Mucha, tête d’affiche

Par Colin Lemoine · L'ŒIL

Le 29 juin 2009 - 312 mots

C’est l’un des événements de l’été. Trente ans après l’exposition rétrospective que les galeries du Grand Palais avaient consacrée à l’artiste, le musée Fabre de Montpellier célèbre à son tour Alfons Mucha (1860-1939).

Deux cent quatre-vingts œuvres forment un parcours remarquable dont tout laisse à penser qu’il sera remarqué. Une fois n’est pas coutume : le nom de Mucha, après avoir peuplé d’une graphie timide tant de réclames publicitaires, sera enfin en haut de l’affiche.

Du reste, c’est bien l’affiche qui propulsa Mucha au faîte de sa gloire. C’est bien ce support reproductible qui divulgua sa création singulière. Ainsi ces femmes languides déployant des chevelures incandescentes pour vanter la qualité du papier Job. Ainsi ces bières, savons, bicyclettes ou champagnes devenus les éléments inoubliables d’une prose du quotidien. Ainsi cette Sarah Bernhardt devenue l’icône byzantine de la Belle Époque  (Gismonda). Mais la production de Mucha ne saurait se résumer à cette griffe incomparable, capable de sublimer n’importe quel inventaire à la Prévert.

En 1900, l’artiste excède le registre illustratif des années parisiennes (Ilsée, 1897) en décorant le pavillon de la Bosnie-Herzégovine à l’Exposition universelle. Remonté pour l’exposition, le pavillon dévoile le symbolisme stupéfiant de Mucha dès lors qu’il exalte l’histoire. Les 1 000 m2 de son Épopée slave (1912-1926), réalisée pour la ville de Prague, révèlent un luministe halluciné transfigurant l’Art nouveau au cœur d’une quête insensée. Des violets crépusculaires alternent avec des ocres automnaux, des silhouettes translucides côtoient des guirlandes humaines (Le Mont Athos et L’Apothéose des Slaves). Un théâtre cosmique, tout en somptuosités et en allégories. Un songe les yeux ouverts, inquiétant d’étrangeté.

Alfons Mucha jouira à peine de l’exaucement de son rêve de République tchèque. Un cauchemar allait venir de l’Allemagne. Il meurt en 1939, peu après avoir été arrêté par la Gestapo.

« Alfons Mucha », musée Fabre, 39, boulevard Bonne-Nouvelle, Montpellier (34), http://museefabre.montpellier-agglo.com, jusqu’au 20 septembre 2009.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°615 du 1 juillet 2009, avec le titre suivant : Mucha, tête d’affiche

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