Restitutions

Un tableau Schloss dans les mailles de la justice américaine

Par Philippe Sprang · lejournaldesarts.fr

Le 22 octobre 2018 - 508 mots

PARIS

Le procureur de Manhattan a ouvert une procédure judiciaire afin de récupérer un tableau de la collection Schloss volée par les nazis.

Salomon Koninck (1609-1656), Vieillard taillant sa plume (détail), huile sur toile, 67 x 51 cm
Salomon Koninck (1609-1656), Vieillard taillant sa plume (détail), huile sur toile, 67 x 51 cm

Et de deux. En 1995, pour le compte des héritiers, les douanes de New York saisissaient à New York un Rembrandt, Juif au Bonnet de Fourrure, provenant de la collection Schloss et volé en France par les nazis en avril 1943. Vendredi 19 octobre 2018, par un communiqué, le gouvernement américain annonçait avoir saisi la justice fédérale afin qu’elle facilite le retour aux héritiers Schloss d’un autre tableau. Cette fois–ci il s’agit d’une peinture d’un peintre hollandais du XVIIe, Salomon Koninck ; Vieillard taillant sa plume. Il a été présenté en novembre dernier à Christie’s par un collectionneur chilien. Le tableau étant fiché comme volé par Interpol, la maison de ventes a alerté le FBI et le bureau du procureur de Manhattan.

Salomon Koninck (1609-1656), <em>Vieillard taillant sa plume</em>, huile sur toile, 67 x 51 cm
Salomon Koninck (1609-1656), Vieillard taillant sa plume, huile sur toile, 67 x 51 cm

La collection Schloss jouissait d’une renommée internationale avant la guerre car elle était la plus importante collection de maîtres hollandais et flamands des XVIIe et XVIIIe siècles en main privée. Volée pour le compte de Göering, la collection comptait 333 tableaux. Un peu moins d’une cinquantaine furent préemptés alors par les musées français, une vingtaine récupérés par l’administrateur judiciaire associé au vol. Le reste rejoignait le Führerbau de Munich, un bâtiment devenu le dépôt pour une partie de la collection de tableaux dont Hitler comptait remplir son futur musée de Linz. Le 30 avril 1945, à la veille de l’arrivée de la VIIe armée à Munich, le Führerbau était pillé et avec lui 240 tableaux de la collection. On savait que beaucoup de marchands allemands avaient revendu alors les tableaux qui réapparaissent à épisodes réguliers sur le marché de l’art depuis les années 1960.  Il en manque toujours plus de 150.

Le Koninck qui figure sous le numéro 4085 du Répertoire des biens spolié a été acquis en 1952 par le père du collectionneur chilien auprès de Walter Andréas Hoffer qui n’est autre que l’un des principaux marchands de Göering et dont le rôle dans le pillage est largement documenté. A l’instar de Bruno Lohse, officier SS et conseiller artistique de Göering à Paris, ou du désormais célèbre Cornelius Gurlitt, et bien que compromis dans les pillages artistiques du IIIe Reich, Walter Andreas Hoffer avait pu reprendre après guerre son activité de marchand.   

A l’annonce de cette information, Eliane Demartini, l’une des héritières de la collection, a fait part au Journal des Arts de son émotion eu égard à l’implication de son mari Jean Demartini, aujourd’hui disparu, dans la recherche des œuvres manquantes. 

« Nous ne pouvons pas inverser l’histoire ni défaire les horreurs commises par les nazis » a indiqué dans un communiqué, le procureur général de Manhattan, Geoffrey Berman en ajoutant « mais nous pouvons montrer notre détermination à garder le souvenir de ceux qui ont souffert et de retourner tout ce qui a été pris ». Une piqûre de rappel à la veille de la célébration du XXe anniversaire de la conférence de Washington sur le pillage des biens juifs. 
 

Thématiques

Tous les articles dans Actualités

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque