Foire & Salon

Le nouveau salon d’antiquaires qui part à l’offensive contre la « Biennale »

Par Marie Potard · lejournaldesarts.fr

Le 22 janvier 2018 - 1030 mots

PARIS

« Sublime, la biennale des arts d’exception » est annoncée à Paris aux Invalides en octobre, la même semaine que la Fiac et seulement un mois après la bien mal nommée Biennale Paris. De quoi inquiéter cette dernière, qui a déjà du mal à reprendre son souffle.

Les salons d’arts et d’antiquités n’en finissent pas de se créer à Paris. Mais le tout est de les faire durer dans le temps. Après Paris Beaux-Arts organisé en 2015 par le Syndicat National des antiquaires (SNA) qui n’a pas survécu à sa première édition, Fine Arts Paris en novembre dernier, qui est reconduit pour une deuxième, c’est autour de « Sublime » de prendre place dans un calendrier déjà très serré.

La nouvelle manifestation, qui balayera toutes les époques jusqu’aux années 50-60, se tiendra du 14 au 21 octobre, la même semaine que la Fiac (18-21 octobre), avec l’intention d’organiser une semaine dévolue à l’art, depuis les arts anciens avec « Sublime » jusqu’à l’art contemporain avec la Fiac. Un modèle proche de Frieze et Frieze Master à Londres.

A l’initiative de ce projet se trouve Christian Deydier, marchand en art asiatique à Paris, qui avait été écarté de son poste de président du SNA - organisateur de la Biennale des Antiquaires - en juin 2014 suite à un putsch. « Je crée un nouveau salon parce qu’il n’y a plus de salon international à Paris ! Je ne voulais plus rien faire mais on me l’a demandé avec insistance. Nous avons donc créé à plusieurs une société commerciale [C.B.P.J Evènements]. Nous ne sommes ni une association, ni un syndicat, ce qui nous donne une grande liberté. Quand un salon de marchands est géré par un syndicat de marchands, il y a des pressions, des règlements de compte…Or, nous ne sommes pas là pour se faire la guerre. Nous sommes avant tout des gens passionnés ».

« Sublime » s’installera aux Invalides - un des lieux les plus prestigieux de Paris - sous une tente blanche à l’arrière du monument, mais pas dans la cour principale pour ne pas avoir à démonter à la hâte l’installation en cas de cérémonie officielle. D’une surface de 3 600 m2 dont 2 536 m2 dévolus aux stands qui pourront aller jusqu’à 65 m2, la structure éphémère pourra accueillir entre 35 et 40 antiquaires et galeries d’art ainsi qu’une dizaine de joailliers. « Je suis en pourparlers très avancés avec eux mais nous arrivons un peu tard car leurs collections sont créées très en amont », indique Christian Deydier qui souhaite sélectionner la crème de la crème des antiquaires et marchands. « Pas question de se retrouver dans un salon où, au moment de la commission d’expertise, la moitié d’un stand est vidé », lance-t-il.

Selon l’équipe organisatrice, il s’agira d’un événement de très haut niveau qui aura vocation à faire revenir les collectionneurs du monde entier grâce à la mise en place de voyages de promotion et ce, dans 19 villes du monde, de bureaux de presse à l’étranger et de soutien des ambassades et consulats. En somme, tout ce que l’ex-président avait instauré à la Biennale quand il en était le chef d’orchestre. Mesures qui ont été abandonnées depuis.

Pour l’heure, plusieurs marchands ont déjà confirmé leur présence comme Phoenix Ancient Art (Genève), De Jonckheere (Monaco), Xavier Eeckhout (Paris), Jean-Gabriel Mitterrand (Paris), Berko Fine arts (Belgique), Laurence Vauclair (Paris). Antoine Barrère ou encore Robert Vallois n’ont pas encore donné leur réponse.

« Sublime » aura lieu tous les deux ans. L’annualité de la « Biennale des antiquaires » du SNA, constituait un des points de désaccord entre Christian Deydier et son successeur Dominique Chevalier qui prônait l’annualisation. « Combien de temps faut-il pour préparer une collection, sûrement pas en un an ! Il faut que ce soit une surprise, que nous montrions des pièces de grande qualité mises de côté exprès pour l’événement et que les gens n’ont pas l’habitude de voir. C’est ce qui fait notre renommée », déclare l’initiateur du projet.

« Il y a du pain sur la planche. Rien n’est gagné. Il n’y a pour l’instant qu’une dizaine d’inscrits et j’ai quelques réserves quant au nom choisi », fait remarquer un marchand qui souhaite rester anonyme. « Le fait que ce salon soit tous les deux ans pourrait me convenir. C’est fondamental pour Paris, un événement à part, qui ne ressemble à aucun autre, où les gens se décarcassent », confie Jean-Christophe Charbonnier, marchand d’art japonais, qui pourrait bien se laisser tenter. « Cependant, j’ai quelques doutes sur la capacité des organisateurs à faire revenir les joailliers ». Surtout sous une tente, pourrait-on ajouter.

Un mois après la Biennale Paris qui a lieu en septembre et dont la dernière édition ne restera pas dans les annales - une fréquentation décevante, l’absence remarquée de certains poids-lourds… - la manifestation du Grand Palais a de quoi s’inquiéter. François Belfort, directeur général du SNA-Biennale Paris affirme qu’il y a plus de 50 inscrits pour le moment mais certains marchands, parties prenantes, murmurent qu’il n’y en aurait qu’une vingtaine. La Biennale Paris aura-t-elle la force de résister à cette nouvelle concurrence ? « Nous ne souhaitons pas avoir une prise de parole en réaction à l’annonce qui est parue dans les différents supports de presse », a indiqué le directeur général.

Sous couvert d’anonymat, un fidèle exposant de la Biennale donne son avis : « c’est très préoccupant pour la Biennale Paris. L’année dernière a été décevante et je n’ai pas prévu d’y retourner cette année. Christian Deydier a une meilleure capacité à organiser un événement d’envergure et sait attirer les bonnes personnes. Et puis la date est mieux choisie ». Pour Christophe Hioco, marchand en art asiatique, membre du SNA et présent à la dernière Biennale Paris, « ce n’est pas évident qu’il y ait de la place pour deux évènements importants à Paris étalés seulement sur deux mois et surtout dans le contexte actuel. D’un autre côté, c’est peut-être une opportunité pour le conseil d’administration du SNA de se lancer un défi et de se poser les bonnes questions : comment faire pour redonner à la Biennale son lustre d’antan ? Mais ça risque d’être difficile ».

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