplatissent, recouverts de fenêtres aveugles. Cette architecture inquiétante – une prison ? – entre en collision avec le paysage urbain du fond et forme un labyrinthe discontinu, déstabilisant et confus. C’est ici à la technique cinématographique et à sa capacité à créer un espace anxiogène que les toiles de Szafran se réfèrent. Happé et perdu dans les perspectives diverses que permet le mouvement en spirale de la caméra, le regard, en l’occurrence celui du spectateur, est saisi de vertige.

Sam Szafran,
jusqu’au 20 novembre, Galerie Claude Bernard, 5, rue des Beaux-Arts, 75006 Paris.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°575 du 15 octobre 2021, avec le titre suivant : Un Sam Szafran cinématographique

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