Galerie

La Galerie Papillon, 30 ans de soutien aux artistes

Par Alexia Lanta Maestrati · L'ŒIL

Le 22 janvier 2020 - 776 mots

Survivre dans un contexte économique en dents de scie est une prouesse dont peu d’enseignes peuvent se vanter.

Les galeries se font et se défont, et si quelques grandes enseignes peuvent se targuer d’avoir survécu plusieurs décennies, les galeries de taille moyenne peinent à survivre. « Nous avons traversé toutes les crises et, maintenant, je n’ai plus d’inquiétude, nous nous en sortons toujours », s’amuse Claudine Papillon qui a fondé la galerie en 1989. Elle sera rejointe en 2007 par sa fille Marion Papillon qui, jusqu’alors, avait multiplié les expériences dans la culture (au service de la communication au Centre Pompidou ou à l’ambassade de France à Moscou, par exemple). « 30 ans pile ! », l’exposition anniversaire de la galerie qui a pris fin le 11 janvier dernier, dévoile la ligne artistique de l’enseigne : poétique, mais aussi pleine d’humour, à l’image du duo mère-fille qui, complices, rient de bon cœur en évoquant leur parcours. Pour monter cette exposition, elles ont pioché la plupart des œuvres dans leur stock. Ainsi, peut-on voir des pièces d’artistes historiques de la galerie comme Erik Dietman ou Hreinn Friðfinnsson, mais aussi des recrues plus récentes comme le duo belgo-italien VOID. Au total, vingt-quatre plasticiens, auxquels s’ajoutent dix artistes invités, composent une exposition dense et réussie. Deux types d’artistes sont représentés, « les émergents jeunes et les émergents plus vieux qui n’ont pas eu la reconnaissance qu’ils méritent comme Didier Trenet ou Vassiliki Tsekoura. Aujourd’hui, le marché français a besoin qu’on soutienne les artistes en milieu de carrière », explique Marion Papillon.

Leur stock, important, découle de leur stratégie d’acheter des œuvres aux artistes depuis toujours. « Je ne vois qu’une manière d’aider les artistes : leur acheter des œuvres. Si nous finançons la production, nous en devenons en partie propriétaires, et la notion de liberté est très importante pour moi », souligne Claudine Papillon. La fibre de la galerie réside dans cette relation intime avec les artistes. Claudine se souvient : « Déjà, en 1979, quand j’étais directrice de la Galerie Bama, j’ai vendu une toile de Sigmar Polke pour 20 000 francs et nous avons versé la totalité à Polke, car nous voulions soutenir les artistes ; il s’agit de l’ADN de notre conception du métier. »

Soutenir la scène française

Ce qui a le plus marqué Claudine Papillon en 30 ans d’activité, c’est « la violence du marché ». Pour cette enseigne de taille moyenne, il a fallu en effet survivre à la multiplication des galeries avec une offre qui s’étoffe, et, par conséquent, des collectionneurs extrêmement sollicités et parfois moins fidèles. « La périodicité a énormément changé : quand j’ai commencé, nous exposions tous nos artistes tous les ans, les expositions étaient moins longues. Désormais, nous proposons entre cinq et six expositions par an. Avant, nous pouvions recréer de la demande, aujourd’hui nous avons besoin de temps, car les clients se dispersent », explique-t-elle. « Certains collectionneurs achètent très large pour acheter les meilleurs du point de vue spéculatif. C’est ce que Pierre Restany expliquait il y a 20 ans, que je ne défends pas, mais qui existe : acheter plein d’artistes et il y en a un qui paiera le reste », ajoute Claudine. Parmi les évolutions principales de ce marché à plusieurs vitesses s’ajoutent le développement des ventes aux enchères et le fait que le rapport avec les maisons de ventes aux enchères en France est très différent de celui des États-Unis. « Nous, la profession, n’avons pas assez soutenu les enchères de nos artistes français et, aujourd’hui, c’est quelque chose que nous pourrions regretter », explique Marion.

L’autre changement drastique du milieu, est bien entendu les foires d’art contemporain, dont le coût financier important pénalise les galeries les plus fragiles. Cette année, la Galerie Papillon revenait après plusieurs années d’absence à la Fiac. Avoir trente ans d’expérience, cela a ses avantages et ses inconvénients : « Il est plus simple pour une jeune galerie, de moins de cinq ans d’être dans les foires, car elles ont des tarifs préférentiels », explique Marion Papillon.

Pour répondre à ces problématiques, Claudine et Marion Papillon se sont investies dans le dynamisme et la vie des galeries parisiennes. Déjouant la concurrence entre marchands, elles y préfèrent la collaboration. C’est ce qu’elles proposent d’ailleurs en travaillant avec les galeries des artistes invités dans cette exposition anniversaire. En témoigne, également, l’investissement de Marion Papillon qui a notamment fondé l’association Choices, à l’origine du Paris Gallery Weekend. Par ailleurs, elle a été nommée en décembre 2019 présidente du Comité professionnel des galeries d’art. « L’enjeu principal est de faire connaître le milieu des galeries et notre soutien indéfectible auprès des artistes, et, au-delà de notre milieu professionnel, notamment avec les collectivités et les politiques. Il faut soutenir la scène française », conclut-elle.

Galerie Papillon
13, rue Chapon, Paris-3e, www.galeriepapillonparis.com

Thématiques

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°731 du 1 février 2020, avec le titre suivant : La Galerie Papillon

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque