Espagne - Foire & Salon

Arco, solide malgré les crises

Par Alexia Lanta Maestrati · Le Journal des Arts

Le 12 mars 2020 - 624 mots

Les tensions politiques et le coronavirus n’ont pas empêché la bonne tenue de la foire d’art madrilène.

Madrid. L’édition 2020 d’Arco, qui s’est tenue du 28 février au 1er mars, la première sous la houlette de Maribel López qui remplace Carlos Urroz à la direction, arborait une qualité fidèle aux éditions précédentes. La foire se distingue des autres rendez-vous du marché de l’art contemporain par son ancrage espagnol et sud-américain.

On y trouvait des signatures connues, comme les œuvres cinétiques de Jesús-Rafael Soto (galeries Timothy Taylor, Londres, et Denise René, Paris), ou une imposante sculpture monolithe en granit d’Eduardo Chillida (Hauser & Wirth). Mais arpenter les allées de l’Ifema – le palais des congrès de Madrid – permettait de découvrir des stands qui sortaient des sentiers battus. Ainsi, sur les cimaises de la galerie Ruth Benzacar (Buenos Aires), une des doyennes de la manifestation, les travaux de Marie Orensanz (prix Aware 2020), ainsi que ses textes sur la menstruation, faisaient face à un grand paysage au fusain d’Ana Gallardo questionnant la maternité. Plus loin, les monochromes pliés de l’Argentine Mariela Scafati traitaient aussi du corps de la femme, dans une métaphore sur la résistance aux crises politiques que subit son pays (Galerie Isla flotante, Buenos Aires).

Autre accrochage réussi, et nouveauté de cette 39e édition, le secteur « It’s Just a Matter of Time » était pensé comme une exposition en hommage au Cubain Felix González-Torres (1957-1996) : les travaux de ses contemporains tels que les « Rosettes » de Wendy Jacob dialoguaient avec ceux de plus jeunes plasticiens, comme l’installation composée de flyers et de ballons aux couleurs explosives de Kia LaBeija.

Mais la plus grande foire d’art moderne et contemporain espagnole ne s’est pas déroulée sous le meilleur des climats. L’Espagne est touchée par une crise politique, marquée par deux élections législatives qui n’ont pas permis de constituer un gouvernement, par la montée de l’extrême droite et par les tensions catalanes. « Le commerce est très difficile et très lent. Arco est une foire où le marché est fort, mais le marché espagnol, lui, ne l’est pas », déplorait Gorka Picatoste, directeur de la galerie Casado Santapau (Madrid). Même analyse à la Galerie Helga de Alvear (Madrid), l’une des plus importantes du pays : « La situation s’améliore en Espagne, mais cette année a été particulièrement complexe », expliquait son directeur, Alberto Gallardo.

Un ballon d’oxygène pour les galeries sud-américaines

Pourtant la manifestation madrilène a su faire face aux crises et, si les avis des 209 galeries présentes sont mitigés, nombreuses sont celles à avoir tiré leur épingle du jeu. « La dernière édition d’Arco Madrid a été particulièrement solide. Néanmoins, nous avons senti les prémices d’un ralentissement plus global, les perspectives économiques étant plus incertaines cette année, et l’épidémie actuelle du coronavirus a empêché plusieurs collectionneurs internationaux de se rendre à la foire », souligne la Galerie Mor Charpentier (Paris).

Dès l’ouverture, la Galería Juana de Aizpuru (Madrid) a vendu trois grandes toiles abstraites de Miguel Angel Campano (60 000 euros). « Tout est compliqué en ce moment, mais nous vendons bien à Arco », confirme Concha Aizpuru, sa directrice. Car Arco est un ballon d’oxygène, notamment pour les galeries espagnoles et sud-américaines qui souffrent d’un commerce ralenti.

L’Amérique latine, elle aussi loin d’être épargnée par les crises politiques, a réussi à être représentée cette année par 31 galeries, mais l’an passé elles étaient au nombre de 44. « Les ralentissements dus aux tensions et aux mouvements politiques nous poussent d’autant plus à exporter. En Argentine, comme au Mexique, le gouvernement nous aide à financer les stands à hauteur de 50 % », se félicitait Mauro Herlitzka, directeur de Herlitzka + Faria (Argentine). Mais d’autres auront eu moins de chance, ainsi les deux galeries vénézuéliennes présentes l’an passé n’ont pas pu faire le déplacement cette année.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°541 du 13 mars 2020, avec le titre suivant : Arco, solide malgré les crises

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