Allemagne - Art moderne

James Ensor

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 1 février 2006 - 403 mots

Misanthrope en mal de reconnaissance, coloriste magnifique, peintre de toutes les audaces, Ensor, le bourgeois libertaire, continue de fasciner. Hommage lui est rendu à Francfort.

Portrait d’Ensor en cabot : on raconte qu’en 1942, alors que le vieux peintre assagi et paré de tous les honneurs, reçoit en vénérable, peintres et intellectuels venus en pèlerinage à Ostende, on raconte  que la radio rapporta son décès. La légende dit encore qu’après l’annonce, il alla plusieurs fois se recueillir devant sa statue érigée au cœur de la ville. Récit éloquent s’il en est, révélant un personnage fantaisiste et narcissique qui aura longtemps étrillé les bassesses de ses contemporains dans ses compositions picturales avant que de jouir avec bonhomie du spectacle de sa propre gloire.
Né en 1860 à Ostende, grosse ville portuaire de Flandre occidentale, Ensor ne quittera guère le voisinage de la mer du Nord, pas plus qu’il ne s’éloignera de son père, ingénieur anglais fantasque et buveur, ou de sa mère, peu sensible aux inclinaisons artistiques de son extravagant de fils.
L’enfant grandit derrière le comptoir de la boutique de souvenirs tenue par la maîtresse femme. C’est un établissement dantesque encombré d’objets en porcelaine, coquillages, animaux empaillés, bibelots ou poissons-scies qui ne manqueront pas de nourrir l’imagination fiévreuse du peintre.
L’incursion du jeune homme dans le monde sera brève, le temps de pénibles études à l’académie de Bruxelles à la fin des années 1870. Le temps encore de fréquenter le cercle anarchisant du
physicien Ernest Rousseau.
Obstiné, volontiers sarcastique et forte tête, Ensor participe ardemment aux discussions qui agitent alors Bruxelles. Il prend part en 1883 à la formation des XX – bientôt dominants sur la scène moderne belge – aux côtés de Fernand Khnopff ou de Willy Finch.

Le baron belge
Subversif, incompris, raillé, vulgaire dit-on, le peintre « des masques » essuie de nombreux refus. Retiré sous les mansardes de la maison paternelle à Ostende, Ensor paie ses factures en gravures, tempête en termes féroces et pittoresques dans ses nombreux écrits et radicalise ses allégories.
Mais au tournant du siècle, et alors que la flamme s’étiole et qu’il produit moins, vient la gloire. Lentement, mais follement. Intellectuels et non-conformistes se font les porte-parole du génie mal-aimé. En 1929, il est fait belge et baron et obtient une rétrospective au Palais de beaux-arts de Bruxelles. Et un beau jour de 1942, il reçoit l’auguste salut de sa propre postérité, sept ans avant sa disparition.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°577 du 1 février 2006, avec le titre suivant : James Ensor

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