Art moderne

Paris-3e

À l’image de Picasso

Musée Picasso - Jusqu’au 12 février 2022

Par Adrien Gombeaud · L'ŒIL

Le 20 décembre 2021 - 322 mots

Il n’existe qu’une seule interview télévisée de Pablo Picasso, et ce sont ces rares images qui ouvrent l’exposition.

L’artiste y raconte qu’on lui a prêté un poste de télévision au moment du mariage de la princesse Margaret et que, finalement, il s’est acheté une télé. « Des fois, je trouve des choses magnifiques à la télé. Mais des fois c’est épouvantable. » Disons-le : cette interview n’a aucun intérêt, Picasso n’en a visiblement rien à faire… et c’est ce qui rend l’incipit de cette exposition si passionnant. Né en 1881, Picasso appartient à une génération qui a vu jaillir le geyser de l’image animée : l’émergence du cinéma, l’arrivée du parlant et de la couleur, l’apogée du star-system, le développement de la télévision… Or, « Picasso à l’image » démontre qu’il aura traversé cette révolution dans une indifférence quasi totale. Au fil des salles, on découvre des œuvres que Picasso a laissé filmer et les apparitions du maître à l’écran. Man Ray le filme pendant ses vacances. Picasso, entre deux apéros, s’évade derrière un drap. Aux documentaristes, il offre des moments fascinants, comme cet instant où il dessine sur une plaque de verre placée devant la caméra de Paul Haesaerts. Plus loin, Robert Picault, son ami potier, le filme transformant une bouteille en gallinacé. La caméra fait de l’acte de création une représentation. Picasso travaille, on regarde danser ses mains. Quand Cocteau lui propose d’apparaître brièvement dans Le Testament d’Orphée, il semble aussi peu passionné par le cinéma que par la télé. En 1956, Clouzot tente de percer le Mystère Picasso. L’écran devient la toile qui voit naître l’œuvre… Le film est hypnotique et le « mystère » intact. Enfin, nous voilà en 1974. Picasso est mort. Thierry Spitzer et Claude Picasso glissent une caméra dans l’atelier de la Californie. L’image attrape des œuvres, des objets amoncelés. Des rayons opalescents et tièdes meublent la pièce désertée. Soudain, par son absence même, Picasso n’a jamais aussi bien habité l’écran.

« Picasso à l’image »,
Musée Picasso, 5 rue de Thorigny, Paris-3e, www.museepicassoparis.fr

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°750 du 1 janvier 2022, avec le titre suivant : À l’image de Picasso

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