Enjeux

La Fiac face à son avenir

Par Frédéric Bonnet · Le Journal des Arts

Le 14 octobre 2015 - 926 mots

Alors que la concurrence mondiale ne faiblit pas, la Fiac est à un carrefour, devant réfléchir à son développement international mais aussi à son déménagement durant la fermeture temporaire du Grand Palais.

En inaugurant sa 42e édition, la Foire internationale d’art contemporain (Fiac) aura regardé la qualité de ses exposants au présent, mais probablement ses dirigeants sont-ils déjà tournés vers le futur, tant les défis s’annoncent nombreux.

Le présent est marqué par une réorientation stratégique non négligeable, puisque le nombre de galeries installées au Grand Palais décroît, passant de 191 en 2014 à 175 cette année ; au nombre de seize donc, ce différentiel n’a rien d’anodin. Il correspond à une réponse apportée par la Fiac à la demande de plus en plus forte des galeries, qui au fil de leur croissance ne se satisfont plus de stands exigus : elles réclament légitimement des surfaces plus grandes afin d’offrir de meilleures conditions de visibilité à leurs artistes. « Il n’y a pas de volonté de diminuer le nombre d’exposants, mais lorsqu’on suit le travail de galeries désormais arrivées à une certaine maturité, on ne peut pas les contraindre indéfiniment à exposer sur de petites surfaces. De même que nous devons accompagner l’évolution des plus jeunes », soutient Jennifer Flay, la directrice du salon.

Concrètement, cette extension des surfaces ne touchera pas les enseignes les plus prestigieuses, pour lesquelles la taille des stands reste limitée à 80 m2 – lorsque par exemple Frieze Art Fair en offre facilement 120. La circulation a été réaménagée dans les galeries sud, à l’étage, afin d’offrir des stands de 50 m2 à des exposants tels les parisiens Lœvenbruck, Valentin et Frank Elbaz, ou encore Pilar Corrias (Londres) et Peres Projects (Berlin). De même, de plus jeunes enseignes comme Rodeo (Istanbul, Londres) ou Plan B (Cluj, Berlin), auparavant cantonnées à 20 mètres carrés, s’en voient attribuer 35.

Beaucoup se félicitent toujours de la belle tenue du salon, qui accueille des galeries provenant de 23 pays. « Qualitativement la Fiac continue de monter en gamme et attire des galeries de plus en plus internationales et prestigieuses, ce dont tout le monde doit se réjouir. Cela contribue à un nivellement par le haut qui oblige certaines galeries à se remettre en question et à passer d’un statut de galeries locales à [celui d’enseignes] internationales », relève ainsi un exposant parisien. Les Français y sont au nombre de 42, parmi lesquels Allen (Paris) ou Hervé Bize (Nancy) font leur entrée. Surtout, de belles prises étrangères sont à noter. L’arrivée de Long March Space (Pékin), The Modern Institute (Glasgow), Luisa Strina (São Paulo), Tanya Bonakdar (New York) ou Landau Fine Art (Montréal) est le signe d’une indéniable attractivité de la manifestation et de la place de Paris.

Une Officielle qui laisse perplexe
Après un lancement en demi-teinte l’an dernier, Officielle est reconduite aux Docks-Cité de la mode et du design. Si l’aménagement des lieux dégage des espaces plus accueillants, la liste des exposants laisse une impression mitigée. Parmi les 60 noms qui la composent, quelques-uns sont notables, tels Ibid. (Londres, Los Angeles), Meessen De Clercq (Bruxelles), Edel Assanti (Londres), Jack Hanley (New York) ou Espaivisor (Valencia), mais certaines enseignes en un nombre non négligeable interrogent sur la qualité globale de l’ensemble. Quatorze Français y sont présents, parmi lesquels 22,48 m2, Semiose, Galerie De Roussan ou Eva Meyer.

Face à Officielle, des jeunes galeries telles Antoine Levi, Crèvecœur, Sultana, High Art et Gregor Staiger lancent une manifestation « off » qui paraît enfin séduisante. « Paris Internationale » – c’est son nom –, regroupe des galeries qui montent, comme Supportico Lopez (Berlin), Carlos/Ishikawa (Londres), Freymond-Guth (Zurich), ou d’autres plus installées telle Praz-Delavallade (Paris), inexplicablement évincée de la Fiac.

Les défis à venir
En outre, la Fiac doit faire face à des défis. La bouture de Los Angeles patine et ne verra probablement pas le jour en 2016 comme annoncé, alors que son lancement initial, prévu pour 2015, avait déjà été reporté. Aurélia Chabrillat, sa directrice, a de son propre chef tiré sa révérence il y a quelques mois et n’a pas encore été remplacée. Il serait souhaitable que Reed Expositions, propriétaire de la Fiac, repense sa stratégie de conquête à l’étranger et définisse un véritable projet. La diffusion de marques, telle que pratiquée par Art Basel et Frieze en particulier, comporte nécessairement des limites et impose une réflexion sur le plan à la fois local et global dans toutes les implantations, au risque d’apparaître hors sol, sans rapport avec le contexte. Or il semble, au vu des commentaires glanés çà et là, que l’installation française dans la Cité des Anges n’est pas attendue et laisse, au mieux, nombre d’acteurs locaux indifférents, jamais aucune foire importante ne s’étant développée à Los Angeles.

Un autre problème, épineux, auquel va devoir faire face la foire parisienne, est celui de la fermeture prochaine du Grand Palais pour de nouveaux travaux de rénovation, qui devraient permettre de dégager des espaces et donc d’agrandir la Fiac ; un exil forcé de mauvaise augure, surtout s’il devait durer, tant le salon et son rayonnement sont désormais indissociables de son écrin. Aucune date n’est encore annoncée mais une fermeture est actée, même si le contrat triennal avec la Fiac a été signé pour la période 2016-2018. « L’idée de quitter le Grand Palais me terrifie, confie Jennifer Flay, et sans doute une solution de rechange en attendant la réouverture serait une structure temporaire installée à proximité du Grand Palais, et en tout cas dans le centre de Paris. » La Fiac pense à son futur en effet.

FIAC
Directrice : Jennifer Flay
Nombre d’exposants : 175
Tarif du stand au mètre carré : 589 € dans la nef et 539 € dans les galeries sud et sud-ouest
Nombre de visiteurs en 2014 : 74 567

Fiac, du 22 au 25 octobre, Grand Palais, avenue Winston-Churchill, 75008 Paris, www.fiac.com, tlj 12h-20h, vendredi 23 jusqu’à 21h.

OFFICIELLE
Directrice : Jennifer Flay
Nombre d’exposants : 60
Tarif du stand au mètre carré : 465 €
Nombre de visiteurs en 2014 : 14 146

Officielle, du 21 au 25 octobre, Les Docks-Cité de la mode et du design, 34, quai d’Austerlitz, 75013 Paris, tlj 12h-20h, vendredi 23 jusqu’à 21h.

Légende Photo :
Le stand de la galerie neugerriemschneider (Berlin) avec un accrochage des oeuvres de Michel Majerus (1967-2002) à la FIAC - 21 octobre 2015 © photo Ludosane 

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°443 du 16 octobre 2015, avec le titre suivant : La Fiac face à son avenir

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