Centre d'art

Enterrement

Castres perd son centre d’art

Devant quitter l’hôtel de Viviès, la structure n’a pas trouvé à se reloger

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 30 septembre 2009 - 676 mots

Le « Laboratoire artistique international du Tarn » (LAIT) va être amputé de son antenne castraise. Partagée entre Castres et Albi, l’association est sommée de quitter l’hôtel Viviès, dont les travaux de mise en sécurité ne seront pas financés par ses partenaires institutionnels. La mairie a, de plus, refusé de renouveler la convention trisannuelle du centre d’art.

CASTRES -  Le 27 septembre était inauguré au centre d’art de Castres (Tarn) l’exposition « Aux petites filles modèles », conçue dans le cadre du Printemps de Septembre 2009 (lire p. 11) par Christian Bernard, son directeur artistique. Dans cet ancien hôtel renaissance, les quatre artistes, Béatrice Cussol, Cathryn Boch, Sylvie Auvray et Fleur Noguera, sont directement intervenues de concert du sol au plafond, réalisant un ensemble jubilatoire où les identités de chacune s’assemblent et se répondent. Cette maestria de formes devrait pourtant constituer la dernière exposition accueillie dans ce lieu ouvert en 1986.

Certes, le centre d’art de Castres a connu une histoire mouvementée, soldée par une fusion en 2007 avec le centre départemental Cimaise et Portique d’Albi (Tarn). Rebaptisée « Laboratoire artistique international du Tarn » (LAIT), l’association se partageait depuis entre deux lieux, l’hôtel de Viviès à Castres et Les Moulins albigeois à Albi. Mais en avril dernier la direction régionale des Affaires culturelles (DRAC) Midi-Pyrénées exige l’abandon définitif de l’hôtel de Viviès, les partenaires institutionnels ne parvenant pas à financer les travaux de mise en sécurité du site, évalués à 300 000 euros. Dans la foulée, la municipalité menée par le maire UMP Pascal Bugis refuse de renouveler la convention trisannuelle du centre d’art. Pour Christian Bernard, la question des travaux n’est qu’un prétexte. « Le vrai argument, c’est que le maire estime que l’art contemporain n’intéresse pas ses administrés, indique-t-il. Une chose est la légalité de la décision, une autre sa légitimité. Ce que je reproche, ce n’est pas de fermer le lieu, mais de fermer l’activité, et l’État est coresponsable de cet enterrement. Si le maire est souverain dans sa collectivité, il est aussi comptable des efforts de toutes les autres collectivités qui financent le centre d’art, efforts qu’il raye d’un coup de trait. » La direction du LAIT avait pourtant travaillé sur des solutions de rechange. « J’avais évoqué la possibilité de nous reloger dans l’enceinte du Musée Goya, mais il n’y a pas eu de réponse de la municipalité, précise Jackie-Ruth Meyer, directrice du centre d’art. Il y a plusieurs lieux disponibles dans Castres, notamment un hôpital désaffecté à côté de l’Hôtel de Ville. » Le désintérêt du maire est tel qu’il n’a pas souhaité rencontrer le président du LAIT, Georges-Henry Ser, et n’a pas daigné inaugurer l’exposition « Aux petites filles modèles ». Interrogé en août par le quotidien Le Tarn Libre, Pascal Bugis avait même déclaré : « Si on ne trouve pas un terrain d’entente, les responsables de cette structure iront faire leurs activités lucratives ailleurs. » Considérer l’activité d’un centre d’art comme « lucrative » atteste d’un manque criant de lucidité et d’expertise !

Cette cessation brutale d’activité est d’autant plus injustifiable que le centre d’art avait acquis un équilibre financier et conquis un public, avec une fréquentation atteignant un pic de 60 000 visiteurs l’an dernier. Par ailleurs, 12 000 élèves avaient bénéficié d’une action de médiation. « On ne se rend pas compte de ce qu’est la disparition d’un lieu à Castres, martèle Christian Bernard. Si on veut qu’il y ait des artistes, il faut qu’il y ait des occasions de rencontre avec l’art. » Or la fermeture du LAIT est grandement préjudiciable à une ville sans identité culturelle et dépourvue d’université. Faute d’alternative, le centre d’art pourrait se recentrer définitivement à Albi. Jackie-Ruth Meyer réfléchit aussi à un éventuel redéploiement dans une autre commune du département. Le cas du LAIT n’est malheureusement pas isolé. « Les problèmes de désengagement des collectivités territoriales se multiplient, regrette Noëlle Tissier, présidente de l’association française de développement des centres d’art (DCA). On compte beaucoup sur le soutien de ministère public. » À bon entendeur…

Site internet : www.centredartlelait.com

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°310 du 2 octobre 2009, avec le titre suivant : Castres perd son centre d’art

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